Comment définiriez-vous le slam?
A mon sens, il s’agit d’un claquement de mots oraux rythmés qui servent à exprimer nos sentiments et nos pensées face à un public. Pour moi, c’est un instrument comme le piano, la guitare ou le chant. C’est surtout un espace d’expression qui valorise la liberté d’expression, un de mes grands combats.
Pourquoi le choix d’un Ep?
Parce qu’il le fallait. Parce qu’en tant qu’artiste, il fallait bien que je fasse mon devoir de dire les choses telles que je les vois. Celui de parler au nom des miens mais aussi d’exprimer mes opinions. Le choix d’un l’Ep c’est pour prendre mes responsabilités. C’est une sonnette d’alarme dans mon engagement dans l’art, c’est aussi pour véhiculer les positions qui sont les miennes en tant qu’artiste. Cet Ep constitue un premier dans mon combat pour la paix, la justice et l’équité.
Pourquoi “Tabiri”* comme titre?
J’ai choisi ce titre parce que mon projet s’adresse aux Comoriens et parce que je suis une Comorienne qui tient à valoriser sa langue. Mais “Tabiri” aussi car mes cinq oeuvres parlent d’espoir et de désespoir en même temps. Je suis dans ce rêve de vouloir faire les choses, malgré tout et aller de l’avant.
En tant que femme, rencontrez-vous des difficultés particulières dans le monde des arts?
J’ai toujours fait mes choix parce que je les veux et parce que je pense pouvoir parvenir à quelque chose avec eux et, comme dit l’adage : tant qu’on veut on peut. Ma conviction profonde est que les difficultés que je rencontre, tous les autres artistes, hommes et femmes, les rencontrent. Il s’agit du manque de ressources, de la rareté des financements, du peu d’infrastructures. La liste est longue, sans compter certaines pesanteurs culturelles. A ce sujet, une chose est acquise à mon niveau : pour moi être une femme ne peut constituer une excuse pour ne pas aller de l’avant.
Comment situez-vous votre pratique par rapport à la musique et à la littérature?
C’est la littérature qui m’a conduit à l’art. Depuis mes 8 ans, j’écris des poèmes, des histoires et, aujourd’hui, je suis toujours dans ce travail d’écriture dans la poésie, mais aussi les nouvelles et les scenarios. Je clame mes poèmes en slam, comme je peux en faire un recueil et les publier. Pareil pour mes nouvelles, je peux utiliser les textes pour une publication ou réaliser un film de fiction ou tout simplement l’adapter au théâtre.
Je pense que le slam est unique par ses jeux de mots, la force de l’émotion et des mots. Sa particularité c’est que tout le monde peut slamer.
Selon Rimbaud**, le slam peut “changer la vie”. Quel espoir placez-vous en cette discipline artistique?
Le slam m’a changée. C’est un art qui m’a permis de briser des barrières intérieures et extérieures. Il m’a permis de m’exprimer, de me remettre en question et de me libérer de certaines contraintes culturelles. C’est un message d’humanité, il peut remuer les consciences et briser les obstacles. Je place en lui, l’espoir de parvenir à briser les tabous et à permettre à toutes et à tous de s’exprimer et d’être écoutés. Libérer la parole, c’est déjà une victoire.
Mohamed Avoka