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Ma-mwe : Gestion controversée d'un prêt bancaire de 400 millions de francs

Ma-mwe : Gestion controversée d'un prêt bancaire de 400 millions de francs

Économie | -   Nazir Nazi

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Après la publication d’une enquête sur un marché de près de 215 millions de francs comoriens pour la fourniture des compteurs de prépaiement par la Ma-mwe, (journal du jeudi 8 mars 2018), Al-watwan a préféré approfondir un peu plus. C’est après avoir contracté un prêt de 400 millions de francs à la Snpsf que deux des trois membres du comité provisoire avaient pointé du doigt la gestion du patron du comité et actuel directeur général de la Ma-mwe. Pourquoi cette gestion controversée ?

 

Tout a été révélé dans un courrier signé en juillet 2017 par deux des trois membres du comité provisoire qui dirigeaient la société comorienne de l’eau et de l’électricité (Ma-mwe) depuis l’inauguration de la nouvelle centrale thermique de Vwadju.

Dans cette lettre, dont Al-watwan s’est procuré une copie, les deux membres, Mohamed Soilihi Fahar et Nassurdine Ali Soilih, demandaient au “vice-président” d’intervenir et de convoquer le comité par rapport à la gestion de la société d’Etat. “Manque de transparence et influences négatives” font partis des raisons avancées pour démontrer que le directeur du comité, Abdou Saïd Mdahoma, actuel directeur de la Ma-mwe, “met en péril des efforts déployés depuis six mois, en passant outre l’avis des autres membres dans ses prises de décisions sur des dossiers importants tels que l’acquisition des matériels des branchements hors normes, câbles, disjoncteurs”, rapporte la lettre en question.

La gestion controversée est mise en avant après que Ma-mwe ait effectué, l’année dernière, un prêt d’un montant de 400 millions de francs comoriens auprès de la Société nationale des postes et des services financiers (Snpsf). D’ailleurs, selon le plan d’amortissement, le producteur et distributeur public de l’électricité s’est engagé à rembourser cette somme en une année pour une mensualité de 35.352.663 francs. La société a eu recours à ce prêt pour financer deux projets, en l’occurrence l’acquisition des compteurs à carte pour sécuriser et maitriser la consommation ainsi que la construction d’un bâtiment à deux niveaux.

Après la publication d’une partie de cette enquête dans nos colonnes, du numéro 3382 du jeudi 08/03/2018 sur l’achat des compteurs à carte par la Ma-mwe à hauteur de 215 millions sans appel d’offre, Al-watwan s’est procuré une copie d’un courrier adressé à un vice-président. “Il y a de cela trois jours, je suis tombé sur un dossier qui reflète sa gestion opaque. Dans le dossier suivant, les procès-verbaux ont fait référence à un appel d’offre qui n’a jamais eu lieu, à un fournisseur qui n’a jamais été consulté”, peut-on lire dans ce courrier.

Déclinaison de responsabilité

Selon une source bien informée, le “vice-président” n’a pas réagi suite à ce courrier même si le comité provisoire a été remercié quelques jours après. La dissolution du comité est-elle une justification du silence du vice-président en question face à ce sujet ?

Tout au long de nos investigations, Al-watwan est tombé sur une copie d’un autre document adressé au patron dudit comité pour se dégager de toute responsabilité. Pourquoi cette posture ? “Vous avez volontairement monté de toute pièce un dossier ne respectant aucune des procédures légales en matière de passation de marché en Union des Comores. A l’appui de documents mensongers destinés à tromper les décideurs et les contrôleurs” et “vous persistez à comploter derrière nos dos en produisant de faux documents destinés à faire influencer l’achat des compteurs de fournisseurs Wasion”, peut-on également lire dans ce courrier signé encore une fois par les deux autres membres du comité. Il a été également précisé dans le même courrier qu’ils s’opposent aux décisions d’Abdou Saïd Mdahoma dans ce dossier car elles “ne sont pas dans les intérêts de la Ma-mwe”.

Ainsi, ils ont décliné toute responsabilité dans “la gestion sombre” de ce dossier. Lors de notre première enquête sur ce même sujet, il a été révélé auprès des institutions chargées de veiller sur l’application des procédures de passation de tous les marchés publics qu’aucun appel d’offre n’a été lancé pour l’achat de dix mille compteurs monophasés et de trois-cents compteurs triphasés pour la somme de 431.590 euros. De plus qu’au niveau de l’autorité de régulation des marchés publics (Armp), l’attributaire, qui est Wasion group limited, ne s’y est pas fait enregistrer. Conséquence : le gagnant du marché n’a pas honoré la redevance de 0,5% auprès de l’Armp prévue dans le code. Et ’il n’y a pas eu de demande de non objection à un appel d’offre de la Ma-mwe pour l’achat desdits compteurs à carte, comme l’oblige la loi.

S’aligner ou lancer un nouvel appel ?

 Le directeur du comité et actuel Dg de la Ma-mwe avait laissé entendre, lors de notre 1ère enquête, que la société Mamwe s’est alignée sur un appel d’offre de la Banque mondiale dans le cadre du projet Prse pour l’achat de mille compteurs à carte avec les accessoires.

 “Nous avons décidé que la société qui gagnera l’appel d’offre de la Banque mondiale restera notre fournisseur des compteurs”, avait-il avancé dans notre numéro du mois de mars. Ce qui est une partie submergée de l’iceberg. Ironie du sort, des copies des procès-verbaux de l’ouverture des offres du 18 avril 2017 et d’attribution du 10 juin 2017 de ce marché relatif à la fourniture des compteurs à pré- paiement disent le contraire.

Dans ces Pv dont Al-watwan possède des copies, force est de constater qu’au lieu de s’aligner sur un appel d’offre de la Banque mondiale, comme il le prétendait, il y avait deux soumissionnaires, Washion group limited et El Swewedy Electrometer. Ma-mwe, s’est-elle alors alignée sur un appel d’offre de la Banque mondiale ou plutôt a lancé un appel d’offre méconnu au niveau des institutions compétentes ? Bien que les deux membres confirment la véracité de ces courriers, ils se sont abstenus de tout commentaire à ce sujet.

Le directeur actuel de la Ma-mwe et directeur du comité à cette époque. Les onze ont voté oui Interrogé à ce sujet, Abdou Saïd Mdahoma a préféré ne pas mâcher ses mots. “Celui qui divulgue ces informations avait un fournisseur. Il voulait que son fournisseur soit sélectionné. Il avait fait sortir un pro forma de son fournisseur. Sur treize agents présents lors de l’ouverture et évaluation des offres, deux seulement s’étaient opposés pendant que les onze qui restaient ont voté oui”, se souvient le directeur de la Ma-mwe.

Pour l’autre projet de la construction d’un bâtiment à deux niveaux qui est en cours, ce marché va coûter 183 millions de francs. Si le directeur général de la société de distribution d’eau et d’électricité affirme qu’un appel d’offre a été lancé pour ce marché, l’autorité de régulation des marchés publics n’a pas été saisie.

Selon l’Armp, La société Adame Fils-construction Sarl, qui est l’attributaire, ne s’est pas enregistrée, par conséquent elle n’a pas honoré la redevance de 0,5% prévue par le code. Ainsi, pour ces deux marchés, respectivement de près de 215 millions et 183 millions de francs, les deux bénéficiaires ne paient pas les redevances : pour la simple raison suivante : “il n’y a pas eu d’appel d’offre conformément au code des passations des marchés publics”.

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