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A propos du remaniement du gouvernement : La fin d’une laborieuse alliance entre Juwa et Crc ?

A propos du remaniement du gouvernement : La fin d’une laborieuse alliance entre Juwa et Crc ?

Politique | -

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Les rumeurs se faisaient persistantes ces dernières semaines quant au changement de l’équipe gouvernementale. Elles ont été officialisées samedi dernier par le président Azali Assoumani qui a annoncé le remaniement de son gouvernement en conseil des ministres. Tout laisse croire que Juwa ne sera pas représenté au prochain gouvernement. Pour le plus grand bonheur des caciques de la Convention pour le Renouveau des Comores? En tout cas, ce ne sont pas eux qui s’en plaindraient, eux qui ont appelé à plusieurs reprises à la fin de l’alliance.

 

Effectivement, malgré l’alliance signée pendant le second tour des élections présidentielles de 2016, les relations entre les deux partis n’ont pas tardé à connaitre des embardées.

Il faut dire que rien mais absolument rien ne présageait d’une alliance entre la Crc et le Juwa. Certains n’hésitant pas à parler de pacte “contre nature”. Et pourtant. Le pacte sera scellé.

L’allié d’hier, celui grâce auquel Azali Assoumani allait accéder au fauteuil présidentiel n’allait pas tarder à devenir un invité plus qu’encombrant.

La crise née après la décision du président de rompre les relations diplomatiques d’avec le Qatar allait démontrer que tout, absolument tout opposait les deux formations politiques comme dit plus
haut.

Maintenant que le gouvernement est remercié et dans l’attente d’un nouveau, il nous a semblé opportun de revenir sur les prises de bec entre les deux partis depuis le 26 mars 2016, date de la signature de la plateforme politique entre les ténors de la Crc et du Juwa au stade de Misiri pour soutenir le candidat Azali Assoumani.



Clarifier les positions

La crise sera d’abord parlementaire. Tout commence le 29 novembre avec un communiqué de plusieurs députés qui exigeaient le renouvellement du bureau à l’assemblée nationale. Dans ce combat, le député et par ailleurs secrétaire général par intérim de la Crc, Ali Mhadji déclarait :

 

Juwa et Crc sont alliés, je considère que l’Updc est un parti d’opposition. Donc Maoulana (vice-président de l’assemblée nationale issu de la Crc, ndlr) travaille avec l’opposition, puisqu’il est avec Abdou Ousseni, président de l’assemblée et député élu de l’Updc

 

(Al-watwan N°3062 du 30/11/2016). Cette mini-crise allait se développer et prendre une toute autre envergure le 14 décembre 2016 lorsque les parlementaires ont rejeté la loi de Finances portant sur le budget de 2017 du gouvernement. Maoulana charif avait alors soutenu :

 

C’est la première fois que des députés issus du pouvoir votent contre la loi de Finances qui émane de leur gouvernement. Comment comprendre que les suppléants du ministre des Affaires étrangères et du ministre de la Justice, pire encore le secrétaire général du parti au pouvoir, aient rejeté cette loi ?

 

(Al-watwan N° 3072 du 15 décembre 2016). Cette intervention devant la presse a eu le don de sortir le ministre de la Justice, Fahmi Said Ibrahim, de ses gonds. Il a réagi au lendemain de la sortie de celui qu’on qualifie de “bête noire” de l’alliance Crc-Juwa.

S’il est un secret de polichinelle, c’est bien celui-ci : Maoulana Charif a œuvré de tout son poids pour que l’accord des deux partis politiques se conjugue au passé. La suite des évènements allait lui donner raison.

Et le meilleur était encore à venir lorsque des échauffourées ont éclaté le 07 avril 2017 lors de l’ouverture de la session parlementaire et la présence de deux listes de conseillers de Ndzuani devant rejoindre l’assemblée, que Fahmi Said Ibrahim a décidé de poser la question de l’alliance sur la table.

