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Danse urbaine et contemporaine I Quand un épiphénomène éclot !

Danse urbaine et contemporaine I Quand un épiphénomène éclot !

Culture | -

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Pendant longtemps, les danseurs comoriens ont dû batailler pour se faire un nom dans leur propre pays. Malgré les préjugés sociaux et la méfiance des proches, ils sont arrivés à faire connaitre la danse urbaine et contemporaine même au-delà des frontières. Même si tout n’est pas aussi rose qu’ils le souhaiteraient.


La danse urbaine et contemporaine, à l’instar d’autres expressions artistiques, est loin d’être populaire aux Comores. Pour se frayer un chemin, certains acteurs se sont trouvés, souvent, dans l’obligation de faire face aux préjugés et parfois même à l’hostilité de certains proches dans le milieu familial.Pour le chorégraphe de la compagnie Tche-za, cela n’a pas été du tout facile. Selon lui, jusqu’à la fin des années 1997, les opinions sur la danse divergeaient entre ceux dont cette nouvelle tendance éveillait la curiosité, ceux qui l’ont soutenu et, croit savoir Salim Mze Hamadi, la majorité qui la rejetait catégoriquement. Dans un pays dépourvu d’écoles de danse et à une époque où l’accès à internet était quasi inexistant, ce n’était pas évident de pratiquer la danse surtout en matière de créativité.

“A l’époque quand un “Je viens” atterrissait au pays, nous ne le laissions pas profiter de ses vacances. Nous le prenions en aparté pour nous apprendre quelques pas de danse. C’est surtout en visionnant des Dvd que nous avons pu améliorer nos techniques. Nous étions nuls en matière de création, nous ne faisions que du copier-coller”, se rappelle encore Salim Mze Hamadi. C’était la naissance d’une nouvelle tendance et, heureusement, des Comoriens se sont montrés curieux de découvrir le Hip-hop ce qui a permis de remplir des salles. “Certains nous prenaient pour des fous, d’autres pour des magiciens pendant que d’autres encore nous adulaient”. Dans tous les cas, ce fut, à l’en croire, “une expérience très enrichissante”.

Avancées là-bas, surplace ici…

Vers 2010, la danse a commencé quelque peu à se frayer son chemin à travers les préjugés négatifs, ancrés dans la culture et la tradition. La créativité de la compagnie Tche-za et la Cie Uni’Son ont servi à maintenir la flamme. Après avoir installé l’art du Krumpeur en Afrique de l’Ouest, Salim Mzé Hamadi Moissi alias Seush est retourné au bercail et a créé, en 2014, la compagnie Tché-za grâce à laquelle la danse comorienne est partie à l’assaut de la région et du monde. Six ans plutard, Seush parviendra à faire parler de lui dans certains grands médias du monde notamment au quotidien français, Le Monde, Rfi, Tv5 Monde ou encore le Financial times de Londres, entre autres.
“Au niveau national, mes objectifs sont loin d’être atteints étant donné que la danse n’est toujours pas aussi bien accueillie que je l’aurai souhaité. Ainsi, malgré les efforts inlassables de Tche-za pour faire rayonner les Comores à travers la danse, il n’est pas toujours reconnu à sa juste valeur”, regrette le chorégraphe.

 

La compagnie Tche-za demeurre, de loin, la troupe qui représente régulièrement les Comores à l’étranger. D’un festival à un autre, elle passe et repasse en laissant surtout ses traces. Du Festival Suresnes au Marché des Arts du spectacle d’Abidjan (Masa) en passant par l’Institut du monde Arabe au Festival Chainon Maquant à Paris, Sangoku, Chien de Guerre, Kris et Lkp n’ont de cesse de fait briller les Iles de la Lune. Selon Salim Mzé Hamadi Moissi, cela n’a pas été un choix facile pour lui de laisser la gloire qu’il avait au Sénégal pour venir développer cette pratique dans son pays.Mais, il se dit “fier” de voir qu’à travers la danse il contribue, même modestement, à lutter contre le chômage qui gangrène le pays “en engageant plusieurs danseurs”. La compagnie Uni’Son apporte elle aussi sa pierre au développement de la danse Urbaine et contemporaine. Avec la création Dur d’y croire, les protégés d’Akeem alias Washko ont remporté le prix spécial du jury au Festival Passes portes à Maurice.

Révolution

Depuis sa création en 2011, le Battle “Ye mze ndo” (Qui le meilleur ?) a profondément révolutionné la danse aux Comores. Du niveau local au national puis à l’international, ce Battle très apprécié par les danseurs locaux ne cesse d’évoluer et de promouvoir de nouvelles figures. Ses champions arrivent, désormais, à se confronter souvent avec bonheur avec des concurrents de l’Océan indien, voire même d’Afrique du sud. C’est ainsi qu’en juillet dernier, Haitham Ben Ali est sorti vice-champion de l’Océan Indien dans la catégorie Afro du Battle “Wake up on line session”. Entretemps Sangoku devait se hisser en finale dans ce même événement dans le monde du B-Boying.
“Je suis très heureux d’avoir pu aller jusqu’en finale. J’espère que je n’ai pas déçu les Comores et surtout ceux qui m’ont soutenu depuis mes premiers pas de danse. Ça n’a pas été facile de porter le poids de tout un pays. Je vais continuer à travailler beaucoup plus et espéré que la prochaine soit la bonne”, se réjouissait à ce propos, récemment B-Boy Sangoku dans ces mêmes colonnes.

“Vivement, une école de danse !”

Pour le vice-champion de la danse Afro dans l’Océan indien, Haitham Ben Ali, ce qui retarde le décollage de la danse aux Comores, c’est le manque d’infrastructures et surtout l’absence d’une école de danse. Il estime qu’avec un tel outil, les danseurs comoriens pourraient conquérir le monde du sixième Art. “Ye mze ndo” a dopé la sphère de la danse dans le pays. A travers lui, beaucoup de danseurs se sont démarqués et arrivent à se frayer un chemin tant au niveau national qu’international”.
Il est vrai que la dernière édition a fait drainer vers la place de l’indépendance pas loin de trois mille spectateurs. “Un succès fou”, devait conclure Seush.

Mahdawi Ben Ali

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