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Société comorienne des hydrocarbures : L’entreprise publique reprend langue, sans appel d’offres, avec Vitol Bahrain Ec

Société comorienne des hydrocarbures : L’entreprise publique reprend langue, sans appel d’offres, avec Vitol Bahrain Ec

Économie | -   Nazir Nazi

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Selon le tout nouveau directeur de la société nationale des hydrocarbures, le précédent fournisseur, Independent Petroleum Group (Ipg), procédait à des surfacturations «ce que même la Banque islamique de développement (Bid) a reconnu», devait-il préciser. «J’ai demandé, sans avoir rompu le contrat, des explications à Ipg qui n’a pas pu me les fournir et j’ai, donc, dû suspendre toute commande», s’est justifié Mohamed Chatur Badaoui au sujet de la rupture du contrat avec Ipg pour entrer en «partenariat», selon sa propre expression, avec Vitol Bahrain Ec.

 

La rumeur faisait boule de neige depuis décembre dernier au sein de la Société comorienne des hydrocarbures  (Sch).»Il se pourrait que le groupe pétrolier suisse Vitol Bahrain Ec devienne le nouveau fournisseur pétrolier de la Sch».

Tout a commencé quand, pour la deuxième fois en moins de deux mois, le président du comité d’entreprise et délégué du personnel, Saïd Athoumani, a saisi le patron de la Société comorienne des hydrocarbures (Sch) pour lui faire part de ses «graves inquiétudes» au sujet de la gestion actuelle de l’établissement.

Dans ce courrier, dont Al-watwan a pu se procurer une copie, après avoir décrit l’état de la Sch en 2013, période pendant laquelle l’entreprise publique traversait un trou d’air, le comité émet de sérieuses réserves quant au choix de Mohamed Chatur Badaoui de renouer avec Vitol, le groupe suisse «à l’origine de la quasi faillite de la Sch il y a quatre ans».

«Les partenaires avec lesquels vous êtes en train de négocier en ce moment sont les mêmes que ceux-là qui ont plongé notre société dans cet état», peut-on lire dans cette correspondance.

«Partenariat» n’est pas «Appel d’offre»

Interrogé lors d’un entretien accordé à Al-watwan le 20 février, (lire notre numéro 3121 du mois dernier), le directeur général de la Sch avait expliqué qu’il s’agissait d’une cargaison d’urgence auprès de Vitol dans le cadre du contrat signé entre la société suisse et son prédécesseur. «Une cargaison de dépannage», avait-il insisté. Selon lui, on parle d’appel d’offres si on est à la recherche d’un fournisseur, «pour l’instant, il s’agit d’un partenariat».

 

 

Mais, il a fallu attendre quatre mois après sa signature pour qu’Al-watwan se procure une copie du protocole d’accord signé le 1ère septembre 2016 entre le responsable Afrique de l’Est de Vitol Bahrain Ec, Jérôme Bourceret, et le directeur général de la Sch, Mohamed Chatur Badaoui pour révéler ledit protocole qui entrait en vigueur à la même date que sa signature. Soit, presque six mois avant la déclaration du directeur général selon laquelle il s’agissait d’une cargaison d’urgence.

Ironie du sort, il a été précisé dans le protocole que pour les cinq prochaines années, il n’allait plus y avoir d’appels d’offre pour tous les besoins en produits pétroliers de l’établissement public des hydrocarbures.

Cette exclusivité est précisée de façon claire dans ce protocole d’accord signé parla société comorienne et le groupe suisse. «La Sch s’approvisionnera pour tous ses besoins pétroliers exclusivement auprès de Vitol Bahrain pour profiter des conditions de financement et d’assistance technique du fournisseur», peut-on lire dans le protocole d’accord. En contrepartie ?

Crédit fournisseur

A cet effet, il a été convenu dans le protocole que Vitol offrira un crédit fournisseur à la Sch qui permettra de réaliser un certain nombre de projets de maintenance et d’investissements. (Par ailleurs) Vitol aurait accepté de renflouer les caisses de la société en lui accordant 10 millions de dollars, soit environ 5 milliards de francs comoriens.

«Il y a un plan d’amortissement dans cette convention pour que cela ne pèse pas très lourd sur les fonds de la Sch», indiquait Mohamed Chatur Badaoui à l’occasion de sa conférence de presse du 25 février dans les locaux de sa société.

 

Et de justifier sa décision de travailler avec le groupe par la nécessité de former les agents, de réhabiliter les dépôts et d’augmenter la capacité de stockage de la société. «Financer sur fonds propres tous ces projets aurait pesé lourd», devait-il argumenter à ce propos.

Le directeur avait, en outre, avancé que le précédent fournisseur, Independent Petroleum Group (Ipg), procédait à des surfacturations et que même la Banque islamique de développement (Bid) l’»avait aurait reconnu». «J’ai demandé, sans avoir rompu le contrat, des explications à Ipg qui n’a pas pu me les fournir. Donc, j’ai suspendu toute commande», s’est-il justifié au sujet de la rupture du contrat avec Ipg.

 

3,5 à 4 milliards par cargaison

Il y a lieu en outre de se demander si ce partenariat «pour les cinq années à venir» qui donne cette exclusivité au groupe pétrolier suisse en tant que fournisseur de la Sch n’entre pas dans le cadre d’un marché «de gré à gré» ou «par entente» par rapport à la loi sur la passation des marchés publics or à partir de la somme de 40 millions de francs comoriens pour les marchés de fourniture, un appel d’offres s’impose.

Surtout qu’il est de notoriété publique que la Société comorienne des hydrocarbures peut aller jusqu’à commander une cargaison de 10 mille tonnes métriques, soit à peu près 3,5 à 4 milliards de francs comoriens par cargaison tous les six mois.

C’est, peut-être, le lieu de rappeler que dans un entretien accordé à Al-watwan le mois dernier, la toute nouvelle directrice nationale de contrôle des marchés publics, Hadidja Ali, avait déclaré que pour cette année 2017, seuls l’Autorité portuaire des Comores et le ministère de la Production avaient présenté leurs plans de passation des marchés publics.

 


* Un courrier a été adressé, samedi 1er avril dernier, à la direction générale de la Sch par le journal Al-watwan pour une rétrospective des activités de l’établissement public et une  clarification, qui nous parait urgente, sur un certain nombre de questions. Malgré notre insistance, nous n’avons pas eu de suites à cette demande. 


 

 

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