Pour cette nouvelle édition du Festival du film européen, les organisateurs ont initié une table ronde portant sur le circuit du cinéma. Le Master class qui s’est tenu vendredi 9 mai à l’Alliance française de Moroni, a réuni des acteurs du film comorien pour des échanges qui ont abouti à plusieurs solutions pour le développement de cet art.
Les échanges animés par le malgache Ramanamisata Ndrenjason Alain et Saïd Ali, se sont concentrés sur comment les îles Comores pouvaient s’ouvrir un chemin dans l’industrie cinématographique de la région et du monde, notamment pour ce qui est du financement.
Pour Saïd Ali, il faut penser à un model cinématographique typiquement comorien : «L’industrie cinématographique n’existe quasiment pas et, donc, se comparer aux autres îles de la région, serait brûler des étapes», a-t-il soutenu. Bien que la première édition du Festival international du film comorien (Ciff) tenue en 2012 avait rassemblé des professionnels venus du Canada, de l’Inde, de l’Egypte, de la France et de l’Océan indien pour se questionner sur la capacité des Comores à afficher leur présence dans l’écran du monde, les choses semblent presque au point mort.
Aujourd’hui encore, durant cette table ronde, on a encore parlé de difficultés d’écriture cinématographique bien que les ateliers d’écriture, tenus lors de la première édition Ciff, ont contribué à faire naître à l’édition de 2015 plusieurs jeunes réalisateurs à l’image de Laïla Abdou Tadjiri avec L’Encre de la mer ou Mahmoud Ibrahim avec Escale à Pajol. En court-métrage, il y avait aussi Zainou El Abidine, Wonssia Issouffou et Asma Binti. Treize ans après la création du Ciff qui a été vue comme une aubaine pour le cinéma comorien, l’expression cinématographe continue à se chercher.
«Essayer de redynamiser»
Cette table ronde a été l’occasion pour le réalisateur, Ramanamisata Ndrenjason Alain, de monter quelques pistes de financement de film, de parler de création, réalisation, production, diffusion, distribution et toutes autres formes de commercialisation d’œuvres cinématographiques. «Je vais partager avec vous les circuits par lesquels il faut passer pour pouvoir financer vos films. Je suis ravi de constater que cet après-midi, nous avons eu un débat constructif avec des échanges d’expérience. Nous sommes là pour essayer de redynamiser l’élan du film comorien», a soutenu le réalisateur malgache.
La table ronde ne pouvait pas prendre fin sans soulever la question du manque de salle de cinéma et de public en terre comorienne. L’artiste, Fouad Salim, propose de relancer son expérience de projection de film au Ccac-Mavuna. De même, le réalisateur Farouk Djamily a fait part du souhait du Centre d’animation socioculturel de Mtsangani à Moroni d’accueilli des projections dans le but, notamment, «de faire découvrir au grand public, la réalisation des cinéastes de la place».
De nombreuses interrogations
Il est regrettable de constater aujourd’hui encore que la diffusion de cinéma dans la capitale comorienne n’est qu’un lointain souvenir. Les cinéphiles se remémorent encore des salles de cinéma des années 1960 notamment Al Camar à Ngazidja, Al Qitwari à Ndzuani et Al Pajo à Mayotte. A ce propos, un des participants à la table ronde a révélé qu’il s’était approché d’un des propriétaires d’Al Camar pour voir comment relancer le cinéma dans cette salle mythique de la capitale mais ce dernier lui a fait savoir qu’il avait l’intention de le faire lui-même.
En 2017, le président-directeur général de cette société, Saïd Tourqui Saïd Abdallah, avait annoncé un projet de rénovation de cette salle, estimé alors à 90 millions de francs comoriens : «J’ai eu plusieurs demandes, en tant qu’actionnaire et directeur, pour la relance du cinéma. On y a beaucoup pensé et on a monté ce projet qui va nous permettre de remettre le cinéma sur le rail. Il faudra d’autres sièges adaptés au design qu’il faut, mais également de nouveaux appareils, avec la vidéo numérique professionnelle et des projecteurs spécialisés pour les salles de cinéma afin d’avoir les mêmes effets que le cinéma traditionnel avec des coûts conséquents», avait fait savoir Saïd Tourqui Saïd Abdallah, il y a six ans déjà.
Après la table ronde du 9 mai, qui s’est avéré plutôt constructive, d’autres réunions ont été programmées par les participants pour essayer de mettre en pratique leurs solutions notamment celle d’ouvrir une chaine Youtube visant à diffuser les films comoriens. «Nous sommes confrontés à de multiples problèmes d’ordre financier. Comment constituer un dossier de financement ou encore la note de production et de réalisation. Personnellement, j’aimerais aller au stade de développement. Comment monter un dossier solide ?», s’est interrogé FarouK Djamily.