Des responsables des principaux partis politiques ont appelé, hier, au «pluralisme des opinions» du début à la fin de la campagne référendaire. Cet appel n’est pas fortuit puisqu’il intervient vingt quatre heures après la publication, mardi dernier, de la liste des partis autorisés à battre campagne du 27 juin au 28 juillet prochain dans le cadre du référendum constitutionnel. L’annonce des six partis a laissé supposer une restriction imaginaire de l’espace public «à des groupements non reconnus» pendant la prochaine campagne.
Pour les partis politiques, il faut laisser l’opportunité à tout le monde de s’exprimer «dans ce moment fort de l’exercice démocratique», comme l’a souligné Houmed Msaidié, chef du parti Radhi. «Cette liste n’empêchera pas la libre expression des uns et des autres par rapport à la question qui sera posée aux électeurs», a-t-il soutenu.
«Météo politique»
Même son de cloche chez le parti au pouvoir, la Convention pour le renouveau des Comores (Crc), qui estime qu’il y va même de la légitimité du scrutin référendaire. «La campagne doit être ouverte à tout le monde, dans un scrutin référendaire, il n’y a pas lieu de limiter le débat sinon on risque de porter atteinte à la crédibilité de l’initiative de révision constitutionnelle», juge le secrétaire général de la Crc-fédération de Ngazidja, Ibrahim Souef.
La loi portant organisation des partis politiques suscite des controverses et même des «contradictions dans sa pratique», laisse entendre le secrétaire général du parti Juwa, Hassane Ahmed El-Barwane.
Pour lui, le texte est «adapté à la météo politique du régime aujourd’hui». «Quand le pouvoir veut utiliser les partis politiques à ses fins propres, il sort une liste d’une vingtaine mais quand ça ne lui arrange pas, il les limite à six. Ce n’est pas sérieux. Ou on applique la loi dans toute sa rigueur, ou on ne l’applique pas», dit-il.
S’agissant de la campagne référendaire proprement dite, le chef du parti Juwa reste quelque peu évasif. Il «craint», cependant, que tout soit fait pour «prendre les gens en tenaille» : «s’exprimer oui mais est ce qu’on va nous l’autoriser?, y aura-t-il un référendum? Je suis pessimiste. On continue à ne pas respecter la loi et à nous malmener». Le chef de l’Etat, Azali Assoumani, avait réuni la classe politique nationale l’année dernière au cours d’un round censé «faire le diagnostic des dispositions pratiques de la loi, corriger ses imperfections et l’améliorer en vue de l’adapter au contexte comorien». Mais on ignore la suite. Pour Ibrahim Souef, la loi en ellemême «montre ses limites» et elle mérite d’être revue sur certains aspects qui «sont de nature à restreindre l’espace politique à des citoyens libres».
Améliorer le cadre légal
«Je crois que les gens devraient ne pas sentir un climat de peur et d’intimidation pendant cette campagne référendaire, il y va de l’intérêt de la démocratie», ajoute Houmed Msaidié.
«Moi je suis légaliste, oui à la réglementation des partis politiques, oui il faut donner la parole à tout le monde mais arrêtons de parler de 23 partis quand ça nous arrange et de six partis quand ça ne nous arrange pas», insiste ElBarwane.
Au lendemain de la publication de cette liste, des voix de la diaspora, notamment, s’élèvent pour demander «des réaménagements» du texte. De nombreuses réunions ont eu lieu ces derniers mois sous l’égide du ministre de l’Intérieur dans le souci d’améliorer le cadre légal des partis politiques aux Comores. Le but est d’offrir plus de liberté dans l’espace politique national.
«Et ce que cela veut dire qu’il ne peut pas y avoir de candidats indépendants lors d’une élection, parce qu’ils ne sont pas membres des partis reconnus?», se demande Ibrahim Souef qui «crois» qu’il serait suicidaire de limiter la campagne à certains. «Il faut laisser les gens s’exprimer en toute liberté», suggère l’ancien député de Hambou qui propose l’abrogation de certaines dispositions de la loi «jugées liberticides et anti-démocratiques».
A.S.Kemba