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Interview / Soilihi Mohamed (Campagnard) souhaite revenir aux Accords de Fomboni avant de mettre le pays en chantier

Interview / Soilihi Mohamed (Campagnard) souhaite revenir aux Accords de Fomboni avant de mettre le pays en chantier

Elections | -

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Le candidat à l’élection des 24 mars et 21 avril prochains, Soilihi Mohamed a accepté de répondre aux cinq questions d’Al-watwan posées à tous les candidats qui concourent pour le fauteuil présidentiel.

 


Vous visez la magistrature suprême. Qu’est-ce qui motive cette candidature ? Et avec quels moyens ?



Ces élections présidentielles de mi-mandat imposées par le président Azali Assoumani ne s’inscrivent pas dans l’agenda de l’alternance politique que le pays s’est donné depuis 2002. Le choix du président Azali d’interrompre son mandat confronte les candidats à une double alternative : soit s’inscrire dans (cette) logique…en se conformant à la constitution imposée par le président Azali, soit revenir aux grands principes de l’Accord de Fomboni. En ce qui me concerne, je m’inscris dans la seconde alternative. Je m’engage donc dans ces élections afin d’éviter à notre pays de nouvelles fractures et empêcher un retour en arrière annonciateur d’un avenir incertain pour notre pays et notre peuple. Je m’engage dans ces élections pour rétablir l’ordre constitutionnel mis en cause par l’actuel gouvernement ; réhabiliter le fonctionnement interrompu des institutions du pays ; restaurer les libertés démocratiques ; redonner au peuple la souveraineté qu’il exerce librement depuis quinze ans, dans la paix, la stabilité et le consensus et restituer l’exercice de la présidence tournante à l’île d’Anjouan en 2021. Ma candidature est portée par des citoyens soucieux de préserver l’unité et d’assurer un meilleur avenir pour le pays. Il s’agit de cadres, des jeunes et moins jeunes venus d’horizons différents et qui m’ont choisi pour être leur porte-parole dans ce combat. Les moyens sont donc ceux d’un candidat sans parti politique qui représente le peuple, les cadres compétents et intègres qui sont rejetés par la République, les femmes et les jeunes qui veulent participer à la construction du pays. La mobilisation de tous fait la force de ma candidature.


La justice est souvent pointée du doigt, accusée de laxisme et de favoriser une culture d’impunité. La lutte contre la corruption est également mise à l’index. Votre programme en fait-il mention ?



L’engagement N°9 de notre programme traite de la justice et de la lutte contre la corruption. Il n’y a pas de justice sans démocratie. Pour asseoir une justice équitable, la mise en place des fondements d’une culture démocratique et citoyenne s’impose. Nous allons donc faire respecter les principes et règles démocratiques régissant la séparation des pouvoirs, faire vivre les partis politiques par la revitalisation des moyens d’expression et par l’octroi de moyens et de pouvoirs à l’Assemblée nationale, par exemple, pour contrôler l’action du gouvernement et doter l’opposition parlementaire d’un statut lui garantissant un droit de regard dans la conduite des affaires de l’Etat. Nous allons doter les médias de liberté et de moyens leur permettant de jouer un rôle d’éducation citoyenne en leur donnant une autonomie administrative et financière.

En matière de lutte contre la corruption, nous allons adopter et mettre en œuvre un code de moralisation de la vie publique visant à favoriser la transparence dans la gestion des finances publiques, l’attribution des marchés publics, les conditions d’accès à la fonction publique.

La lutte contre la corruption passe aussi par une réforme radicale de l’administration fiscale et l’amélioration de l’administration douanière. Je ferais une véritable refonte de l’administration fiscale en revoyant son organisation, sa composition, ses procédures de fonctionnement, créer un environnement favorable au développement des affaires pour attirer les investissements privés nationaux et internationaux dont le pays a besoin pour améliorer son potentiel de croissance.


Le secteur éducatif va de mal en pis, quelles seront vos mesures pour lui redonner ses lettres de noblesse ? Et pour le secteur sanitaire ?



