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Vient de paraître. «Cœurs errants, corps malades» de Mohamed Anssoufouddine I Onze récits qui nous font du bien

Vient de paraître. «Cœurs errants, corps malades» de Mohamed Anssoufouddine I Onze récits qui nous font du bien

Culture | -   Faïza Soulé Youssouf

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Dans cet ouvrage plein d’espérance, le cardiologue officiant à Hombo, se raconte. Il livre, également, des histoires se passant à l’hôpital loin du regard. Celles que les Comoriens n’ont pas nécessairement l’habitude d’entendre.

 

Mohamed Anssoufouddine est un cardiologue, poète, écrivain, hommes de Lettres officiant à l’hôpital de Hombo à Ndzuani. Il vient de publier, en août, Corps errants, cœurs malades, la double peine aux éditions KomEdit. Il s’agit de onze récits de patients vécus par le patricien et ses collègues en milieu hospitalier. Les histoires joliment racontées et se lisant très facilement sont agrémentées d’observations médicales que les profanes gouteront peu, à l’évidence, destinées aux praticiens.


L’ouvrage d’un peu plus de cent soixante pages tombe à point nommé puisque paraissant dans un contexte de forte défiance des Comoriens à l’endroit de leur système de santé. Il y a une semaine, les réseaux sociaux s'en faisaient l’écho après une publication du journaliste, Ali Moindjié, relatant la naissance d’un bébé mort-né suivie, peu après, par le décès de sa mère.


Les étages de l’hôpital de référence, El-Maarouf, se superposent et d’aucuns se demandent si un bâtiment flambant neuf parviendra à soigner les malades… Habituellement, on a, de ce côté-ci du monde, plus entendu parler des erreurs médicales, du manque d’empathie et de dévouement du personnel de santé. Plusieurs écrits ont été publiés pour fustiger le dénuement des infrastructures médicales, le manque de politique volontariste des pouvoirs publics.


C’est, donc, à rebours de l’image que se font les Comoriens (bien souvent à raison) de leur système de santé, que Mohamed Anssoufouddine a fait le choix de nous faire vivre une autre réalité, mais pas seulement. Celle des diagnostics qui sont bien posés, celle de l’humanisme de certains médecins, du marginal mendiant qui vient à la rescousse d’un patient indigent.


Et puis, comment soigner des patients quand l’on est coupé du monde? Les médecins à Ndzuani, à l’époque du séparatisme, ont dû, souvent, faire montre de beaucoup d’ingéniosité en mettant en place un système D pour soigner les malades. Il est également question de la marchandisation de la santé non seulement aux Comores mais aussi sur l’île Maurice, destination prisée des Comoriens. Des compatriotes qui vont de plus en plus loin pour se soigner, jusqu’en Inde, pour des cas dont le pronostic de survie est nul. Et puis avec Mohamed Anssoufouddine, que l’on devine grand lecteur de Frantz Fanon, l’île comorienne de Mayotte n’est jamais loin.

«Un autre futur reste possible»

Des patients, désespérés qui s’y rendent en kwasa, les plus chanceux qui s’y rendent en avion, accompagnés de médecins, l’accueil glacial des confrères ‘caucasiens’ parlant de ces malades comme d’autant ‘de gueux’. Pour toutes ces raisons, Corps errants, cœurs malades est un ouvrage à lire.
Le poète, spécialiste du cœur, a semble-t-il, choisi les consultations qui l’ont le plus marquées au cours de sa carrière de cardiologue lui et ses confrères. Puisqu’il ne s’agit pas que de lui mais aussi du regretté Docteur Ansuldine Attoumane victime du cyclone Kenneth à qui il a dédié cet ouvrage, du Docteur Samir, ou encore du Docteur Daniel qui rêvait de migrer en Europe mais a fait le choix de rester chez lui, chez nous, conscient  qu’un autre futur reste possible. Histoire sans doute de vivre « sa légende personnelle ».

 

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