Hamada Madi Boléro, ancien premier ministre
L’Accord-cadre de réconciliation nationale aux Comores, signé le 17 février 2001 à Fomboni à Mohéli a permis à notre archipel, déjà amputé d’une de ses 4 îles (Mayotte) par l’ancienne puissance coloniale, d’éviter le pire : sa dislocation pure et simple avec en toile de fond la désintégration du tissu social, fondement de notre identité. Cet accord a donc atteint son objectif qui fut l’acceptation des parties comoriennes à la mise en place d’un nouveau cadre institutionnel qui respecte l’unité et l’intégrité du territoire et qui respecte un équilibre politique entre les îles afin de promouvoir leur développement.
Les différentes commissions prévues notamment la Commission Tripartite furent mises en place et celle-ci rédigea la nouvelle loi fondamentale de l’Union des Comores. La communauté internationale avait pris l’engagement d’organiser une conférence des bailleurs de fonds pour appuyer les projets de développement du pays et elle fut organisée à Maurice fin 2005 co-présidée par Maurice et l’Afrique du Sud. Cet accord a donc été le 1er Acte constitutif de notre Etat après la déclaration unilatérale d’indépendance.
Dini Nassur, Homme politique, Ecrivain et expert en Ingénierie de développement local
L’accord cadre de réconciliation nationale est signé dans un contexte très apprêté de crise nationale fortement cochée par un antagonisme politique à la fois identitaire et institutionnel. Identitaire par la violence séparatiste de l’ile de Ndzuani et institutionnel par la prise du pouvoir par l’armée suite au Coup d’Etat du 30 Avril 1999. La signature de l’accord de Fomboni a été considéré comme la solution à la crise institutionnelle et identitaire même si la communauté internationale qui l’a parrainé pour ne pas dire l’a porté et la classe politique qui l’a validé pour ne pas dire l’a subi n’ont cru à son impact dans la durée. Néanmoins, une dynamique de réappropriation a permis d’éviter le pire sans pour autant atteindre le meilleur. En tout cas, deux composantes de cet accord se sont révélées substantielles dans le cadre du renforcement des capacités d’apaisement et de réconciliation : l’autonome des îles et la présidence tournante.
L’une est restée sans fondement par l’absence cruelle d’une véritable politique de décentralisation et l’autre est devenue un cache misère politique par son impuissance d’impulser une bonne gouvernance à même de répondre aux attentes de la population insulaire bénéficiaire et à l’affermissement de la souveraineté nationale. Le changement de constitution qui en a résulté est l’indicateur objectif de la frivolité de l’accord cadre de Fomboni. La constitution est apparue comme un outil de remise en cause de l’accord. Elle a été modifiée par Sambi pour s’ajouter une année de plus de pouvoir et Azali l’a changé pour s’assurer d’un mandat de plus.
C’est dire que la mission historique de la constitution qui est de poser l’acte fondateur par lequel une société se constitue une identité et décide de l’ordre sociétal souhaité et notamment la mise en pérennité du socle des droits et libertés fondamentaux, cette force est réduite à un dispositif de pouvoir. Quant à la question de savoir si la tournante est encore utile à l’unité nationale, il faudrait se la poser après que chaque île ait sa deuxième tournée d’illusion du moment où une des îles libres a entamé la sienne. Et la problématique réelle s’expose sur le système approprié à notre pays mais, non sur des modèles inadaptables et incapables de construire un pays de développement et de justice sociale.
Damed Kamardine, Avocat
D’une manière générale, il convient de souligner que cet Accord est intervenu dans un contexte politique particulier et tendu. En effet, il a été précédé d’un climat d’embargo qui pesait sur Anjouan, d’une part, et de l’absence de reconnaissance des autorités issues de l’interposition armée du 30 avril 1999. Dans ce sens, le dialogue inter comorien a été initié, lequel a donné lieu à la Déclaration de Fomboni du 26 août 2000. Par la suite, sous les bons offices de la communauté internationale, ce dialogue inter comorien a abouti à l’Accord de Fomboni du 17 février 2001, lequel a permis au pays de mettre officiellement un terme à la crise séparatiste anjouanais déclenchée en 1997 et de retrouver une unité et une stabilité politiques. En outre, cet accord est à l’origine du Nouvel Ensemble Comorien qui a principalement instauré la présidence tournante et reconnu une autonomie large aux îles. Des nouvelles institutions constitutionnelles sont nées de ce long processus de réconciliation nationale.