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Obsessions de lune-Idumbio IV I Hommage rendu aux morts du Visa Balladur

Obsessions de lune-Idumbio IV I Hommage rendu aux morts du Visa Balladur

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Après Un dhikri pour nos morts la rage entre les dents, Prix des lycéens, apprentis et stagiaires d’Ile de France en 2014, le poète dramaturge Soeuf Elbadawi poursuit sa lancée sur l’occupation française de l’île comorienne de Mayotte. Obsessions de lune/Idumbio IV, son dernier opus, questionne le silence orchestré autour de la tragédie du Visa Balladur.

 

Paru aux éditions Bilk & Soul, Obsessions de lune/ Idumbio IV, le dernier livre de l’auteur comorien, Soeuf Elbadawi, opère une énième sortie sur la question du mur Balladur. Cela fait vingt-cinq ans, un quart de siècle, que des milliers d’innocents meurent dans le bras de mer séparant les deux îles comoriennes de Ndzuani et Mayotte. Leur crime étant de chercher à circuler librement dans leur pays. Il en est qui parlent, à ce propos, désormais du “plus grand cimetière marin” de l’Océan indien. “Il n’est pas normal que l’on devienne clandestin en son propre pays”, clame l’auteur.


En dépit de la vingtaine de résolutions de l’Onu, la question de Mayotte est au point mort parfois même au sein de l’Etat comorien. La France continue à bafouer le droit international et on a l’impression que la communauté internationale n’a aucune prise sur elle, alors même qu’elle continue à condamner sa présence dans l’île.


“Il est faux de penser que la communauté internationale n’a aucune espèce d’emprise sur nos réalités. Elle pourrait changer le cours des choses, si elle le souhaitait. Je préfère penser qu’elle choisit son camp, la plupart du temps. Nous ne faisons pas partie de “l’agenda”. Peut-être parce que nous n’avons pas trouvé l’art et la manière de nous faire entendre à la grande table des décideurs de ce monde”, estime Soeuf Elbadawi.


Pendant que le Visa Balladur continue de tuer en masse, le discours des autorités comoriennes a du mal à lui opposer une réponse conséquente et, avec le temps, on finit par s’interroger sur l’impact réel des résolutions de l’Onu. Même si l’ancien vice-président Idi Nadhoim, cité dans le livre, déclare que le mur érigé entre Ndzuani et Mayotte tombera comme est tombé celui de Berlin, par moments, la bataille semble perdue et le retour de l’île dans son giron naturel paraît utopique.


“L’utopie n’est pas forcément une chimère. Cela dépend du sens que l’on donne au mot. Il est clair que la partie comorienne s’est endormie trop longtemps sur ces questions. Mais la messe n’a pas encore été dite. Nous sommes à 10.000 kilomètres de Paris, et je n’aime pas l’idée d’un échec sur nos existences. A défaut de savoir défendre ce pays, je peux au moins dire que ce qui nous arrive n’a rien de normal. C’est ainsi que je travaille avec d’autres à nourrir des actions allant dans le sens d’une meilleure lisibilité de la question. L’écriture fait partie de ce travail”, résume Elbadawi.


Sur le ton de l’indignation, l’auteur tente de comprendre le silence entretenu autour de la question. “Le silence est une gymnastique de maître. Les dominants excellent beaucoup en cette matière. Ils font en sorte de nous rendre inaudibles aux yeux du monde. A force, cette tragédie finit par ne plus être entendue par les Comoriens eux-mêmes”, craint l’écrivain.


La tragédie du Visa Balladur est, de loin, la plus graves de toutes les tragédies vécues aux Comores. Il revient aux Comoriens de savoir défendre leurs intérêts, ce qui ne semble pas toujours être le cas. On ne peut nier, en effet, que ce sont les autorités comoriennes successives qui ont créé cet état de fait qui, avec le temps, crée la confusion et rend leur parole inaudible.

Mahdawi Ben Ali

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