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Trafic illicite de biens culturels I Un fléau qui «prend de l’ampleur»

Trafic illicite de biens culturels I Un fléau qui «prend de l’ampleur»

Culture | -   Mahdawi Ben Ali

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Lors d’un atelier au Cndrs, un état des lieux a été fait et des solutions proposées, pour tenter de sauvegarder le patrimoine comorien.

 

Le Centre national de documentation et de recherche scientifique (Cndrs) organise, depuis hier 4 octobre 2023, un atelier sur la lutte contre le trafic illicite de biens culturels, la sauvegarde et la protection du patrimoine culturel des Comores. Des acteurs culturels, des douaniers et des agents des forces de l’ordre ont pris part à ces échanges qui prennent fin aujourd’hui, et dont l’objectif est d’établir un état des lieux de la situation et de proposer des solutions pour tenter d’endiguer le fléau des vols et trafics illicites de biens culturels qui, à l’heure actuelle, prend de l’ampleur aux Comores.


De la période coloniale à nos jours, le pillage, les vols et le trafic des biens culturels continuent de sévir au musée national, dans les bibliothèques, aux archives, au niveau des sites archéologiques et de différentes institutions. Parfois, il arrive que ces actes soient orchestrés par ceux-là mêmes qui sont censés protéger cette importante richesse nationale.Pour nombre d’acteurs, cela serait dû, notamment, au manque d’éducation au patrimoine, à la pauvreté, à l’ignorance par rapport à la valeur des biens culturels qui, parfois, conduisent certains à les détruire ou à s’en approprier à des fins personnelles.

«Toutes et tous également responsables»

Les actes de pillage datent de la période coloniale tout au long de laquelle les colons, qui connaissaient bien le pays, avaient la mainmise totale sur les biens culturels. Aujourd’hui, le plus dure c’est de voir ces biens culturels être pillés, consciemment ou non, par des Comoriens. «Que faire pour faire retenir et faire revenir des biens qui sont enfouies, notamment, en France pendant que leur l’histoire est restée aux Comores. Par-là, notre histoire est racontée par d’autres et, malheureusement, déformée. C’est très grave car il n’y a pas de pays sans culture et la nôtre est en train d’être asphyxiée», a soutenu le directeur du Cndrs, Dr Twawilou Mzé Hamadi. Selon lui, «nous sommes toutes et tous responsables, de la plus haute autorité au citoyen lambda».Il faut dire, par exemple, que depuis le discours du président français, Emmanuel Macron en 2017, sur la restitution des biens culturels africains détenus par l’Hexagone, aucune action n’a, concrètement, été menée par les Comores pour rapatrier leurs richesses culturelles.

La nécessité d’établir un inventaire complet

A ce propos, l’attaché culturel de l’ambassade des Comores à l’Unesco, Ibnou Hamadi Mohamed, estime que sans un inventaire complet, il est difficile de rapatrier les biens culturels détenus dans des pays étrangers. «Cela est d’autant plus vrai que la convention de 1970 n’est applicable que s’il y a un inventaire bien établi», rappelle-t-il.
Dans sa lancée, le Cndrs compte organiser d’autres ateliers avec les personnels des services de douanes et des forces de l’ordre pour leur permettre d’acquérir suffisamment de connaissances en matière d’éducation au patrimoine et sur les objets à valoriser et à protéger. Des biens culturels peuvent passer par la douane sous le regard de tous. Malheureusement, du fait du manque d’éducation au patrimoine, des agents peuvent les laisser passer.


D’après Moussa Ali Hamissi – qui parle de «phénomène planétaire» –, pour parvenir à endiguer cela, il faudrait des moyens «bien plus conséquents». Même si cet ancien directeur des douanes estime qu’on pourrait, à l’heure actuelle, «faire mieux, avec les moyens du bord» dans la lutte contre ce qui, de l’avis de tous les participants à l’atelier, est devenu un «véritable fléau». «Il nous faut aller vers la rédaction de texte pour mieux lutter contre le trafic, car on peut arrêter un bien à la douane mais sans texte on ne peut rien faire», propose-t-il.Pour sa part, tout en ne niant pas la nécessité de légiférer, Dr Bourhane Abdérémane estime que ce ne sont pas les lois qui manquent mais «plutôt, leur vulgarisation et leur application».

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