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Nouveau bloc technique de la maternité à El-Maarouf : entre acquis certains et difficultés réelles

Nouveau bloc technique de la maternité à El-Maarouf : entre acquis certains et difficultés réelles

Santé | -

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Pour avoir déjà accouché, une première fois il y a quatre ans à El-Maarouf dans «l’ancien bâtiment», Ramla Ibrahim sait faire la comparaison. «J’étais assise sur un lit dépourvu de matelas des heures durant avant qu’on me transfère, le lendemain, dans une chambre où il n’y avait même pas de toilettes». Aujourd’hui, de toute évidence, l’accueil lui semble tout à fait différent. «Je suis prise en charge et suivie de près, ma chambre est climatisée et je dois payer 35.000 francs avant de partir». Assurément quelque chose vient de changer avec l’inauguration d’un nouvel espace d’accueil des femmes enceintes. Même si des difficultés persistent.

 

Nouveau bloc technique de la maternité à El-Maarouf. C’est un bâtiment flambant neuf et propre qui vous accueille. L’endroit est plutôt calme pour une maternité de l’hôpital de référence. La chose est assez rare pour passer inaperçue. Trois ou quatre personnes attendent devant la caisse. A droite, les toilettes réservées aux personnes malades. Là encore, d’une propreté impeccable.

A son arrivée, la femme doit prendre une douche et mettre un uniforme spécial avant d’aller en salle d’accouchement. Une odeur d’eau de Javel vous accueille dans la salle d’accouchement. Hadidja Mouigni, Batsa-ya-Itsandra, a accouché la veille au matin. Lors de notre passage, elle occupait l’un des trois lits d’accouchement du service de maternité. Chaque lit est équipé d’un monitoring pour vérifier l’évolution de l’état de santé du nouveau-né. Depuis son arrivée, on ne lui a rien demandé. Le personnel s’occupe d’elle et du bébé : «on n’a rien acheté, pas même les couches. Je dois régler la facture avant de partir», constate-t-elle.

Les yeux rivés sur un appareil de contrôle, Indata Hadji Seha, la majore principale de la maternité qui s’est fait un plaisir de nous servir de guide, explique : «Les battements du cœur du bébé doivent être de 120 à 160 par minute. S’ils sont supérieurs à 160, là le bébé est tachycardie, à moins de 120, il est bradycardie».
Le bâtiment, dont la construction a été financée par la Banque islamique de développement (Bid), dispose de trois lits d’accouchement avec une capacité d’accueil de dix pour quatre à sept accouchements quotidiennement.

Ce nombre de lits est inférieur à la demande. «L’ancienne maternité avec ses six lits d’accouchement pour une capacité d’accueil de quarante neuf, ne faisait déjà pas l’affaire, alors…», raisonne la majore. C’est pour cela qu’on a preferé  garder l’ancien bâtiment vétuste où on accouchait avant que le nouveau ne soit disponible. «Ce bâtiment sert de service d’accueil, d’orientation, de triage, de transfert mais aussi d’hospitalisation pour les personnes opérées, du fait de sa proximité avec le service de réanimation». En cas de nécessité d’évacuation, on achemine la patiente par une porte discrète vers le service de réanimation.

Un avant et un après

Aucune visite n’est autorisée dans les salles. La nourriture et les soins sont assurés par le personnel, ce qui explique le calme qui règne dans ce service. «C’est une prise en charge totale, le personnel s’occupe de la nourriture, de changer les couches et du nettoyage». Ramla Ibrahim a accouché mardi dernier. Pour avoir déjà accouché une première fois il y a quatre ans à El-Maarouf, elle peut se permettre de faire la comparaison. «J’étais assise sur un lit dépourvu de matelas des heures durant avant qu’on me transfère, le lendemain, dans une chambre où il n’y avait même pas de toilettes. Aujourd’hui c’est tout à fait différent. Je suis prise en charge et suivie de près, ma chambre est climatisée et je dois payer 35.000fc avant de partir», témoigne-t-elle. Le bloc technique dispose d’une capacité d’accueil de dix lits et l’ancien de onze lits qui accueillent les personnes qui ont été opérés, et les pathologies liées à la grossesse. Ce mois de janvier 2017, il y a eu cent cinquante huit accouchements dont quarante césariennes.

«Nous avons eu à déplorer un seul décès. Celui d’une adolescente de 16 ans qui était à son premier accouchement et qui a été transférée ici par une clinique privée  après avoir été opérée. Après une petite enquête j’ai appris qu’elle avait ingurgité une tisane à base de je-ne-sais-quoi. Ce sont là des choses qu’ici nous déconseillons vivement», déclare la sage-femme entre la signature d’un papier que lui tend une collègue, des indications prodiguées à une autre ou encore des explications à ce nouveau papa qui déclare ne pas avoir sur lui les mille francs qu’il faut pour payer le dossier médical «pour n’avoir pas été avisé à l’avance». Depuis son inauguration, le 23 novembre 2016, la maternité comptabilise trois cent accouchements.
 
Les moyens du bord

Les difficultés que le service rencontre restent au niveau du paiement. Certaines personnes traineraient les pieds pour honorer leurs factures. Une femme a accouché depuis le 25 janvier dernier, elle se trouve maintenant au service néonatologie car le bébé a un problème, mais elle n’a toujours pas réglé ses factures ici. «D’autres cas similaires sont constatés et cela peut freiner notre élan», lance une sage-femme, comme pour tirer la sonnette d’alarme. Une autre rappelle l’insuffisance de techniciens de surface et d’aides-soignantes.

L’autre difficulté est liée, justement, à un déficit de personnels des deux côtés. Les quatre équipes de garde et les deux de la matinée, se révèlent insuffisantes. La majore principale estime que ce nouveau bloc est une aubaine qui permet de faciliter la vie aussi bien de la patiente que de celle des personnels, malgré la distance qui le sépare des autres services. «Nous devons garder la femme dans l’autre bâtiment vétuste jusqu’au moment de l’accouchement car autrement, nous ne pourrions pas gérer vu le nombre réduit de lits», regrette le major.

Le service fonctionne avec six médecins, dont quatre gynécologues. Chacun assure une semaine de garde, pendant que les cadres du service supervisent les sages-femmes, coordonnent et collectent les données sur … du papier volant ou, au mieux, sur un simple cahier d’écolier. Inutile de préciser qu’aussi accueillant qu’il soit, le nouveau bloc, comme d’ailleurs le reste des services du Chn, ne dispose pas d’outil informatique pour stocker les données. Tout est couché sur du papier. Les naissances comme les Cpn gynéco, la planification familiale comme la vaccination.

Feuilles volantes

Une autre difficulté, et pas la moindre, c’est le manque de formation continue du personnel. Dans ce contexte, la majore a aménagé une bibliothèque dans laquelle sont exposés des documents manuscrits, et des brochures,  histoire de tenter de palier quelque peu à ce manque d’une formation pourtant indispensable si on veut vraiment pouvoir proposer des soins de qualité. Au fond d’un couloir, on peut voir une table sur laquelle sont déposés des documents, ou encore des classeurs de diverses couleurs – grises, violettes ou bleues – dans lesquels sont consignés l’emploi du temps et les activités du personnel, les conditions de travail des aides-soignantes, etc.
Enfin, la majore a demandé qu’on mette à leur disposition des uniformes et des badges d’identification, surtout que pour entrer au bloc, il faut un uniforme spécial. Mais, là encore, il faudra repasser. Un peu comme pour dire, à l’instar de l’adage, «on ne peut pas tout avoir »…

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