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Le cas des dockers comoriens : «Notre sécurité est mieux prise en compte, nos salaires restent précaires»

Le cas des dockers comoriens : «Notre sécurité est mieux prise en compte, nos salaires restent précaires»

Économie | -

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Pour avoir une idée des conditions de travail des dockers, nous avons rencontré le président du Syndicat des travailleurs en manutention et magasinage au port de Moroni, Mohamed Abdou Soilih alias Dr Mas. Ils sont aujourd’hui au nombre d’un peu plus de deux cent à travailler avec le nouveau concessionnaire, Moroni Terminal, filiale du Groupe Bolloré, une société française un des leaders de la logistique et de la manutention dans le monde.

 


Combien gagne un docker par mois ?



Lors des négociations avec le nouveau repreneur de la manutention, nous avions souhaité être associés.  Au lieu de cela la Commission chargée de la supervision de la manutention n’a pas pensé aux dockers. 

Au lieu de nous laisser la possibilité de nous asseoir avec le nouvel opérateur pour négocier nos conditions de travail, en particulier nos salaires, la commission a dit à Moroni Terminal de ne pas aller au-delà d’une masse salariale annuelle de 600.000 euros. C’est-à-dire un docker doit être payé au maximum 80.000 francs.

 


Alors, comment comptez-vous vous y prendre pour améliorer ces conditions de travail ?


Depuis 2016, nous sommes en négociations avec le nouveau manutentionnaire, Moroni Terminal, pour que nous puissions enfin trouver une solution par rapport aux conditions de précarité du docker.

Lors d’une réunion en décembre dernier, nous avons soulevé un certain nombre de points, notamment  l’indemnité de transport, la prime de risque, l’avancement des salaires et un accord d’établissement.

Par rapport à ce dernier point, les travaux sont en cours et l’accord devra être signé d’ici le mois de mai, qui correspond au cinquième anniversaire de Moroni Terminal.  
Nous souhaiterions que ce protocole d’accord ne soit pas spécifique à Moroni terminal mais qu’il soit applicable  à tout  manutentionnaire du port de Moroni.

Et par rapport à la durée légale du travail…
Avant, il n’y avait pas de possibilité de travailler le soir ou le dimanche ; la réglementation ne le permettait pas. On faisait quatre-huit heures par semaine. Après l’arrivée du Groupe Bolloré (Moroni Terminal), nous avons bataillé pour que nous puissions travailler le soir. Car partout dans le monde les ports travaillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

 


Mais pourquoi vouliez-vous travailler la nuit ?


A défaut d’avoir obtenu gain de cause pour l’augmentation de nos salaires, nous avons estimé que travailler la nuit et le dimanche allait nous permettre, avec ces heures supplémentaires, d’arrondir les fins de mois.  

 


Mais par rapport au salaire, qu’en est-il ?


Les conditions de vie et de travail du docker sont le dernier souci des autorités. Or, j’ai l’habitude de dire que même la cuillère qu’utilise le chef de l’État, elle passe entre nos mains avant de lui arriver. Nous faisons un travail très risqué.

Au temps de Comaco, un pointeur a été écrasé par un container rempli de boites de lait ; on n’a récupéré que des restes de son corps. Sa famille n’a rien perçu. Son fils est actuellement «journalier» au port. Mais, nous pouvons dire que la sécurité du docker est maintenant assurée. Maintenant, nous nous battons pour un salaire décent.

 


Où en est-on du paiement de vos droits suite à la cession du contrat de Gulf-Com ?


Nous venons de porter cette affaire devant l’inspection du travail. Fin 2016, un courrier adressé à la direction générale de Moroni Terminal par le ministère des Finances disait que l’Etat comorien ne peut pas verser 67 millions de francs aux anciens employés de Gulf-Com, conformément à la convention de concession établie entre le gouvernement comorien et Moroni Terminal.

Parmi les dispositions du cahier de charges, signé entre l’Etat comorien et Moroni Terminal le 13 décembre 2011, il est écrit que le nouveau concessionnaire s’engage à prendre en compte l’ancienneté du personnel comorien, précédemment employé par Gulf-Com.

Curieusement, la convention signée deux jours plus tard stipule que «le concessionnaire ne supportera en aucun cas les passifs qui pourraient subsister du fait de la gestion précédente des infrastructures portuaires, et notamment les passifs sociaux qui pourraient exister au jour de la reprise des opérations par le cessionnaire».

Les personnes chargées de superviser l’opération à l’époque doivent des explications. En 2015, la commission de liquidation du patrimoine de Gulf Com avait même décliné une convocation de la commission de la production de l’assemblée nationale.

Il faut savoir que depuis 2013, nous avons saisi toutes les instances et institutions, dont la justice, l’assemblée nationale, voire le chef de l’Etat pour essayer de renouer le dialogue pour qu’une solution soit trouvée. En vain.


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