Dans leur atelier situé à Chitsangani, l’organisation non gouvernementale Naipenda Comores a mis en place une unité de valorisation qui transforme les déchets plastiques en carburant, gaz et pétrole brut grâce à un procédé de pyrolyse. Les plastiques sont collectés auprès de particuliers, mais également auprès de sociétés locales de mise en bouteille d’eau. En plus de la production de carburant, Naipenda a expérimenté la fabrication de briques et de planches à partir de plastique recyclé. L’atelier emploie dix personnes, sous la direction de Clément Robert, chef de projet.
Un engagement de jeunes
Les déchets sont triés, lavés manuellement, découpés, puis broyés avant d’être pesés. Les granulats obtenus sont soit envoyés vers l’unité de production pour être transformés en carburant, soit conservés en vue d’une exportation. «Nous achetons le plastique entre 25 et 50 francs le kilo, selon le type. Les bouteilles, quant à elles, sont stockées pour un futur projet d’exportation», explique Clément Robert. L’atelier dispose d’une broyeuse, d’une extrudeuse et d’une machine de pyrolyse artisanale, conçue par Naipenda à partir de pièces récupérées.
Chaque jour, environ 25 kilos de plastique sont transformés, générant en moyenne 25 litres de carburant, du gaz, et du wax (cire), qui peut être utilisé pour fabriquer des bougies. «Nos machines sont petites, mais elles nous permettent déjà de produire du pétrole brut, du gaz et de la paraffine. Le gaz est réutilisé pour alimenter la machine de pyrolyse elle-même, et le pétrole est mis à disposition de notre partenaire, un distillateur d’ylang-ylang», précise le chef de projet.
Dans l’atelier, neuf jeunes diplômés universitaires sont à pied d’œuvre. Technicienne de tri depuis huit mois, Mounya Kamardine et son équipe se chargent du tri, du nettoyage et du broyage. «Ce n’est pas un travail difficile. Nous nous entraidons beaucoup et avons développé un véritable amour pour ce que nous faisons. Cela m’apporte des revenus tout en protégeant l’environnement et la santé humaine», témoigne-t-elle.
Des défis techniques et financiers
À ses côtés, Toiyfati Mohamed, également technicienne, partage le même enthousiasme. «Ce métier est accessible à tous et utile à la planète. Je suis fière de contribuer à cette cause, malgré les critiques de certains qui ne comprennent pas pourquoi une diplômée travaille dans un atelier de recyclage», confie-t-elle.
Dans l’unité de pyrolyse, Ibrahim Ahmed, titulaire d’une licence en mathématiques, supervise la transformation du plastique. Équipé d’une combinaison anti-feu, de gants, de lunettes et d’un masque, il nous présente la machine et son fonctionnement.
«L’équipe de broyage nous fournit du plastique déjà broyé, que nous plaçons dans la machine chauffée à 450 °C. Chaque jour, l’opération dure environ deux heures et demie pour traiter 25 kilos de plastique, ce qui permet d’obtenir environ 25 litres de carburant, du gaz et de la cire (wax). Tous ces produits sont utilisés à l’atelier et parfois à l’extérieur.» Pour lui, cette mission est une véritable opportunité. «Ce projet me permet d’appliquer concrètement mes connaissances. Ce qui m’a motivé, c’est l’ambition de trouver une solution durable aux déchets plastiques. Nous avons reçu des formations en sécurité et en utilisation des machines, et nous disposons des équipements nécessaires, notamment des combinaisons anti-feu», assure-t-il.
Malgré ces avancées, l’atelier fait face à plusieurs obstacles : manque de financement, problèmes d’eau et d’électricité, ainsi qu’un matériel sous-dimensionné. «Notre machine de pyrolyse est petite et très technique. Nous travaillons sur un modèle plus performant, mais nous avons besoin de financements pour agrandir nos locaux et acquérir des équipements industriels. Nous avons une belle équipe, motivée et passionnée. La technologie que nous utilisons permet d’éliminer le plastique à 100 %, même les résidus peuvent servir à fabriquer des bougies. Nous avançons pas à pas, mais avec conviction», conclut Clément Robert.