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Mayotte / Une reprise des reconduites qui viole la note du 21 mars

Mayotte / Une reprise des reconduites qui viole la note du 21 mars

Mayotte | -   Sardou Moussa

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Certains Comoriens sont refoulés de force et embarqués à bord des bateaux depuis l’île comorienne de Mayotte. D’autres arrivent de leur propre gré. La reprise des reconduites se fait en violation de la nouvelle constitution comorienne adoptée le 30 juillet qui, dans son article 23, indique « qu’aucun Comorien ne peut être extradé ou expulsé de son pays ».

 

Vendredi dernier, au cours d’un entretien avec le journaliste Serge Massau de Radio France, Gérard Collomb, le ministre français de l’Intérieur, a donné deux informations importantes au sujet des reconduites à Ndzuani des comoriens considérés par les autorités françaises comme étant en situation irrégulière dans l’île comorienne qu’elles continuent d’occuper, Mayotte. Selon lui, le gouvernement comorien aurait accepté d’accueillir les refoulés de Mayotte, et c’est d’ailleurs déjà le cas, même si c’est encore au compte-goutte.

«Nous avons travaillé avec le gouvernement des Comores, et comme le président des Comores a été réélu avec une grande majorité [c’est la nouvelle Constitution comorienne qui a été plébiscitée le 30 juillet 2018, et non pas le président Azali qui a été réélu, Ndlr], nous lui avons dit qu’effectivement il fallait qu’il permette des rapatriements de migrants irréguliers. Et c’est ce qu’ils ont commencé à faire», a-t-il affirmé. Et d’ajouter après que son gouvernement allait s’équiper de vedettes dès ce mois de septembre, «pour pouvoir mieux mener la lutte contre l’immigration irrégulière».

La reprise des reconduites se fait en violation de la nouvelle constitution comorienne adoptée le 30 juillet qui, dans son article 23, indique « qu’aucun Comorien ne peut être extradé ou expulsé de son pays ». Les propos tenus par Gérard Collomb sont à prendre avec des pincettes car, à Moroni, les autorités comoriennes campent sur leur position et que la note du 21 mars n’est toujours pas levée.

«La note du 21 mars reste toujours en vigueur. Il n’a jamais été question d’un éventuel accord pour légitimer les reconduites à Anjouan. Les propos du ministre Collomb n’engagent que lui. Les Comoriens sont chez eux sur les quatre îles », indique une source du ministère comorien des Affaires étrangères.

En réalité, cette reprise en sourdine des reconduites, sans une levée officielle de la mesure de leur suspension prise en mars dernier par le ministère comorien des Transports, est un secret de Polichinelle. Et elle ne date pas de deux semaines. Rappelons en effet que le 26 mars, soit moins d’une semaine après la publication le 21 du même mois de la fameuse note circulaire du ministère des Transports, une soixantaine de refoulés «volontaires», dit-on, avaient été embarqués à Mayotte, à bord d’un appareil de la compagnie Ewa Air, à destination de Ndzuani.

Ce qui s’était apparenté à une dérogation, se répétera encore plus tard, le 13 avril. Cinquante autres personnes ont été reconduites à bord d’un des bateaux de la Société générale des transports maritimes (Sgtm), et ont été débarqués au port de Mutsamudu, en présence du consul de France à Ndzuani. A en croire les témoignages concordants d’un officier de la capitainerie du port de Mutsamudu, interrogé le dimanche dernier, et d’un des commandants de bord de Sgtm, questionné à ce même sujet quelques jours avant, ces reconduites n’avaient pas depuis cessé.

 


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«Cela fait quatre mois que ces reconduites se font de façon régulière, mais en petite quantité et en cachette. Cette semaine même il y en a eues. Une fois, au mois de ramadan, le bateau est même arrivé à 19 heures, alors qu’il est censé être là au plus tard à 17 heures 30. De même, au début, notre capitainerie ne pouvait même pas mettre la main sur la deuxième liste des passagers, qui est celle des refoulés, mais maintenant on nous la communique», a-t-on confié à Alwatwan, sous anonymat.

Les gouvernements comorien et français se sont engagés à poursuivre les discussions en vue de trouver des solutions aux problématiques posées par l’occupation de Mayotte y compris ces déplacements forcés des citoyens des trois autres îles dans l’île comorienne.

 

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