Quelques jours après la déclaration d’indépendance des Comores le 6 juillet 1975 par le président Ahmed Abdallah Abderemane, un coup d’Etat, mené le 3 août 1975, renverse le père de l’indépendance et porte le président Ali Soilih au pouvoir. Le nouvel homme fort met en place un régime révolutionnaire. La première Constitution des Comores fut adoptée en avril 1977. Celle-ci érige le jeune Etat en une «République démocratique laïque et sociale» (article premier). L’architecture institutionnelle, durant la révolution, était faite de sorte à ce que les institutions politiques reflètent la réalité comorienne pour rompre définitivement avec le modèle institutionnel de l’ancienne puissance coloniale. Les instances du pouvoir étaient hétéroclites. Le territoire national était divisé en Wilaya qui comprenait des Bavu (régions, subdivisées en Mudriya). Le Congrès national était l’instance suprême du pouvoir populaire. Il représentait en quelque sorte «le Parlement de la révolution» avec quelques prérogatives non négligeables.
La Conférence nationale de 1992
Constitué des délégués des Mudiriya qui représentaient les comités populaires de base, la loi fondamentale dotait le Congrès national de certains pouvoirs comme la proposition des candidats aux postes de président et de vice-président du Conseil d’Etat (le pouvoir exécutif). Dans les dispositions transitoires de cette première constitution, il était prévu que «jusqu’à la libération de l’Ile comorienne de Mayotte, le président et le vice-président sont élus par le Congrès» (article 46). Mais cette constitution n’aura pas eu le privilège de faire ses preuves car le renversement et l’assassinat du leader de la révolution le 13 mai 1978, par les mercenaires conduits par Bob Denard, qui reconduit le président Abdallah au pouvoir, sonnera la fin de la révolution et de la première constitution. La deuxième constitution des Comores est adoptée par référendum le 1er octobre 1978. L’archipel des Comores devient une République de type fédéral à caractère islamique. Sur le plan institutionnel, beaucoup de modifications ont été enregistrées. L’Etat s’est modernisé du moins sur le plan de la dénomination des institutions politiques. Le premier parlement fédéral était élu pour un mandat de cinq ans au suffrage universel direct. Le premier président de la première Assemblée démocratique fut Mohamed Taki Abdoulkarim (voir tableau).
Un gouvernement responsable devant le parlement
La particularité du pays (son insularité notamment) a indubitablement inspiré le constituant de cette deuxième loi fondamentale et l’a poussé à accorder aux îles, une représentation majeure dans la vie parlementaire. En effet, le texte prévoyait des modes de contestation suffisamment rodées au profit des îles. Mais aussi des alternatives pour contenir les ardeurs des députés représentant les îles à l’Assemblée fédérale. Concrètement, les députés d’une Ile, avaient la capacité de demander une deuxième lecture d’une loi votée, une deuxième lecture aux allures d’un avis conforme car, le président pouvait être amené à ne pas promulguer une loi contestée par ces députés venant d’une île. Dans les faits, «en cas de contestation d’une disposition législative fédérale par la majorité des députés d’une Ile dans les quatre jours de son adoption, cette disposition fait l’objet d’une nouvelle lecture. Si, après cette nouvelle lecture, l’assemblée l’adopte sans qu’elle ait recueilli les voix de la majorité des députés de l’ile concernée, le président de la République peut refuser de la promulguée» (article 28, alinéa 5). Cette deuxième constitution sera révisée en 1982 par la loi 82-018/PR par l’Assemblée Fédérale et les Conseils des Iles réunis en Congrès le 24 octobre 1982, et en 1985 par ce même congrès qui s’est réuni le 31 décembre 1984 par la loi 85-001/PR sans bouleversement de la structure parlementaire.
L’assassinat du président Abdallah le 26 novembre 1989 propulse le président Djohar au pouvoir qui, dans les tumultes qui bouleverseront sa présidence, conduira l’Etat vers la démocratie et le multipartisme. Ce dynamisme entrainera des changements institutionnels majeurs. Une nouvelle constitution sera élaborée par une Conférence nationale, réunie du 24 janvier au 8 avril 1992 et sera adoptée par référendum le 7 juin 1992. La nouvelle Constitution apporte certaines nouveautés de taille. Pour la première fois, la Constitution avait mis en place un parlement bicaméral. A la base, on trouve l’Assemblée fédérale qui représente les citoyens, chargée d’adopter les lois et de contrôler l’action du gouvernement. Un Sénat faisait office de Chambre haute, représentant les Iles autonomes à raison de cinq sénateurs par Ile. Pour la première fois, la nouvelle constitution prévoyait la représentation de la communauté comorienne à l’étranger à l’Assemblée fédérale (article 39 alinéa 6).
