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Multitude des sous-centres d’examen I Vers la suppression «au cas par cas de certains d’entre eux»

Multitude des sous-centres d’examen I Vers la suppression «au cas par cas de certains d’entre eux»

Éducation | -   Abdallah Mzembaba

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L’ouverture au forceps des lieux de composition des examens nationaux dans les recoins de l’île, voire même du pays, sans la moindre considération de critères éligibles autres que politiques et fantasmes des communautés, ne rend pas service à la qualité de l’enseignement et de l’éducation.

 

Le Brevet des collèges ou Brevet d’études du premier cycle (Bepc) a été composé dans dix-neuf sous-centres d’examen à Ngazidja. Cette année, ce sont en tout 5277 candidats qui étaient concernés dans l’île. Et si on regarde de plus près ces chiffres, il y a de quoi se poser des questions.


En effet, on y retrouve des localités séparées par à peine une dizaine de kilomètres, parfois moins comme Kwambani et Itsikundi, deux villages de Washili, et qui ont chacun un sous-centre. Si l’ouverture de lycées et collèges dans les différentes localités s’avère nécessaire, en faut-il pour autant en faire des centres d’examen ?
On serait tenté de dire non, car les sous-centres d’Itsikundi et Kwambani, pour revenir à eux, comportent, une fois réunis, à peine deux-cents candidats.

 

Et du côté des résultats ce n’est guère reluisant : 2 candidats admis sur 63 à Itsikundi et 14 admis sur 137 candidats à Kwambani. Cependant, les deux localités sont loin d’être des exceptions, puisqu’on retrouve la même situation à Fumbuni (197 inscrits et 5 admis) et Mohoro (87 inscrits et 3 admis) puis Bangwa-Kuni (81 inscrits et 8 admis) et Wellah ya Mitsamihuli (83 inscrits et 26 admis). Dans cette même logique on pourrait également citer Dembeni (178 inscrits et 18 admis) et Uziwani(172 inscrits et 10 admis).


Passé ces chiffres qu’est-ce qui pourrait expliquer le foisonnement de ces sous-centres ? En effet, plusieurs raisons font que le ministère de l’Education aurait à gagner à cesser cette politique consistant à ouvrir des sous-centres d’une façon «impulsive». Des économies de temps, d’énergie et d’argent pourraient, en effet, être réalisées avec «un peu de bon sens».

Des économies de temps, d’énergie et d’argent

Cette année au Bepc, Itsikundi-Kwambani c’est 200 inscrits, Fumbuni-Mohoro (284 inscrits), Bangwa-Kuni-Wellah (164) et Dembeni-Uziwani (350). Quant à ceux qui pourraient, à juste titre, dire et «pourquoi ne pas ouvrir de nouveaux sous-centres pour désengorger ceux qui existent» ? La réponse est, selon docteur Mistoihi Abdillahi, sociologue, toute simple «la multiplication de ces sous-centres contribue à la dévalorisation de nos diplômes».


Selon l’intéressé «les raisons sont moins techniques qu’autres. Je peux en citer deux principales. La première, émanant des communautés, est motivée par la conception de d’honneur. Si Kwambani a un sous-centre, Itsinkundi en voudra un. C’est une honte pour les habitants de Wellah de voir leurs enfants se rendre à Bangwa pour un examen national alors que Wellah prétend être mieux représenté que Bangwa».

 

Dans cette même logique «les élèves de Djomani ne verront jamais Ntsaweni comme un lieu de réussite et d’émancipation, donc ils préféreront aller composer à Moroni que de le faire à Ntsaweni pourtant situé à 2km de chez eux». L’autre raison évoquée est d’ordre politique. «En effet, les hommes politiques ont besoin de montrer aux leurs qu’ils pèsent à l’échelle nationale. Donc, réussir à ouvrir un sous-centre d’examen chez soi est une marque de réussite politique. Ensuite, le gouvernement suppose qu’en ouvrant ces sous-centres dans ces chefs-lieux, il gagne l’adhésion de la population. Enfin, il arrive que ces politiques ne fassent qu’honorer des promesses électorales», souligne le sociologue.

«Quantité n’engendre pas systématiquement qualité»

Au ministère de l’Education nationale, on reconnait que l’ouverture de ces sous-centres «n’obéit à aucune logique si ce n’est politique et on a du mal à avoir un contrôle dessus». Djaffar Salim concède, en effet, que pour le moment c’est l’anarchie et qu’il va falloir y mettre de l’ordre. «C’est parmi les réflexions et observations que j’ai eu à faire. Plutôt que de favoriser et de stimuler l’excellence, le talent et le génie comorien, ces sous-centres favorisent la triche et la fraude», déclare le ministre de l’Education.


Mistoihi Abdillahi abonde dans ce sens et estime que «quantité n’engendre pas systématiquement qualité. Certes, si l’État avait les moyens financiers, techniques et logistiques de créer des sous-centres pour désengorger les centres d’examens cela serait vraiment intéressant. Le souci c’est que l’État ne dispose pas de ces moyens. Il y a des sous-centres qui ne répondent pas aux normes (sécurité, hygiène ou confort, Ndlr); des surveillants qui ignorent la déontologie du métier d’enseignant et des surveillants tous connus par les élèves avec les risques qui y sont liés».


Dans ce sens «faire un examen au lycée de Moroni réduit tout risque de copinage entre l’élève et le surveillant. L’élève n’attend aucun signe de l’extérieur. Tel n’est pas le cas quand ta salle d’examen est à quelques mètres de chez toi et que le surveillant est ton cousin».«Est-ce que l’examen était abordable ?» - «Alhamdulillah, les surveillants étaient très gentils avec nous», - voilà les réactions de nos enfants à la fin de chaque épreuve.

 

C’est fini le temps où on commentait les sujets à la fin de chaque épreuve», poursuit le sociologue. À cela, Djaffar Salim ajoute qu’il y a un «gâchis financier d’où la nécessité de se pencher sur le sujet. J’entends soumettre au gouvernement un projet allant dans ce sens, mais les dossiers seront étudiés au cas par cas même si un critère prime sur les autres : la distance entre des sous-centres situés dans la même région».

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