En matière d’éducation notre objectif est de promouvoir l’école publique afin de généraliser le droit à une éducation scolaire et citoyenne inclusive de qualité. Il s’agira de généraliser l’accès au préélémentaire dans les établissements scolaires publics, intégrer le patrimoine et l’histoire des Comores dans les curricula d’enseignement et de formation, initier la diversification de l’offre de formations techniques et professionnelles répondant aux besoins de développement du pays. J’envisage aussi d’expérimenter un dispositif pilote de formation professionnelle par l’apprentissage en partenariat avec des ateliers de travail du secteur «informel» et d’encourager l’éducation populaire intégrant l’alphabétisation au Shikomori. J’ai l’ambition de rétablir, l’autonomie administrative et financière de l’Université des Comores sur la base d’un plan de développement quinquennal avec l’Etat et enfin, mettre en place des pôles de formation d’excellence en rapport avec les besoins du pays en matière de développement économique et socio-culturel.

Dans le secteur de la Santé, l’on va promouvoir le système de santé publique afin de faciliter l’accès à des soins de qualité au plus grand nombre. La priorité sera de renforcer la gouvernance et le leadership du secteur de la santé; améliorer le fonctionnement et l’organisation des hôpitaux en vue notamment d’assurer l’équité dans l’accès aux services de santé pour les populations vulnérables et défavorisées ; renforcer le système de santé communautaire ; mettre en place un mécanisme de financements innovants et assurer la prise en charge des soins d’urgence sans paiement préalable. La santé concerne aussi la protection sociale des populations vulnérables, notamment la prise en charge des malades mentaux et le développement de mécanismes de solidarité en vue de faciliter l’accès de ces populations aux soins.


En matière d’économie, qu’envisagez-vous comme projets pour rehausser la croissance et résorber le chômage des jeunes ?



Les réformes économiques ainsi que la lutte contre le chômage des jeunes et la promotion du travail des femmes constituent respectivement les engagements numéros 3 et 6 de mon programme. En ce qui concerne l’économie, il s’agira d’établir les bases d’une économie tournée vers les objectifs de satisfaction des besoins de vie de la population et de sauvegarde de l’environnement. Nous focaliserons nos efforts sur la promotion de l’agriculture avec l’établissement des bases d’une révolution verte via notamment la sécurisation du foncier, le renforcement des capacités des coopératives et organisations agricoles et la facilitation de l’accès aux financements et marchés nationaux et internationaux. Il faudra améliorer le circuit d’approvisionnement et de commercialisation pour faciliter l’acquisition des intrants agricoles et l’écoulement des produits, promouvoir les chaînes de valeur par le développement des techniques de transformation et de conservation des produits agricoles.
Je mettrai aussi l’accent sur le développement de l’élevage et la modernisation du secteur de la pêche. Il faut une gestion pérenne de la rente halieutique à travers la professionnalisation du secteur, l’amélioration de la gestion des infrastructures notamment les quais, bateaux, centre de conservation et de transformation et enfin la mise-en place d’un dispositif de sécurité en mer.  Les infrastructures touristiques doivent être aussi développées. Pour ce qui est du chômage, je m’engage une fois élu, à mener une politique de lutte contre le chômage des jeunes et promouvoir le travail des femmes en valorisant le travail pour le développement. Il s’agira de développer une politique économique et sociale de proximité à travers les communes, encourager les ménages à se doter d’activités productrices de revenus capables de satisfaire leurs besoins de consommation courants. En contrepartie, l’Etat, à travers les collectivités territoriales, garantira l’assistance nécessaire pour faciliter les conditions de travail, améliorer la productivité, la mise en place de moyens de stockage et d’un circuit de commercialisation; développer l’investissement de l’Etat pour octroyer aux ménages des moyens pour améliorer les cadres de vie; augmenter la production et gérer en toute autonomie leurs propres affaires.


Quelle sera votre politique pour le retour de l’île comorienne de Mayotte et qu’en sera-t-il de la coopération internationale?



Le retour de Mayotte est une condition déterminante pour le renforcement de l’unité nationale. Il faut faire de Mayotte une cause nationale impliquant l’Etat, les partis politiques et les organisations de la société civile et surtout impliquer les Comoriens de Mayotte dans le fonctionnement des institutions de l’Etat. En matière de politique étrangère, nous allons faire des alliances stratégiques pour le développement, la souveraineté et l’intégrité territoriale. Pour cela, nous allons restructurer la représentation diplomatique et prioriser le développement de la coopération régionale africaine et Océan Indien ; renforcer et rétablir la coopération avec les pays amis de longue date et remettre au centre de notre diplomatie la recherche des solutions pour mettre fin à l’occupation de l’île comorienne de Mayotte.

Propos recueillis par
Al-watwan

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