“On ne peut pas être de la majorité présidentielle et manœuvrer avec l’opposition à l’assemblée. Ce n’est pas bien! Maoulana Charif doit être convoqué par le parti pour clarifier la situation. S’il n’y a plus de majorité, qu’on se le dise et qu’on recompose autrement”, avait-il suggéré le 10 avril 2017 dans notre édition N° 3154.

 


Lire aussi : Ouverture de la première session parlementaire de 2017 : Foire d’empoigne entre des représentants du peuple



L’ombre de Maoulana

Cette question des conseillers de Ndzuani avait déchiré le parlement Comorien avant que la cour constitutionnelle ne tranche contre le Parti Juwa et donc au profit de l’Updc.

Ici aussi, l’ombre du vice-président de l’assemblée nationale, enfant du Washili, planait encore, dit-on dans les milieux autorisés.

L’arrêt rendu par la cour a renforcé le sentiment des députés Juwa qui estiment que toutes les affaires les concernant qui atterrissent à la cour, sont perdues d’avance. Le député Mohamed Msaidié déclarera à Al-watwan le 20 avril 2017 :

 

une chose est claire, les décisions de la cour ne nous concerneront en rien parce que nous refusons et nous allons refuser de siéger avec des députés imposés.

 

Pour autant, cette déclaration quelque peu intempestive n’engagera que celui qui l’ a tenus. De l’eau a coulé sous les ponts entre temps.

Le point de non-retour a été franchi le 08 juin 2017 lorsque l’ancien président Ahmed Abdallah Sambi a posté une vidéo sur les réseaux sociaux pour commenter la rupture des relations diplomatiques avec le Qatar décidée par le président Azali par ailleurs président d’honneur de la Crc. Cette sortie n’a pas été du goût de ce dernier.

Raison pour laquelle, dans une conférence tenue le 12 juin dernier, le secrétaire général du parti présidentiel avait appelé à la fin de l’alliance.

À propos de la vidéo de Sambi, le secrétaire général par intérim de la Crc, Ali Mhadji, a parlé d’«un manque de solidarité».

Mais également de “divorce masqué”. Bien que le secrétaire général du parti Juwa ait répondu qu’il n’existait aucun accord entre ces deux partis, le divorce semblait consommé.

 

Je l’affirme et confirme, il n’y a jamais eu d’accord d’alliance entre les partis Crc et Juwa. Certains crient au divorce alors qu’il n’a jamais eu de mariage ni d’accord entre nos formations,

 

affirmait, à ce propos, le député Ibrahim Mohamed Soulé dans notre édition du 14 juin 2017 N° 3200.

 


Lire aussi : Alliance Juwa- Crc : Quelle alliance ?


 

 “Tirer les conséquences”

Depuis, les absences de l’ancien président dans les grands événements du pays se sont multipliés avec comme point d’orgue, la fête de l’Indépendance.

Lors de cette célébration, le président de la République, faisant allusion à la vidéo de Sambi sur la rupture avec le Qatar, devant un parterre d’invités le 6 juillet à Beit-Salam, déclarait “regretter profondément l’attitude de l’ancien président” et parlait, également, d’en “tirer les conséquences”.

 

Le dernier épisode de cette saga a été enregistré le vendredi dernier lorsque le parti Juwa a publié un communiqué pour réaffirmer son appartenance à la mouvance présidentielle tout en regrettant un manque de concertation.

Dans ce document, on peut lire, entre autres, que “le parti Juwa affirme son association avec le pouvoir, dirigé par le président de la République, Azali Assoumani sur la base de la plateforme d’alliance politique signée au stade de Misiri le 26 mars 2016”. Ou encore : “le parti Juwa regrette le non-respect de cette plateforme d’alliance par notre partenaire sur plusieurs points et l’absence de concertation sur les grandes questions nationales”.

Azali Assoumani vient de remercier son gouvernement. Va-t-il, comme il a affirmé avec vigueur, tiré les conséquences d’une alliance qui n’en était plus une ?


 

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