La Troisième République
Le président de l’Assemblée Fédérale n’était plus inamovible durant toute la législature. Il pouvait engager sa responsabilité en demandant une motion de défiance qui pouvait lui pousser à remettre sa démission si les députés l’adoptait (article 41 alinéa 1). Les Iles disposaient toujours des moyens d’action forts sur tous les plans avec quelques réaménagements. Selon l’article 44 alinéa 5 de la constitution de «La Troisième République» naissante, «en cas de contestation écrite et motivée d’une ou de certaines dispositions d’une loi par le président du conseil d’une ile dans les quinze jours de son adoption, cette disposition ou ces dispositions fait ou font l’objet d’une nouvelle lecture. Si après cette nouvelle lecture l’Assemblée fédérale l’adopte, le président de la République peut, après consultation du président du conseil ou des conseils des iles, décider de la promulguer». Cette nouvelle Constitution ayant instauré un régime mixte, a aussi inauguré un régime présidentiel de collaboration des pouvoirs. En effet, les membres du gouvernement avaient accès à l’Assemblée fédérale. Ils étaient entendus quand ils le demandaient et ils pouvaient se faire assister par des techniciens. Ils étaient également entendus à la demande des députés, soit en commission, soit en plénière pour rendre des comptes.
Des commissions d’enquête
Cette nouvelle loi fondamentale dotait aussi le parlement d’un certain nombre de compétences, surtout en matière de défense. Le président de l’Assemblée fédérale avait, par exemple, un avis à donner en cas d’éventuel déploiement des forces armées. De surcroît, en cas de nécessité, le pouvoir de décréter l’état de siège appartenait à l’exécutif mais sa prorogation au-delà de douze jours n’allait pouvoir être autorisée que sur habilitation de l’Assemblée fédérale (article 51). L’Assemblée était aussi investie d’un pouvoir de contrôle sur l’action de l’exécutif. Pour se faire, elle disposait aux moyens de l’article 52, de la question écrite, de la question orale, des commissions d’enquête, de la ratification des ordonnances ainsi que les possibilités de remettre en cause l’action de l’Exécutif à travers une motion de censure. L’article 38 alinéa 2 disposait qu’«il est mis fin collectivement à leur fonction (les membres du gouvernement) si l’Assemblée fédérale met en cause leur responsabilité par l’adoption d’une motion de censure, déposée par le quart au moins des députés et votées à la majorité absolue des membres qui composent cette Assemblée».
Les Sénateurs, quant à eux, selon toujours cette Constitution de 1992, étaient «élus pour un mandat de six ans au scrutin proportionnel par un collège électoral composé des conseillers municipaux et des conseillers des îles» (article 55). Le Sénat était chargé d’examiner et d’approuver les lois adoptées par l’Assemblée fédérale et les autres actes des députés. En cas de rejet par le Sénat d’une loi ou un acte entériné par les députés, une deuxième lecture était obligatoire. Si après cette deuxième lecture le Sénat oppose un rejet, le gouvernement retire le texte ou l’adopte en engageant sa responsabilité.
Une motion de censure
Seulement, cette deuxième chambre n’a eu qu’une existence virtuelle, car dans les faits, elle n’a jamais été mise en place.
En 1996, sous le régime de Mohamed Taki Abdoulkarim, les confusions et les troubles politiques, nourris par le séparatisme, poussent le président à prendre l’initiative de réviser la constitution. Cet amendement, approuvé par référendum le 20 octobre 1996, a un peu renforcé les pouvoirs du parlement surtout en matière de contrôle sur l’action du gouvernement. Après cette révision, l’Assemblée fédérale avait la faculté de mettre fin, de façon collective aux fonctions des membres du gouvernement, si elle adopte une motion de censure déposée par le quart au moins des députés et votée à la majorité absolue des membres qui composent cette Assemblée (article 20).
L’article 44 de la Constitution, révisée quant à lui, prévoyait aussi que «l’Assemblée fédérale et ses commissions par l’intermédiaire de leurs présidents respectifs, peuvent à leur demande, obtenir du gouvernement, de ses départements et de toutes les autorités de l’Etat, les informations qu’elles souhaitent». Les membres du gouvernement pouvaient également être entendus à la demande des députés, soit en commission, soit en séance plénière. Les îles autonomes retrouvaient aussi leur force de frappe sous l’empire de la Constitution de 1978. Selon l’article 37 alinéa 3, « en cas de contestation d’une disposition législative par l’ensemble des Députés d’une île dans les quinze jours de son adoption, cette disposition fait l’objet d’une nouvelle lecture. Si après cette nouvelle lecture, l’Assemblée fédérale l’adopte sans qu’elle ait recueilli les voix des députés de l’île concernée, le président de la République peut refuser de la promulguer». Cet amendement constitutionnel a supprimé le Sénat et le parlement est redevenu monocaméral.
