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Comores comedy club. Épisode 8 : «Les Comores n’ont pas de talent»?

Comores comedy club. Épisode 8 : «Les Comores n’ont pas de talent»?

Culture | -   Maoulida Mbaé

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Ne vous laissez surtout pas flouer par l’intitulé, tous sauf évocateur, de leur soi-disant émission radiotélévisée : «Les Comores n’ont pas de talent». Ces jeunes ont de l’humour, et à en revendre… Encore une fois, le public qui a répondu présent, a été conquis, malgré «les trucs bizarres» (Fouad Salim) qui ont court au pays en ce moment.

 

Pour sa huitième sortie, vendredi 17 août dernier, à l’Alliance française de Moroni (Afm), Comores comedy club (Ccc) n’a pas fait dans le faste. Deux portières – jaune et rouge – de voitures, une table, deux chaises, un duo de jury «tout ce qu’il y a de plus douteux», un animateur tiré à quatre épingles mais «complètement à l’ouest»… et le décor était planté. «Les pires comédiens, les pires artistes que les Comores aient jamais connu» pouvaient se livrer à leurs fantasmagories. Comme, par exemple, croquer une pomme pour concevoir «un Iphone 6», s’adonner à des calculs mathématiques on ne peut plus oiseux ou encore interpréter, tout en dérision, un coupé-décalé sans queue ni tête. «Un manque de talent remarquable !»


Inutile de vous dire qu’aucun des candidats n’est sorti victorieux de cette gaguère, tellement ils ont rivalisé en médiocrités. Du moins, à en croire les appréciations du «jury». Le public n’en dirait pas autant, lui qui ne s’est pas économisé en rires. A raison. Et ce, même quand il est pris pour cible, par un prétendu «docteur en psychologie de la beauté», pour sa «mocheté» : en «Mochtralie», la devise c’est «unité, solidarité, mocheté». Après tout, «c’est un sketch». Autant, donc, ne pas s’imposer de barrière. Briser la glace, pour ainsi dire. Tous les sujets d’actualité, aussi délicats soient-ils, y passeront pêle-mêle.

Ah, notre beau pays…

«Bienvenue aux Comores, le seul pays au monde où tu peux quitter l’école à la maternelle et être premier ministre», lance Imam à l’adresse des étrangers dans la salle. Et quand il s’agit de présenter les îles Comores, les Comoriens en général, ils ne sont pas moins… époustouflants on va dire. C’est ainsi qu’il parait qu’«à Mohéli, en athlétisme, si on fait le 100 mètres on sort de l’île». Une de ces blagues, si l’on en croit Fahad, que n’apprécient que les Grands-comoriens «parce que nous les Grands-comoriens on aime trop se moquer de nos frères. Alors qu’on n’a rien, qu’on ne sait rien, on corrige tout, on n’a rien on se vend partout». L’humoriste a, par contre, «une grande admiration» pour les Anjouanais car «ils sont travailleurs, surtout que sans eux je n’aurais pas de taxi». Le seul problème, soulève-t-il, c’est qu’ils sont «radins» : «Je ne sais pas si vous avez entendu l’histoire d’un grand commerçant anjouanais, d’ailleurs c’était le plus riche de l’île, qui est mort à cause de la tuberculose alors que le traitement était gratuit».


Dans cette autodérision, le Ccc s’en est pris à ces «Je reste» qui se métamorphosent en «Je viens» le temps des vacances d’été, et à ces bacheliers qui transforment Facebook en «laboratoire de la langue française». Avec, au passage, une «matio» (mention) spéciale cernée à Mze Hamadi Faidat (16 ans) et Adamo (60 ans), respectivement benjamine et «doyen» des bacheliers 2018.

L’actualité politique n’est pas en reste, passée au crible. La tournante, ou «tourmente» si vous préférez, la tentative d’attentat à la «bombe aux clous» à l’aéroport de Bandarsalam, le référendum du 30 juillet dernier, entre autres. «J’adore ce pays, c’est un pays génial, un pays plein d’amour, où il n’y a presque plus de guerre… même s’il y a eu quelques tentatives de déstabilisation de la part de certains individus», lance Imam sur un ton quelque peu hautain provoquant l’ire du public. De quoi, sans doute, dédramatiser un peu la situation. Le tout, en chant et en danses.

Ouverture d’esprit

C’est ce qu’a apprécié Rouaida Aboubacar, en Terminale C au Groupe scolaire fundi Abdoulhamid (Gsfa) : «C’était trop bien cette fois-ci, vu qu’il y avait une chorégraphie de danse, l’on ne s’y attendait pas. Une véritable surprise. Ils nous impressionnent chaque année», a-t-elle laissé entendre à la fin de la soirée, visiblement charmée par la chorégraphie des invités du jour, Yougo et Zix, les «djosho breakeurs». Ismael Soidik, qui travaille dans le bâtiment, a, lui, mis en avant cette façon originale d’aborder, avec humour, des thématiques ayant trait à la vie politique du pays. «Les gens évoluent, ils ont une certaine ouverture d’esprit, grâce justement à ce genre d’activités», a-t-il fait valoir. Quant à la crainte de Fouad Salim, leader du Comores comedy club, elle s’est envolée en cours de soirée. Le public a bien répondu présent, malgré «les trucs bizarres» qui se passent dans le pays. Un huitième épisode du Ccc, donc, «bien glacé» comme dit le célèbre cri de scène du groupe.
Dans tous les cas, pari gagné !

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