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Climat politique aux Comores / La double tâche délicate de Ramtane Lamamra

Climat politique aux Comores / La double tâche délicate de Ramtane Lamamra

Politique | -

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L’ancien ministre algérien des Affaires étrangères est arrivé samedi à Moroni. L’Emissaire spécial de l’UA a entamé depuis dimanche ses contacts avec les parties comoriennes, selon une source du ministère comorien des Affaires étrangères (lire plus haut). Le diplomate africain arrive aux Comores alors que le pays traverse une crise politique tendue caractérisée par des divergences de vue entre pouvoir et opposition autour des recommandations issues des Assises nationales du mois de février 2018.


Ramtane Lamamra aura la délicate tâche d’apaiser les tensions, d’une part, et ramener, d’autre part, les deux parties à la table des discussions sur les principaux sujets qui les divisent, à savoir, la mise en œuvre des recommandations issues des Assises nationales, le projet de référendum constitutionnel, le respect des libertés individuelles et collectives ainsi que la question de la Cour constitutionnelle.  


Le climat politique s’est dégradé aux Comores depuis que les autorités ont décidé de mettre en œuvre certaines recommandations arrêtées à l’issue des travaux des Assises nationales censées faire le bilan des quarante deux années d’indépendance et tracer les perspectives du pays en matière de développement socio-économique.
Le gouvernement souhaite traduire en actes «les recommandations capitales» des Assises et engager le pays dans «une voie de transformations des mœurs politiques», selon le président de la République. Ce dernier a réitéré sa détermination à poursuivre le cap des réformes.


Le chef de l’Etat a appelé solennellement à un référendum, le 30 juillet prochain, en vue de la révision de la constitution, la première étape. Pour le pouvoir, le référendum «est une suite logique des Assises nationales» «qui ont eu l’assentiment de la communauté internationale». Le président dit vouloir mettre son mandat en jeu. Il annonce alors une élection présidentielle anticipée courant 2019. La réforme constitutionnelle vise, selon le pouvoir, à réduire le train de vie de l’Etat, consolider la stabilité des institutions, unifier l’administration et réaffirmer l’Unité nationale menacée par le communautarisme et les tentations insulaires. Il est question de la suppression des postes de vice-présidents et une refonte de la présidence tournante. Mais l’opposition ne voit pas tout cela d’un bon œil.


Le gouverneur de l’île de Ndzuwani est monté au créneau et s’est opposé, en premier, à l’idée d’un référendum, estimant que la démarche allait sonner «la mort» de la présidence tournante et rompre le cycle des tours avec, «au fond, une remise à plat des acquis de la Constitution de 2001», d’après des courriers officiels adressés à l’Union africaine en novembre 2017. Pour lui, la tournante est «l’unique garantie de la stabilité du pays et de la cohésion car elle offre aux Comoriens de toutes les îles l’égalité des chances dans l’accès à la magistrature suprême du pays». Une position soutenue par l’Alliance de l’opposition et certains élus de l’île de Mwali qui voient  dans le projet du référendum «une manœuvre pour  tordre le cou à la tournante et à l’autonomie des îles, principaux acquis de l’Accord de Fomboni du 17 février 2001».


L’opposition, qui avait boycotté les Assises, ne reconnait pas «leur caractère inclusif», dénonçant «une initiative guidée par le seul souci de permettre à l’actuel chef de l’Etat de renouveler son mandat autant qu’il le voudra», selon un communiqué rendu public en février.


Le 12 avril, le chef de l’Etat signe la décision N°18-020-PR, transférant «provisoirement» les compétences de la Cour constitutionnelle à la Cour suprême. Le pouvoir justifie sa décision par «le nombre incomplet des juges composant la Cour» et «l’impossibilité d’assurer son fonctionnement» conformément aux dispositions constitutionnelles en vigueur.


Mais l’opposition a qualifié cette décision de «coup d’Etat constitutionnel «, dénonçant, «des manœuvres pour donner les mains libres au chef de l’Etat de contrôler à sa guise le processus du référendum». La mise en veilleuse de la Cour constitutionnelle, dénoncée par la société civile, et les interdictions quasi-systématiques des manifestations politiques de l’opposition ont contribué à la dégradation du climat politique.


A cinq jours de l’ouverture de la campagne du référendum, le plus Haut Représentant de l’Union africaine saura-t-il ramener toutes les parties à la discussion et arracher des compromis? Ramtane Lamamra a été le médiateur de la crise malgache qui s’est soldée, au final, par un consensus national.


A.S. Kemba

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