La mort du président Taki et ses conséquences
Dans la nuit du 6 novembre 1998, le président Mohamed Taki Abdoulkarim décède mystérieusement. Et comme cela a été prévu par la Constitution pour assurer la continuité du gouvernement fédéral, le premier ministre Tadjidine Ben Massound assure l’intérim. Le pouvoir intérimaire durera cinq mois. Le 30 avril 1999, sur fond de crise séparatiste, l’armée avec à sa tête le colonel Azali Assoumani, renverse le président par intérim et s’accapare du pouvoir pour, selon l’argument principal, «sauver le pays du chaos». La Constitution fut abrogée et remplacée par une Charte constitutionnelle adoptée à Beit-Salam le 6 mai 1999. Dans le sillage de cette nouvelle donne, le nouveau processus de réconciliation nationale engagé, aboutit aux accords de Fomboni du 17 février 2001 qui viennent mettre un terme à la sécession. Ces accords ont débouché sur un référendum constitutionnel organisé le 23 décembre 2001 et qui permet l’adoption d’une nouvelle loi fondamentale, instituant un Nouvel ensemble comorien (Nec) et donne naissance à l’Union des Comores.
Cette nouvelle Constitution est conçue pour équilibrer le pouvoir politique entre l’Union et les îles. Elle met en place le système de la présidence tournante et la création d’une Cour constitutionnelle chargée d’arbitrer les conflits entre les institutions gouvernantes et entre les îles elles-mêmes. Quant à la représentation nationale, elle prend l’appellation d’Assemblée de l’Union et hérite d’un mandat de cinq ans. Bien qu’elle demeure un parlement monocaméral, elle est composée de deux corps de députés dont l’un représente les citoyens et l’autre représente les structures fédérées (îles autonomes). Elle est composée de 33 représentants à raison de cinq députés par île autonome et de dix-huit législateurs élus au suffrage universel direct représentant les citoyens dans le cadre d’un scrutin uninominal à deux tours (article 20).
La Constitution de décembre 2001
Cette Constitution du 23 décembre 2001 sera révisée par la loi référendaire du 17 mai 2009 et renforcera un peu plus les pouvoirs du parlement. L’Assemblée, organe législatif, est chargé comme à l’accoutumée du vote les lois, y compris les lois de règlement, d’adopter le budget mais plus important encore, de contrôler l’action des ministres et des autres membres du gouvernement. Sa composition reste le même en termes de nombre mais avec quelques réaménagements. Vingt-quatre représentants de la Nation sont, désormais, élus au suffrage universel dans le cadre d’un scrutin majoritaire uninominal à deux tours et les îles autonomes désignent à travers leurs Conseils insulaires respectifs, trois conseillers insulaires par île autonome, qui seront ensuite cooptés à l’Assemblée de l’Union pour devenir des députés de la Nation et portent avec les représentants élus dans les circonscriptions, le titre de députés de l’Union pour un an.
En matière de contrôle de l’action du gouvernement, en vertu de l’article 33 de la Constitution, le parlement avait le pouvoir d’exiger au président de l’Union, la révocation d’un ministre ou un quelconque membre du gouvernement. En fait, «l’Assemblée de l’Union met en cause la responsabilité d’un ou plusieurs ministres ou d’autres membres du gouvernement par l’adresse au président de l’Union d’une pétition. Une telle pétition n’est recevable que si elle est signée par un tiers au moins des membres de l’Assemblée de l’Union […] Le président est tenu de mettre fin aux fonctions d’un ou plusieurs ministres, autres membres du gouvernement visés par la pétition. Il ne peut le/les nommer, à nouveau à des fonctions ministérielles, dans les six mois suivant la date de leur limogeage » (Art 33). Cette possibilité de demander la révocation d’un ministre ne sera jamais véritablement appliquée par les députés durant neuf ans de ce régime de contrôle. Des démarches avaient, parfois, été engagées mais vite noyées par l’Exécutif. Une nouvelle révision de la Constitution interviendra le 30 juillet 2018, et l’Assemblée de l’Union sera plus impactée par ce nouveau changement.
Les pouvoirs de l’Assemblée de l’Union
La révision du 30 juillet, initiée par le chef de l’Etat dans un but de redonner à l’Etat comorien «une Constitution répondant aux besoins de la population» a, d’un côté, fragilisé les pouvoirs de l’Assemblée de l’Union. L’article 69 de la constitution amendée, dans le but «de lutter contre le nomadisme politique», prévoit que «tout député qui, en cours de mandat, démissionne de son parti ou change de formation politique perd automatiquement son siège à l’Assemblée de l’Union. Il est remplacé par son suppléant qui achève le mandat» (Art 69). Cette disposition inaugure, en quelque sorte, «une dictature légale» car tout citoyen voulant prendre part à la vie publique, doit obligatoirement être membre d’une formation politique et entre en contradiction avec le principe de nullité des mandats impératifs prévu par l’article 68 alinéa 2. A la lecture de cet article, il est clair que les candidatures des indépendants ne sont plus les bienvenus. Si le président de l’Assemblée est élu pour toute la législature (article 75), c’est le retour du caractère «amovible» du mandat du chef du parlement jusqu’ici épargné par toute éventuelle éjection.
