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Débat sur la création artistique : des échanges plutôt houleux

Débat sur la création artistique : des échanges plutôt houleux

Culture | -   Dayar Salim Darkaoui

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Les relations entre les artistes et la direction de la Culture ont rarement étaient au beau fixe. On en a eu une démonstration magistrale, hier jeudi, au Cndrs, lors de la conférence “Etat et perspectives de la création artistique aux Comores” organisée dans le cadre du lancement de la deuxième édition du Festival de danses contemporaines, Ntso uzine. Ce qui devait être une table ronde s’est transformée en procès contre la direction nationale de la Culture.

 

On savait les rapports entre les artistes et la direction de la Culture assez tendus. La preuve hier jeudi, 1er novembre, au Centre national de documentation et de recherches scientifiques (Cndrs), à l’occasion du lancement de la deuxième édition du Festival de danses contemporaines Ntso uzine. Ce qui devait être une table ronde sur l’état et les perspectives de la création artistique aux Comores s’est transformée en procès sinon en règlement de comptes. Tellement les échanges ont été houleux.

“Dialogues entre nous,et entre nous et eux”

Il faut dire que les artistes n’ont pas manqué, devant la directrice de la culture, Wahida Hassane, de faire part de leur ressentiment. Mais il fallait bien mettre les choses au clair avant, on l’espère, de prendre un nouveau départ. Ce genre d’échanges est, en effet, assez rares pour laisser passer l’occasion de se dire, les yeux dans les yeux, toutes les “frustrations que chacun enfouie en lui”. C’est le rappeur Cheikh Mc, que l’on sait très critique, qui s’est lancé en premier dans le bain, fustigeant le “manque de structures administratives aptes à accompagner les artistes dans leurs projets”. Si les artistes ont toujours su jusqu’ici s’autofinancer pour produire leurs œuvres, «il arrive un moment où c’est très compliqué. Ce qui manque ce sont des administrateurs derrière, spécialement formés pour nous encadrer», explique-t-il.


“Il est clair”, fait remarquer la slameuse, Intissam Dahilou, qu’il y a une «coupure» entre les artistes et les autorités. Elle sollicite l’”établissement d’un dialogue”. Mais un dialogue, d’abord, entre artistes. Le chorégraphe de la compagnie Uni’son, Akeem alias Washko, abondera dans le même sens. «Je sens qu’il y a déjà un problème entre les artistes. Le mieux serait que nous nous réunissions, en tant qu’artistes, et réfléchissions à des moyens d’améliorer le quotidien de l’artiste comorien», réagit-il. Ce dialogue est d’autant plus important, devait souligner le plasticien et cinéaste, Zain El Abidine Picasso, qu’«il n’existe aucune structure dédiée aux artistes aux Comores». Par la suite, établir un dialogue avec les autorités concernant des questions essentielles relatives aux projets de loi et la ligne budgétaire. Pour le musicien Abdallah Chihabidine, le grand handicap reste justement l’absence de politique culturelle : «il faut initier un dialogue avec les autorités pour définir les priorités en matière de soutien à la création artistique».

Vous avez dit budget?

Sur ce point, Seush de la compagnie Tché-za, également directeur artistique du festival Ntso uzine, reprochera aux autorités de ne financer que les festivals au détriment de la création artistique. Or, dit-il, «il ne peut y avoir de festival sans la création artistique».Toutes ces critiques soulignent à quel point la directrice de la culture, Wahida Hassane, a passé une matinée agitée au Cndrs. A l’en croire pourtant, la direction de la culture ne bénéficierait pas de l’appui approprié, coincée dans un ministère repartie entre la jeunesse, l’emploi, l’insertion professionnelle et les sports. «Je ne suis pas le décideur du ministère de la culture, je ne fais que des propositions», se défend-elle. Le budget alloué à la culture, la jeunesse et les sports (ensemble) s’élèverait, en 2018, à 187.000.000 de francs comoriens, le trimestre. Et la grande partie de cette somme irait aux sports : 106.000.000 et 56.000.000 pour les deux matchs, aller et retour, contre le Maroc. «La direction de la culture ne dispose pas d’un budget de fonctionnement» en tant que tel, encore moins de ressources humaines.


En matière de perspectives, l’ambassadeur Soilihi évoquera la nécessité de professionnaliser le métier, de batailler pour avoir un budget dédié à la culture et se doter des structures nécessaires parce que «sans structures il ne peut y avoir de budget de fonctionnement». Le directeur général du Cndrs, Abdallah Nouroudine, proposera, lui, de se donner un cap en ce qui concerne les arts et la culture, trouver les moyens institutionnellement de donner une meilleur visibilité aux initiatives de création pour se hisser à la hauteur des artistes et identifier les intérêts commun entre artistes et autorités pour mener une vie commune.



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