Chaque nouvelle rentrée scolaire est un moment d’excitation, mais aussi d’angoisse. Les parents se retrouvent dépassés par les dépenses, tandis que les enfants expriment sans détour leurs envies et préférences. Dans les rues bondées de Volo-volo, mères et pères tiennent la main de leurs enfants, faisant le tour des marchés pour trouver fournitures, tenues et cartables. Les négociations et les disputes légères sont fréquentes.
Une fillette refuse une jupe jugée «démodée», une autre ne veut plus porter de hijab «parce qu’il n’est plus à la mode». Des désirs qui compliquent la tâche de parents déjà fragilisés par les prix. «On n’a pas le choix, il faut répondre à leurs besoins, même si ce n’est pas facile», confie une mère, un peu frustrée. À la librairie «À la page» située à Mangani, l’affluence est telle que les clients débordent parfois jusque dans la rue. «Ce matin, c’était pire. J’ai dû partir et revenir plus tard», raconte une cliente, exténuée.Certains parents, plus prévoyants, ont déjà bouclé leurs achats des semaines auparavant pour éviter les bousculades.
Les marchés ne sont pas en reste : cahiers, ardoises, stylos, gommes et même tenues d’école sont étalés dans des brouettes ou sur des stands improvisés. Les vendeurs interpellent les passants : «Achetez cette belle jupe noire pour la rentrée». Certaines élèves recherchent le sac «tendance» qui fera sensation le jour J. Les libraires se défendent face aux accusations de hausse des prix. Le gérant de la librairie Miad, Ahmada Djae à Hadudja, se défend : «Les parents pensent que nous augmentons les tarifs, mais c’est tout le contraire». Il explique que ses prix sont «abordables pour toutes les personnes souhaitant acheter des fournitures et livres».
Les jeunes aussi s’adaptent
Le système d’échange de livres connaît aussi son lot de difficultés. Miftahou Moimed Bedja, qui en a fait sa spécialité, raconte : «Beaucoup de parents viennent avec des livres sans couverture, complètement usés, espérant un échange contre du neuf. Mais je commande mes livres au Sénégal, je paie des frais élevés et les taux augmentent sans cesse. Forcément, ça crée des tensions». Du côté des parents, la grogne monte. Abdoulkarim Mohamed, alias Baro, père de trois enfants, se plaint : «Avant, on pouvait aller dans les friperies pour les tenues. Aujourd’hui, certaines écoles imposent leurs propres uniformes. Tout est cher, même un sachet qui coûtait 25 francs est passé à 100 francs. Avec 10 000 francs, tu n’arrives même pas à acheter une tenue complète».
Face aux prix exorbitants, certains élèves tentent de prendre les devants. Aziad Said Djabir, 16 ans, élève à l’école Avenir, témoignage : «C’est très difficile. Les prix sont élevés et on ne peut plus faire grand-chose. On m’a toujours dit qu’un élève doit souffrir pour réussir. Du coup, je cherche des petits boulots pour contribuer un peu, même si mes parents m’aident». Dans les magasins de baskets, des garçons laissent éclater leur joie à l’idée de porter une nouvelle paire pour la rentrée. L’enthousiasme contraste avec les visages inquiets des parents comptant chaque billet pour couvrir toutes les dépenses.
Des mères en première ligne
Pour de nombreuses mères, la rentrée est synonyme de calculs impossibles. Entre les arriérés de scolarité, les fournitures et les uniformes, il faut jongler sans cesse. Assiata M’madi explique qu’elle achète certaines fournitures à Nvuni, mais se rend à Moroni pour les livres. «Le problème, c’est qu’on ne trouve pas toujours ce qu’il faut », soupire-t-elle. Sailata Athoumani, mère de trois enfants et employée au laboratoire de santé militaire, résume la situation : «Les fournitures et les livres sont chers. Les salaires ne suivent pas. Mais nous n’avons pas le choix, nous devons acheter, qu’importe le prix, pour l’éducation de nos enfants.
Nous n’avons pas étudié, alors nous voulons leur offrir cette chance. Même si nos salaires ne sont pas suffisants, on fait tout pour ne pas être mal avec nos enfants».
Dans les écoles aussi, la préparation bat son plein. Les établissements retapent leurs murs, nettoient les salles et réparent les bancs en prévision de l’arrivée des élèves. Les parents, eux, préparent leurs enfants à reprendre un rythme plus strict : se coucher tôt, réduire l’usage du téléphone et se concentrer sur l’essentiel.