En fait, le président de l’Assemblée de l’Union pourrait perdre son siège en cas d’une motion de défiance entérinée par les députés. Celle-ci se concrétise par la formulation d’une demande signée par au moins la moitié des députés à l’Assemblée. Un vote a lieu 48h après le dépôt de la motion et elle est adoptée par la majorité de deux-tiers des députés composant le parlement. Si cette motion aboutit, l’intérim sera assuré par le premier vice-président qui sera chargé d’organiser l’élection du nouveau président de l’Assemblée dans les quinze jours suivant l’adoption de la motion.
Si l’initiative de la loi appartient concurremment au président de l’Union et les députés, la Constitution révisée hiérarchise les institutions et place l’exécutif au-dessus du législatif en violation du principe de la séparation des pouvoirs. Si par coutume, les députés n’ont pas la possibilité de voter une proposition de loi si elle a pour conséquence, la diminution des ressources publiques ou l’aggravation des charges de l’Etat, la nouvelle version impose en plus, «des griefs» limitant les pouvoirs du parlement. Désormais, les propositions de loi, ne sont plus recevables si au préalable elles ne sont pas communiquées au gouvernement avant leur inscription à l’ordre du jour (articles 83 et 84). En plus, désormais tous les textes de nature législative intervenus avant ou après cette révision, dans les matières qui ne sont plus du domaine de la loi, peuvent être modifiés ou abrogés par décret présidentiel. On s’aperçoit que la Constitution va intervenir sur des matières intervenues avant son entrée en vigueur. Ceci entre en contradiction avec le principe de non rétroactivité de la loi.
Une fragilisation du parlement
Démocratiquement, le pouvoir législatif contrôle le gouvernement pour équilibrer le principe de séparation des pouvoirs. L’ancienne version de la Constitution avait prévu de façon réciproque, des moyens de contrôle des institutions. L’art 33 donnait la faculté aux députés de pouvoir mettre en cause la responsabilité des ministres par une pétition adressée au président et contraindre ce dernier à les révoquer. Aujourd’hui, ce pouvoir n’appartient plus à l’Assemblée et elle ne peut plus révoquer un ministre dont l’action est remise en cause. Mais on remarque aussi, que le président ne peut plus dissoudre le parlement comme l’article 12 alinéa 1 de la version précédente de la Constitution le prévoyait. Cette technique qui protège le gouvernement d’être renversé par le parlement et ce dernier de ne pas se retrouver sous la menace d’une dissolution, est un principe phare du régime présidentiel. Mais ceci aurait été complet si le parlement était libre pleinement d’adopter les lois sans calculs politiques.
Mais cette fragilisation du parlement, n’est-ce pas un résultat lié à son inertie historique ? Durant 42 ans d’indépendance, les marges de manœuvres du parlement étaient bien limitées pour pouvoir jouer véritablement son rôle de contre-pouvoir vis-à-vis de l’exécutif. En effet, combien de fois des situations de nature politique, étaient susceptibles d’être réglées par voie parlementaire et ainsi confirmer l’autorité du pouvoir législatif ? La récente décision du président de l’Union, de transférer provisoirement, les compétences de la Cour constitutionnelle à la Cour suprême a poussé les députés à choisir des voies de réponse les plus étonnantes.
La voie constitutionnelle
En fait, en vertu de la loi fondamentale pas encore révisée, les députés auraient pu annuler la décision du président en votant contre elle à une majorité de deux tiers de ses membres (article 12-3). Au lieu de suivre la voie constitutionnelle, les députés de l’opposition ont préféré jouer la carte des manifestations. On peut aussi ajouter que durant toute son existence, l’Assemblée n’a jamais poussé un gouvernement à la sortie. Autre fait, et cela est commun presque dans tous les pays en transition démocratique, où les Assemblées ont réussi à se faire le surnom de chambre d’enregistrement, le rôle du législatif consiste dans les faits, à adopter des lois d’initiative gouvernementale. En général, les projets de loi représentent en majorité les lois votées à l’Assemblée par an contrairement aux propositions de loi. Si le parlement veut renforcer ses pouvoirs, les députés doivent faire usage des pouvoirs qui leurs sont conférés par la Constitution. Les députés doivent s’affirmer dans la vie politique de la nation et non faire de la figuration dans l’ombre de l’Exécutif. Toute une Nation souhaite être représentée de la façon la plus complète qui soit et ce rôle incombe indubitablement aux représentants de la Nation.
Oussoufa Abdou El Madjid