La Compagnie Nombaba théâtre a remporté la finale du concours de théâtre tenu le samedi 26 juillet à l’Alliance française de Moroni. L’évènement a été initié par le réseau des Alliances françaises aux Comores dans le cadre de la première édition du Festival des arts de la rue prévu en septembre prochain. La troupe de Singani s’est imposée devant Simimy studio d’Ikoni et Mwana de Nstaweni, respectivement, deuxième et troisième.Pour prendre le dessus Nombaba théâtre a présenté la pièce «Une vie envolée», écrite et mise en scène par le journaliste, Mahdawi Ben Ali. Le spectacle aborde la question des avortements clandestins qui entraine trop souvent des pertes de vie.
«Une société qui juge»
«Une vie envolée» met en scène deux adolescents follement amoureux, Fatima et Ibrahim. Ce dernier décide de donner des pilules abortives à sa copine qui… perdit la vie.«Je ne voulais pas ça, je te jure…Je ne voulais pas que ça se termine comme ça. C’était juste... trop. Trop de peur, trop de pression. Je n’étais pas prêt…Une petite pilule et tout s’arrête. Non…Non... Reviens, je t’en supplie, ne me laisse pas seul. Je vais pas supporter... Pardonne-moi! Pardon d’avoir voulu fuir, d’avoir eu plus peur des regards des gens que de te perdre, toi», regrette Ibrahim, en larmes, tenant le corps sans vie de Fatima.
Ce spectacle pleines d’émotions interroge, conseille et, surtout, met en lumière un phénomène désormais répandu : «L’avortement clandestin est le reflet d’une société qui juge au lieu d’aider, qui ferme les yeux là où elle devrait ouvrir les bras. Il est la conséquence directe de l’ignorance, du tabou, de l’absence de structures adaptées et de l’inaccessibilité des soins», souligne un monologue poignant de la pièce. Et de rajouter qu’il faudrait une éducation sexuelle réelle, un accès libre et sécurisé aux soins, un encadrement bienveillant.
«Demain, il faudra écouter, comprendre, soutenir. Pour que plus aucune femme ne risque sa vie car chaque vie compte, y compris celle de celles qu’on oublie trop souvent dans l’ombre des statistiques : femmes seules, pauvres, jeunes, exclues. Que demain soit un jour où l’on choisit la dignité plutôt que la clandestinité», enchaîne l’acteur Mohamed Balkiss dans le rôle du médecin.
Après la mort de sa copine, Ibrahim perd la tête et arpente les rues à la recherche de Fatima. «Fatima…Non…, t’es pas là hein? T’es plus là. Tu m’en veux? Hein? T’as mal? Moi aussi j’ai mal ! Je ne dors pas, je respire plus! Ce n’était pas ma faute! C’était la faute de la vie! De la misère! Des autres! Des regards! Des rumeurs! Des foutus rumeurs!», lance un Ibrhaim dans un état lamentable en s’adressant à lui-même. Puis, au public, il crie : «Vous êtes qui? Hein? Des juges ? Des démons? Des saints? Vous me regardez comme si j’avais tué le monde! Mais c’est lui qui m’a tué. Fatima… reviens… je te jure, cette fois, je garde tout. Toi, l’enfant, le silence, la honte aussi, s’il le faut. Arrêtez de parler dans ma tête! Je veux plus de vos voix», hurle-t-il.
«Le théâtre comorien a gagné»
Peu après le spectacle, son metteur en scène, Mahdawi Ben Ali, a rappelé que ce spectacle était toujours en phase de création. «Dans cette finale, nous avons présenté, juste, une partie de la pièce dans le mesure où chaque troupe disposait de trente minutes au maximum. Nous allons le retravailler et nous espérons pouvoir le présenter en totalité lors du Festival des arts de la rue des Comores où les lauréats disposeront chacun de plus d’une heure de spectacle. Je suis heureux pour les jeunes comédiens qui ont su donner le meilleur d’eux-mêmes. J’espère que ce trophée va les inciter à se donner encore plus», devait-il conclure.Pour sa part, le meilleur comédien de la soirée, Ben Houwayad Ibrahim, a soutenu que cette victoire était celle de toutes les troupes qui avaient pris part au concours : «C’est le théâtre comorien qui gagne».