logo Al-Watwan

Le premier journal des Comores

Commission mixte franco-comorienne : La limite à ne pas franchir

Commission mixte franco-comorienne : La limite à ne pas franchir

Politique | -   Ahmed Ali Amir

image article une
Avec les toutes nouvelles autorités installées à Paris, il est possible de remettre tout à plat et de redéfinir de nouvelles relations qui rendraient aux Comores leur dignité et à la France sa place d’un grand pays respectueux du droit international. Encore faut-il qu’il n’y ait plus place aux atermoiements, aux incertitudes et que chaque membre de la délégation comorienne soit rompu aux négociations et exempt de toute attitude de compromission.

 

Entre les Comores et la France existe ce litige territorial sur l’île de Mayotte. La France choisit délibérément, sur cette partie du monde, de fouler aux pieds toutes les résolutions des Nations unies exigeant au pays des droits de l’homme de restituer le territoire à l’ensemble comorien.

Dans cette partie du monde, la France refuse de se soumettre à la résolution de l’Onu condamnant le référendum tenu dans l’île et toutes les consultations ultérieures, comme la dernière en date sur la “départementalisation”. Si l’Union des Comores continue à revendiquer sa souveraineté sur Mayotte annexée par la France, les deux pays restent, paradoxalement, des partenaires privilégiés.

Cette séparation forcée a produit des conséquences désastreuses, la première étant la fuite en avant des hauts responsables de l’île de Mayotte. Les élus locaux continuent à faire croire que s’ancrer davantage dans la République française et dans l’Union européenne réduira définitivement les chances des Comores de recouvrer leur unité et leur intégrité historique. Conséquence : la population subit des lois françaises qui entrainent un déracinement culturel, appauvrissent les Mahorais et les dépossèdent de la terre de leurs ancêtres.

Vers les autres îles, Mayotte distille des rêves d’Eldorado, de soins de santé et d’emplois. Les effets, on les vit d’une manière dramatique avec des milliers de morts dans la traversée maritime, des expulsions dont les chiffres dépassent l’ensemble des expulsions de la France et, enfin, des centaines d’enfants séparés de leurs parents expulsés et qui se retrouvent à errer dans les rues de Mamudzu.

Malgré les vives tensions, une injustice s’est instaurée. La France, une des toutes plus grandes puissances mondiales qui, en outre, détient un droit de véto à l’Onu, est parvenue à convaincre les Comores de ne plus soumettre à l’Onu une résolution la condamnant, et de privilégier des pourparlers bilatéraux. Les Comores s’inclinent et ouvrent des négociations dans le cadre d’une Commission, puis d’un Groupe de travail de haut niveau (Gthn) et enfin du Haut conseil paritaire (Hcp).

 

“Refonder la relation bilatérale”

Dans ces circonstances, l’ultime humiliation dans les négociations ouvertes à Moroni serait d’admettre que Mayotte, en tant qu’entité, ou des élus mahorais, qui représenteraient un quelconque fonds, viennent pavoiser avec la prétention “d’appuyer les Comores pour se développer”. Cela nous induirait à commettre une erreur politique historique : celle de la reconnaissance d’une Mayotte française.

Si la déclaration finale issue de la 6ème Commission mixte France-Comores tenue les 15 et 16 décembre derniers, à l’exception du terme “des populations” – qu’il faudra, à l’avenir, bannir – respecte les formes et veille à ne pas franchir le Rubicon de la reconnaissance de la séparation de l’île de l’ensemble comorien, cette attitude doit se refléter sur tout le processus des négociations de cette commission mixte qui n’est, rien d’autre, qu’une simple commission technique dont l’unique mission est de parler de coopération et de retenir des projets à financer par la France.

La fausse note dans cette rencontre a été la lecture imprévue d’une déclaration non signée et lue par la partie comorienne et qui relate une rencontre “entre le gouvernement comorien et les élus de Mayotte”. Un texte distribué dont l’intention a été de faire diversion.

La “Déclaration de Paris sur l’amitié et la coopération entre la France et les Comores” signée le 21 juin 2013 entre les présidents Hollande et Ikililou Dhoinine préconise de “refonder la relation bilatérale”. Depuis, un dialogue politique renforcé a été mis en place avec la création d’un “Haut conseil paritaire” (Hcp) qui s’est déjà réuni à cinq reprises.

Le président Azali s’est rendu, le 4 octobre 2016 à Paris, pour un entretien avec le chef de l’Etat français, F. Hollande, à la veille de l’ouverture de la quatrième rencontre du Hcp. Une mission d’écoute et de dialogue de haut niveau placée sous l’égide de l’ancien ministre français, Queyranne, s’est rendue aux Comores en février de cette année 2017.

Le cinquième Hcp tenu le 12 septembre 2017 promet de renforcer le dialogue bilatéral et de parfaire la feuille de route visant à favoriser “les échanges humains entre les îles de l’Archipel, dans un cadre légal et avec plus de sécurité des liaisons maritimes et aériennes”.

 

Bannir toute compromission

Entre les Comores et la France, les échanges commerciaux sont en hausse de 25% et les transferts des Comoriens installés en France vers leur pays, qui représentent près de 23% du Produit intérieur brut, sont importants pour l’économie des ménages. Il existe entre Paris et Moroni, depuis le 27 septembre 2010, un nouvel “Accord de Partenariat de Défense” qui a pour objectif de “développer les capacités de l’armée comorienne” et prévoit un volet de “coopération dans le domaine de la sécurité maritime”.

C’est dire le profond paradoxe qui existe dans la relation entre les deux pays.

Avec la nouvelle administration Macron, il est possible de remettre tout à plat et de redéfinir de nouvelles relations qui viseraient à redonner aux Comores leur dignité et à la France la place d’un grand pays  respectueux du droit international.

Encore faut-il qu’il n’y ait plus place aux atermoiements, aux incertitudes et que chaque membre de la délégation comorienne soit rompu aux négociations et exempt de toute attitude de compromission.

 

 

Commentaires