Les enseignants contractuels des collèges et lycées de Mayotte traversent une période délicate, marquée par des salaires amputés ou parfois totalement impayés. Chaque samedi, ces enseignants manifestent dans leurs établissements respectifs. Certains témoignent de difficultés à subvenir à leurs besoins essentiels : se nourrir, acheter du carburant ou encore payer leurs factures mensuelles. Dans un communiqué daté du 29 octobre, le collectif du collège de Mtsamboro a invité tous ses membres « à se retrouver le samedi 8 novembre dès 11 h devant le collège pour une mobilisation pacifique et déterminée ».
Le texte ajoute : «La situation actuelle à Mayotte (retards de salaires, conditions de travail dégradées, manque de moyens pour nos élèves et nos personnels) ne peut plus durer. Venez nombreux, avec pancartes, banderoles et détermination. C’est le moment de faire entendre notre voix, notre réalité, notre engagement pour nos élèves. Ensemble, faisons bouger les lignes pour l’avenir de notre île et de notre école». Lors de la mobilisation du samedi 8 novembre, plusieurs slogans figuraient sur les pancartes : «Travail sans salaire ? Ce n’est pas une vocation, c’est de l’exploitation !» ou encore «Le savoir n’a pas de prix, mais le travail si».
Selon l’un des initiateurs du mouvement, Houmédi Halid, enseignant de français langue seconde, l’objectif de cette mobilisation était de «faire le point ensemble et de partager les situations». Il s’est dit inquiet du sort de certains collègues «sans aucun revenu, sans compte bancaire ni salaire». Au nom du collectif du collège de Mtsamboro, il a appelé l’ensemble du personnel de l’éducation ainsi que la population à rejoindre les mobilisations spontanées «afin que cette situation prenne fin le plus rapidement possible».
La rectrice pointée du doigt
Le 23 octobre dernier, lors d’une manifestation à Mamudzu, plusieurs enseignants se sont symboliquement allongés au sol pour illustrer leur désarroi. « Cela fait plus de trois mois que nous ne sommes pas payés. Nous avons voulu montrer la mort symbolique du corps enseignant », a confié un professeur du collège de Kawéni.
La nouvelle rectrice, Valérie Debuchy, en poste depuis juin dernier, est accusée par plusieurs enseignants de ne pas tenir ses promesses. «Elle multiplie les engagements non tenus envers des centaines d’enseignants, majoritairement étrangers, affectés à Mayotte», affirme un enseignant du collège de Kawéni.
Sous couvert d’anonymat, un autre enseignant explique : «Nous survivons grâce à la solidarité entre collègues. Mais certains ont énormément du mal à subvenir à leurs besoins, notamment pour le logement». Les enseignants que nous avons contactés samedi dernier affirment ne pas connaître les causes exactes de ces difficultés. «La rectrice n’a, à en aucun moment, précisé l’origine du problème. Elle ne fait que promettre des solutions qui ne sont malheureusement jamais appliquées», a déploré l’un d’eux.Plusieurs fédérations et collectifs d’enseignants ont apporté leur soutien aux manifestants.
Parmi elles figure Sud Éducation, une fédération syndicale française «Solidaires, Unitaires et Démocratiques» qui regroupe l’ensemble du personnel de l’éducation, de la maternelle à l’université. Rappelons que, depuis trois ans, les salaires des enseignants contractuels de Mayotte sont mandatés par le rectorat puis versés par les services français des finances publiques basés à La Réunion. Les difficultés actuelles découleraient, selon plusieurs sources, d’une réorganisation administrative.
