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Scandale des notes à l’Université des Comores I Des enseignants et des étudiants reconnus «complices» par la commission d’enquêteI

Scandale des notes à l’Université des Comores I Des enseignants et des étudiants reconnus «complices» par la commission d’enquêteI

Éducation | -   Abdou Moustoifa

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En attendant la réaction du ministère de l’Education à qui on a remis, il y a déjà quelques semaines, le rapport, l’administration centrale a sanctionné les soixante étudiants reconnus coupables. Ils ne sont pas passés en classe supérieure. La commission de discipline se réunit ce vendredi.

 

Coup de tonnerre à l’Université des Comores. On connait désormais les étudiants de la faculté de droit et des sciences économiques (Fdse) ayant bénéficié des notes «gracieuses» l’année dernière. De nombreux étudiants ont reconnu avoir donné de l’argent à des responsables en échange de notes. Si des zones d’ombres subsistent encore et que des investigations complémentaires s’imposent, le travail réalisé par la commission d’enquête mise en place par l’administrateur de l’université a permis néanmoins de lever le voile sur ce «scandale».
Pendant deux semaines, cette équipe a auditionné une dizaine de personnes dont des enseignants, des agents de la scolarité et des informaticiens. Selon le rapport final, sorti le mois dernier, il y a eu au total 60 étudiants de la Fdse, dont les notes ont été gonflées. Trois départements sont concernés par ces fraudes. On retrouve, en tête, le département de l’Administration économique et sociale (Aes) avec 27 étudiants. Ensuite, le département des Sciences économiques (18 étudiants). Les 15 restants sont enfin issus du département de Droit.
Dans certaines matières, telles les relations internationales, on découvre des notes passant de 4 à 14/20. La manipulation reste la même dans la plupart des filières recensées, que ça soit en droit d’obligation ou régimes matrimoniaux. Certains étudiants qui ont obtenu 3/20, voient leurs notes grimper jusqu’à 14. Dans le département de Droit toujours, les anomalies recensées sont nombreuses. Le cas le plus flagrant est celui des trois étudiants éliminés et qui se retrouvent avec des 10 et 13/20.

Une mention assez-bien

Un autre cas qui résume tout est celui d’une étudiante partie de rien mais qui a été déclarée admise avec une mention.
La fille en question n’a pas réussi à avoir une note dépassant 3/20 sur quatre matières. Mais elle a obtenu au final une mention assez-bien. Un fait qui a frisé le ridicule dans les milieux des étudiants. Au niveau du département des Sciences économiques, aussi la commission d’enquête a-t-elle recensé une étudiante connue sous le nom de Rafouanti Ahamada Mkapvapvo qui a obtenu un seul 4 sur 8 matières. Devinez quoi ? Elle a eu sa moyenne pour passer en classe supérieure. Puis il y a sur la liste du département d’Aes, un certain Djounaidi Saindou. La particularité de ce dernier est la plus emblématique. Car avec six zéros dans son relevé, il a réussi quand même à valider l’année.
La conclusion tirée par la commission de l’administration centrale dirigée par Abdou Zaki et Ahamadi Daroussi Oili est la suivante : les 60 étudiants n’avaient pas tous obtenu la moyenne. D’où l’idée de solliciter des gens pour modifier leurs notes. Pour ce qui est des responsabilités des uns et des autres, les enquêteurs ont entendu dans un premier temps le doyen de la Faculté de droit, Idi Mohamed, afin de connaitre comment il avait eu connaissance de l’affaire.
«Un étudiant s’est présenté à la scolarité pour récupérer son attestation. Mais les agents, après vérification, ont découvert que le jeune en question avait été éliminé pour fraude. Tout de suite, on a mené une enquête et c’est à partir du rapport issu de ces investigations que nous avons saisi l’administration», a-t-il raconté à la commission.
D’où vient la fraude ? Normalement deux équipes sont chargées de la saisie : une commission de la scolarité et une autre pour chaque département. Ces entités procèdent à la saisie séparément. «Faute de temps, une seule commission était, cette année, chargée de faire le travail avec à sa tête, Moidhini Mhamadi. Les réseaux en ont profité avec cet informaticien pour commettre les bêtises», a laissé entendre le doyen, cité par le rapport.

L’informaticien
Moidhini Mhamadi

Ne se trouvant même pas au pays, cet informaticien considéré comme le cerveau, a avoué ses torts dans une audio que la commission a en sa possession. Malgré son absence, les enquêteurs ont difficilement réussi à élaborer une liste des personnes impliquées ou qui mériteraient le statut de collaborateurs. C’est le cas de Mahamoud Halifa dit Mcolo. Cet enseignant est la première personne vers qui l’informaticien s’est tourné pour demander de l’aide. L’autre acolyte identifié s’appelle Zainoudine Soilih, lui aussi informaticien, mais de la faculté des Lettres et des sciences humaines.
Celui-ci a admis avoir demandé à Moidhini de vérifier deux cases vides pour sa nièce, Myriame Kassim. Mais après contrôle, il s’est avéré que cette étudiante en L3 dans le département des Sciences économiques a bénéficié d’un gonflement dans 6 matières. Djinti Moussa, agent de la scolarité, a quant à lui reçu de l’argent venant de Djoumoi Faharddine. Même si l’intéressé continue de nier une telle transaction, la commission reste convaincue de son implication à cause du comportement observé pendant son audition. L’agent était bombé de nervosité.
Mis en cause aussi, l’ex doyen de la faculté des Droits, Ahmed Kassim, a reconnu mettre parfois des notes fantaisistes, mais il a nié toute implication dans l’affaire de gonflement de notes de l’année 2018-19.
En l’absence de l’information et des preuves tangibles, la commission a disculpé certaines personnes comme Mohamed Boina, Said Madi Dana (direction des études supérieures), Ibrahim Abdou Hamadi alias Zanoune. Toutefois, elle invite l’administration centrale à revoir les procédures d’évaluation et de délibération des examens à Mvuni.

Abdou Moustoifa

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