Aujourd’hui encore, certaines personnes n’hésitent pas à dissocier le président actuel, des décisions de ses ministres. Aussi faut-il toujours rappeler avec force que dans notre système institutionnel, la responsabilité de la politique menée par l’exécutif est exclusive. Elle incombe au Président de l’Union des Comores. Autant, la Constitution réserve au chef de l’État des pouvoirs insondables, autant les autres ne sauraient en répondre à sa place.
D’abord, en plus d’être le chef de l’État, le président de l’Union est, également, le chef du gouvernement. Celui-ci,dans son ensemble, se confond presque dans sa personne. D’ailleurs, la loi fondamentale est limpide :
le Président de l’Union détermine et conduit la politique de la nation.
Et pour ce faire, la Constitution lui octroie, à l’exclusion de toute autre autorité, des prérogatives importantes. Le président dispose à lui tout seul de l’administration de l’Union. Il est, seul, détenteur du pouvoir réglementaire.
Le président est, seul, chef des armées. Il est le seul à nommer aux emplois civils et militaire. Le président a, seul, le droit de faire grâce. Il a l’initiative des lois, y compris celle de la loi de finances. Seul, il peut légiférer par ordonnance, c’est-à-dire en lieu et place du parlement.
Et si malheur prenait à l’Assemblée de s’éloigner de sa ligne politique que le président, seul, pourrait abattre sur elle le châtiment de la dissolution. Le Président, seul, nomme les ministres. Seul, il peut les révoquer. Le Président seul est maître de la politique étrangère, celle de nos alliances. Et auprès de lui, seul, sont accrédités les plénipotentiaires.
Seul, encore seul, et toujours seul ! Parce que le pouvoir exécutif aux Comores est monocéphale. Il y a qu’une autorité qui en est titulaire : le président de l’Union. À partir de là, la logique juridique, voire la logique tout court, devient implacable. Si l’on est celui qui détient un pouvoir, on est celui qui en répond de son exercice. Aurions-nous presque envie de rajouter une énième fois : seul !
Ainsi, le Président de l’Union ne peut s’abriter derrière ses ministres puisque la Constitution ne leur reconnaît aucune espèce de pouvoir d’initiative ou de décision. Les ministres ne sont que des préposés, des collaborateurs à qui l’on délègue la conduite d’une politique déterminée par le chef de l’Etat.
Tout ce qu’ils ordonnent est d’emblée affecté d’une paternité certaine, celle du Président. Sauf bien entendu lorsque l’acte du ministre est dissociable de l’exercice normal de ses fonctions. Un membre du gouvernement qui ordonnerait un meurtre ne saurait associer le chef de l’État à sa forfaiture. Évidemment !
Toujours est-il qu’en faisant du président de l’Union celui qui détermine la politique de la nation, la Constitution met à sa charge une présomption impossible à renverser : nul président n’est censé ignorer la politique menée par l’exécutif.
La proximité de cette présomption avec la maxime juridique selon laquelle nul n’est censé ignorer la loi emporte les mêmes conséquences. Aussi bien que le citoyen lambda ne saurait exciper de son ignorance de la règle pour excuser sa faute, le président ne saurait, jamais, se prévaloir de l’ignorance d’une politique car la constitution en fait la sienne. Les juristes le savent bien, le commettant est responsable des faits de son préposé.
Au final, le président de l’Union, ce sultan républicain dont nous avons, dans une ancienne chronique déjà, fait le portrait, est un super-héros (à moins qu’il ne soit un super-vilain). La Constitution lui greffe alors des superpouvoirs.
Et comme la sagesse geek peut parfois être plus éloquents que bons nombres de locutions juridiques, alors aux anciens, à l’actuel, comme aux futurs locataires de Beit Salam, passez-leur ces mots : “un grand pouvoir implique de grandes responsabilités”.
Mohamed Rafsandjani