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Recrudescence des célébrations du «Grand mariage» I Une invitation à parler de la «diaspora»

Recrudescence des célébrations du «Grand mariage» I Une invitation à parler de la «diaspora»

Culture | -   Housni Hassani

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Cette année, le nombre de célébrations du ndola ya anda a explosé. Certains y voient là, une main indéniable des Comoriens installés à l’étranger, en France essentiellement. D’éminents chercheurs se sont réunis autour de la même table pour réfléchir sur les «enjeux et les défis» de cette diaspora. Sans avoir vraiment tiré de réelles conclusions, ils se sont accordés sur une chose : supprimer le Grand mariage reviendrait à «porter un coup à notre identité».

 

Le débat autour du Ndola ya Anda («grand mariage» ou encore «mariage traditionnel») n’a jamais été aussi animé que pendant cette période. Et pour cause, il ne fait aucun doute que les célébrations de cet acte traditionnel et culturel, très prisé sur l’île de Ngazidja, n’ont jamais été aussi nombreuses. Du madjilisi au mtriyodahoni en passant par les ukumbi et autres mtwalaan, pas un jour ne passe sans festivités.


Dans de grosses agglomérations comme Mitsamihuli, on a pu compter, durant cette période de juillet et août, jusqu’à soixante-dix célébrations, ou encore une quarantaine à Ntsudjini. Les grands festins qui, dans de nombreux villes et villages, accompagnent ces célébrations, et ostentatoirement étalés sur les réseaux sociaux, suscitent des réactions pas toujours favorables, parfois même d’indignation, compte tenu de la crise alimentaire sans précèdent qui sévit dans le pays et qui, si l’on en croit certaines prévisions, pourrait s’intensifier en septembre.


C’est dans ces circonstances que le Centre national de documentation et de recherche scientifique(Cndrs), a organisé, hier, une conférence portant sur la thématique «Diaspora et mariage traditionnel : enjeux et défis». D’éminents historiens, anthropologiques, littéraires, religieux et linguistiques y avaient pris part.
Ce que l’on a remarqué dans ce débat animé par l’écrivain Aboubacar Saïd Salim, c’est que les conférenciers n’ont pas pu se départager sur les «réels» enjeux et «défis» de la diaspora.


Le débat a nettement pris une trajectoire différente de celle initialement prévue. Pour le Dr Abdérémane Wadjih, il serait primordial de s’interroger sur la perception même du mot «diaspora». Une appellation qui, à l’en croire, n’existait pas il y a trois décennies. «Avant, on appelait «m’manga» (= celui qui revient de voyage à l’étranger), ou qui vivait au «manga» (à l’extérieur du pays en swahili). Le problème se pose également avec le sens du mot «Umanga» qui, autrefois, signifiait civilisation ou intelligence. Aujourd’hui, le mot a pris une connotation plutôt négative. La connaissance, le savoir sont devenues des insultes», déplore l’anthropologue.

Entre anda et mila

Dans son intervention, le Dr Moussa Saïd Ahmed a jugé utile de lever le voile sur anda et du mila. A l’en croire, le premier concept concernerait les hommes, tandis que le second relèverait du «pouvoir de Dieu». «Aux Comores, on compte cinq sortes de mila, des créations devines auxquelles l’homme n’a pas participé et qui sont «le territoire, les humains, les hinya, la langue et le mariage».

Ce dernier aurait, par la suite, donné naissance à beaucoup de anda, ce qui a conduit le professeur à situer les origines du grand mariage. «A la base, le grand mariage était une affaire de hirimu za nkodo. Il fallait être capable de manger beaucoup et être très fort physiquement puisqu’à l’époque des guerres entre régions, les plus robustes étaient convoités pour présenter leurs régions «, a soutenu Moussa Saïd.Pour sa part, le Dr Kassim Mohamed-Soyir Bajrafil a tenu à rappeler que «le mila relève également d’habitudes devenues des codes, pas forcément divines».Par ailleurs, les deux hommes s’accordent sur un même point : «il n’est pas question de supprimer le grand mariage» car on s’exposerait ainsi à la suppression de «notre identité»

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