On parle encore du dialogue entre les cinq candidats à la présidentielle et Azali Assoumani ou c’est une affaire déjà classée ?
Le dialogue n’est ni mort ni classé. Il est suspendu. On regrette le comportement du président Azali Assoumani et de ses représentants. L’initiative du dialogue émane d’eux. Elle n’a pas eu de conditions préalables. Nous avons eu deux à trois réunions sans aucune condition. Mais à notre grande surprise, lors de la quatrième réunion, ils sont venus avec des obligations. Pour eux, nous devions reconnaître la prétendue victoire d’Azali Assoumani alors que l’intéressé lui-même sait qu’il n’a pas gagné. Pourquoi faire un dialogue ? L’objet du dialogue est de clarifier la situation sur les élections et les résultats qui en ont découlé, non ? Sinon, pourquoi faire un dialogue ? Nous avons souhaité régler cette affaire de manière pacifique. (…). Je rappelle que notre stratégie a trois phases : diplomatique et politique, juridique et le peuple. Le Collectif des candidats reste solidaire et veut une solution démocratique et surtout exclusive aux candidats à la présidentielle et à celui qui gouverne le pays. Mais lui veut un dialogue ouvert à tout le monde, sans parler d’élections et de ce qui s’est passé. Donc, le dialogue est suspendu. L’opposition et la société civile peuvent être là, mais en tant qu’observateurs.
Et vos affaires avec la justice, où en sont-elles ?
Personnellement, je ne parle pas d’affaire avec la justice, car je n’en ai pas. C’est une affaire avec le pouvoir. En particulier, avec un groupe de gens du pouvoir. Je remercie au passage nos militants qui ne sont pas tombés dans le piège. Certaines personnes du pouvoir espéraient que nos militants choisiraient une autre voie, mais ces derniers ont fait preuve de maturité et de sagesse. Elle est là notre conduite. J’ai été victime d’une tentative d’agression physique. Je me suis rendu moi-même à la gendarmerie pour déposer plainte et on m’a séquestré sans aucun respect des procédures. Je suis victime de manipulations de certains pour des raisons politiques. Les gens derrière cette manœuvre, c’est un groupe de cinq personnes que je connais. Le moment venu, la population les connaîtra. Je ne sais pas ce qu’on me reproche, et c’est pour cela que j’ai refusé de sortir de la prison de Moroni. Je voulais dénoncer le non-respect des procédures. D’ailleurs, jusqu’à aujourd’hui, je n’ai jamais été auditionné. C’est une manipulation du régime.
Au fait, la justice ne vous a pas interdit de parler aux médias ?
Je n’ai pas été interdit de parler aux médias. Je l’ai moi-même décidé par respect pour mes militants. Je dois au préalable les rencontrer, leur dire ce qui s’est passé et leur expliquer notre stratégie. Une fois ma tournée terminée, je m’expliquerai dans les médias. Elle ne va pas tarder à s’achever. La liberté d’expression fait partie de la démocratie, je ne vois pas pourquoi on devrait interdire aux gens de s’exprimer, notamment dans les médias s’ils sont convaincus qu’on est en démocratie.
Quand vous étiez ministre de l’Intérieur, vous avez, par l’intermédiaire de votre secrétaire général, placé l’ex-président Sambi en résidence surveillée. La suite, on l’a tous vue. Êtes-vous convaincu que Sambi mérite la prison ?
Les libertés individuelles sont garanties par la Constitution. Tout le monde a droit à la liberté, y compris les anciens chefs d’État. La justice a fait ce qu’elle a fait. À elle de décider de la suite. Il n’y a pas que Sambi qui est derrière les barreaux. Il y a Achmet Saïd Mohamed, il y a Abdou Salami Abdou. Il y a beaucoup de gens qui sont en prison notamment de manière arbitraire. Sambi a été jugé, si prison il y a, que cela suive les textes. Dans ce cas précis, j’ai confiance au système, mais pas aux hommes. Cependant, je me refuse de commenter la justice. Ce qui est indéniable, c’est qu’il y a un souci au niveau de l’appareil judiciaire et il faut que ça change.
Vous avez dénoncé aux dernières élections le cas de militaires qui avaient emporté des urnes à Nyumakele. Pourtant, aux élections anticipées de 2019, que vous avez organisées en tant que ministre de l’Intérieur chargé des élections, les mêmes pratiques ont été largement observées comme l’indique un rapport de la Mission d’observation de l’Union africaine. Que dénoncez-vous donc au juste ?
Ce ne sont pas les mêmes pratiques. Ce n’est pas la même situation. En 2019, il y avait des candidats qui ont cassé les urnes, les militaires ont dû intervenir pour sécuriser le peu qui restait. Mais en 2024, il y a eu un ramassage des urnes à midi, c’est du jamais vu. Je vous rappelle encore une fois que le militaire qui a ordonné le ramassage des urnes a été arrêté et radié. Comment expliquer cela ? Je rappelle également que nous avons déposé de nombreuses plaintes, notamment contre les membres de la Ceni. Nous ne les lâcherons pas. Les représentants de l’Union africaine n’ont pas fait le déplacement au pseudo investiture, ce n’est pas pour rien, surtout quand on sait qu’Azali Assoumani avait la présidence de l’organisation quelques temps plus tôt. Ça a un sens. Nous avons aussi une plainte à Bruxelles contre certains membres du gouvernement pour des faits de torture. Nous ne nous sommes pas tus pour rien. Nous avons confiance aux voies légales. Les procédures entamées dans les instances internationales et continentales suivent leur cours, ça sera long, mais nous avons confiance et nous attendons, comme nous attendons de voir ce que cela va donner pour la suite du dialogue.
"Je n’ai pas été interdit de parler aux médias. Je l’ai moi-même décidé par respect pour mes militants. Je dois au préalable les rencontrer, leur dire ce qui s’est passé et leur expliquer notre stratégie. Une fois ma tournée terminée, je m’expliquerai dans les médias. Elle ne va pas tarder à s’achever. La liberté d’expression fait partie de la démocratie, je ne vois pas pourquoi on devrait interdire aux gens de s’exprimer, notamment dans les médias s’ils sont convaincus qu’on est en démocratie". |