Après plusieurs mois d’absence sur le paysage médiatique de la place, l’avocat et homme politique, Fahmi Said Ibrahim, a rompu le silence et a accordé un long entretien à la presse. Pendant presque deux heures de temps, l’ancien chef de la diplomatie comorienne et ancien garde des sceaux a répondu aux questions des journalistes qui s’articulaient sur plusieurs points, notamment la politique, les relations diplomatiques du pays, le développement économique, les infrastructures du pays, la justice, la vie chère, l’environnement, la détention provisoire de l’ancien président Sambi.
«Un bilan négatif»
Fahmi Said Ibrahim a donné son point de vue sur le bilan des 47 ans d’indépendance du pays. L’avocat et homme politique a soutenu que depuis l’indépendance, «les orientations politiques n’ont pas conduit à la création de richesses afin de sortir la population de la précarité».Ainsi, Fahmi Said Ibrahim dresse «un bilan négatif», de ces 47 ans. «Un échec», à ses yeux, qui ne garantit pas le développement du pays. «Un pays qui n’a pas réussi à se doter des infrastructures de base ne va jamais se développer. Les orientations politiques du pays n’ont pas atteint leurs objectifs», a-t-il déploré. Pour l’ancien chef de la diplomatie, ses infrastructures de bases sont, par exemple, des écoles, des routes, des hôpitaux, entre autres.
Au sujet des orientations politiques, sans langage de bois, l’avocat a déclaré que «depuis l’accession des Comores à l’indépendance à ce jour, les régimes qui se sont succédés n’ont pas mis en place un réel plan pour assurer le développement du pays. Sauf Ali Soilihi qui avait mis en place un programme d’autosuffisance alimentaire».
La hausse des prix des produits pétroliers
Pour ce qui est de l’économie et du développement du pays, l’avocat met en cause les calculs des institutions de Breton Wood qui placent les Comores parmi les pays à revenus intermédiaire. Selon ses institutions, «notre Pib» est de 1400$ par habitant, à peu près 665 mille francs comoriens. «Ce calcul ne reflète pas la réalité des Comoriens. La Banque mondiale s’est servie des éléments apparents, comme les maisons, les produits agricoles présents sur les marchés pour tirer ses conclusions. Or ces produits viennent de l’extérieur, ces maisons n’ont pas de rentabilité», explique-t-il.
Quant à la question de la vie chère, liée à la hausse des prix des produits pétroliers, l’avocat, défendant aussi l’environnement, a proposé de faire en sorte que le prix du gasoil soit vendu au même prix que l’essence et réduire le coût du pétrole lampant. «Le surplus apporté sur le gasoil doit couvrir le déficit du pétrole lampant car c’est le plus utilisé par la majorité de la population, ainsi cela va réduire l’utilisation du bois dans les ménages et réduire en même temps la déforestation», propose-t-il.
Interrogé sur la question de la justice en vue de donner son avis par rapport à ces 47 ans d’indépendance, l’ancien garde des Sceaux a saisi cette occasion pour dresser son propre bilan de son passage dans ce département.
«J’ai élaboré de nombreux textes entre autres pour lutter contre le trafic sur les certificats de nationalité, pour la mise en place du tribunal de commerce, pour améliorer les conditions salariales des magistrats. Selon mes convictions, il m’est inconcevable qu’un magistrat touche moins de 5 cent mille francs de salaire. Cela aurait eu une incidence budgétaire de 225 millions de francs, mais pour protéger nos magistrats, cela n’est pas une importante somme», devait-il soutenir.L’ancien ministre de la Justice a ajouté que ce secteur doit subir de nombreux changements dans tous les domaines. «Quand j’ai été à la tête de ce département, nous avions un projet de 11 million d’euros, soit près de 5,5 milliards de francs comoriens. Cet argent aurait beaucoup aidé à améliorer la justice et à moderniser les trois palais de justice».
«4 ans, c’est beaucoup»
Par rapport à la détention provisoire de l’ancien président Sambi, Me Fahmi Said Ibrahim a martelé que «4 ans, c’est beaucoup. Il n’est pas normal, la justice doit être équitable. Sur cette affaire, le principe d’égalité de tous devant la loi n’est pas observé. J’aurais aimé que Sambi soit traité de la même manière qu’Ikililou, or ce n’est pas le cas». Quant aux orientations diplomatiques du pays, l’ancien ministre des Affaires étrangères voit le pays se tourner plus vers l’organisation de la communauté Est africaine. «La commission de l’Océan indien est notre passé, mais notre avenir se trouve au sein de la communauté Est africainne», fait-il savoir.