Qu’attendez-vous de ce sommet au niveau des relations entre l’Afrique et l’Europe, d’une part. Et entre l’Europe et les Comores, d’autre part ?
Le sommet Ue-Ua entre l’Afrique l’Europe se tiendra les 17 et 18 février à Bruxelles. Cette rencontre est un moment important des relations de l’Ue, avec l’Afrique et avec les Comores en particulier. Il comptera la participation des chefs d’État et de gouvernements africains et européens, du président de la Commission européenne, du président de l’Union africaine et du président de la Commission de l’Union africaine. Les Comores seront représentées par le président Azali Assoumani.
Ce sommet prend place également dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, au premier semestre 2022, qui fait de la relation entre l’UE et l’Afrique l’une de ses grandes priorités. Les objectifs sont clairs. L’UE est déterminée à soutenir le développement économique et la croissance en Afrique, pour favoriser la reprise économique sur le continent. L’Ue s’efforce également à parvenir à un accord sur une architecture renouvelée pour la paix et la sécurité et de renforcer la coopération avec les pays de l’Ua en matière de migration et de mobilité, tout en luttant contre le trafic des personnes. L’Ue veut aussi renforcer les capacités africaines en matière de santé.
Une enveloppe de 150 milliards d’euros a été annoncée par Bruxelles pour accompagner le continent africain. Quels sont les programmes retenus pour l’Afrique ?
La présidente de la Commission européenne, Ursula Van der Leyen vient d’annoncer que l’Ue investira plus de 150 milliards d’euros à travers le programme Afrique-Europe. Ce programme entre dans le cadre du Global Gateway, la nouvelle stratégie européenne visant à développer des liens intelligents, propres et sûrs dans les domaines du numérique, de l’énergie et des transports, mais aussi à renforcer les systèmes de santé, d’éducation et de recherche dans le monde entier, en Afrique et aux Comores.
Le Global Gateway permettra de réaliser des projets durables et de qualité, tenant compte des besoins des pays partenaires avec des avantages durables pour les populations. Ces projets seront financés à travers des investissements garantis en faveur de projets d’infrastructures. Mais aussi grâce à des subventions pour une assistance technique, en vue de renforcer les capacités des pays partenaires à élaborer des projets crédibles garantissant un bon rapport coût-efficacité.
Le Sommet se focalisera beaucoup plus sur les relations commerciales. Qu’en est-il aujourd’hui du cas des Comores, je veux parler des échanges.
Les discussions lors du sommet permettront d’aborder bien sûr le commerce et les échanges économiques, moteurs de la croissance et de l’emploi, mais plus largement les ambitions communes en vue du développement durable de l’Afrique. Ainsi, plusieurs tables rondes se tiendront sur des sujets aussi variés : le financement de la croissance durable et inclusive, le changement climatique et la transition énergétique, le numérique et les transports, la paix, la sécurité et la gouvernance, l’appui au secteur privé et l’intégration économique, l’éducation, la culture et la formation professionnelle, la migration et la mobilité, l’agriculture et le développement durable, les systèmes de santé et la production vaccinale.
Pour répondre spécifiquement à votre question, il faut rappeler que l’Ue est le premier partenaire commercial des Comores en termes de commerce de biens et services, et d’investissements. Les relations commerciales, le secteur privé et l’intégration régionale sont au cœur de nos relations. Mais nos relations, ou plutôt notre partenariat, va bien au-delà. Nous avons un dialogue et accompagnons les Comores sur l’ensemble des sujets qui font l’objet de ces tables rondes.
Les Accords de partenariat économique (APE) seront révisés ou réajustés. En quoi ces accords peuvent-ils contribuer à accroître les échanges entre l’Ue et les pays du continent africain ?
Les Comores ont ratifié en 2019 les Accords de partenariat économique (Ape) avec l’Ue et les cinq pays de la région Afrique australe. Ces accords permettent le libre accès des produits comoriens au marché de l’UE et de la région, tout en réduisant les droits de douanes pour les biens d’équipement et les produits en provenance de l’UE. Ceci signifie une baisse des prix pour les consommateurs et une baisse des facteurs de production pour le secteur privé.
En ce sens, les APE sont un instrument au service de la croissance, de l’emploi et de l’investissement aux Comores. Des négociations sont en cours pour l’approfondissement de l’APE, afin d’aller au-delà des seuls échanges de biens et passer à un accord plus complet en matières de services, investissements, obstacles techniques au commerce, droits de propriété intellectuelle et développement durable.
Les produits comoriens ont du mal à toucher véritablement le marché européen à cause des problèmes de certification. Que fait l’UE pour accompagner les Comores à se conformer aux normes européennes?
L’Union européenne est le premier partenaire commercial des Comores en termes de commerce de biens et services, et d’investissements. Nous sommes convaincus que développer les relations commerciales entre les Comores et l’UE, et faciliter des partenariats gagnants-gagnants entres nos entreprises sont des éléments clés dans le développement et l’émergence des Comores.
Bien sûr, l’accès au marché européen est exigeant car des normes strictes ont été mises en place pour protéger la santé de nos consommateurs. Pour cela, l’Ue accompagne les Comores à renforcer les capacités du secteur privé pour favoriser les exportations vers l’Ue et dans la région Afrique australe. Ainsi, l’UE finance actuellement le programme Apile d’un montant de 6 millions d’euros pour accompagner les entreprises qui souhaitent adapter leurs processus de production pour exporter vers l’Europe.
Ce programme soutient aussi le dialogue public-privé afin d’améliorer le climat des affaires permettant de favoriser le développement du secteur privé et d’attirer davantage d’investissements au service de la croissance et de l’emploi. Je tiens à souligner que plusieurs entreprises comoriennes exportent déjà leurs produits vers le marché UE. C’est donc possible ! Leur réussite peut servir d’exemple aux nombreuses entreprises qui n’osent pas se risquer.
Pourquoi de nombreux projets de l’UE ont-ils été mis en veilleuse aux Comores depuis plus de trois ans.
Notre coopération s’est sensiblement renforcée au cours de ces derniers mois. En effet, en 2019, alors que certains projets n’avaient pas été mis en œuvre car les conditions ne le permettaient pas, nous avons dû lors de notre dialogue politique UE-Comores redéfinir ensemble les priorités en matière de développement.
Les décisions que nous avons prises conjointement à cette occasion et la force de notre partenariat, ont permis de créer une nouvelle dynamique positive. On peut maintenant parler d’un renouveau de la coopération UE aux Comores ! A titre d’exemple, l’UE met actuellement en œuvre plusieurs projets dans le domaine de la gouvernance économique et financière, de la formation professionnelle ou encore du commerce.
L’UE finance aussi la construction d’une centrale photovoltaïque permettant l’électrification de 20 000 foyers à Mohéli, ou encore un projet d’adduction d’eau potable à Anjouan. D’autres actions sont en cours dans le domaine de l’environnement ou de la protection des enfants. La Banque européenne d‘investissement (Bei) contribue enfin à la construction d’une nouvelle centrale photovoltaïque à la Grande-comore. Le portefeuille en cours des projets financés par l’UE aux Comores dépasse les 40 millions d’euros.
A quand le démarrage du 12ème Fonds européen de développement (FED), et quels seront les secteurs de concentration aux Comores ?
Depuis le 1er janvier 2022, le Ndici – Europe dans le monde - est le nouvel instrument du partenariat politique entre l’UE avec les Etats Afrique Caraïbe Pacifique, en remplacement du Fonds européen de développement (Fed). Cet instrument plus lisible et plus flexible que le Fed soutient désormais les actions extérieures de l’UE.
Aux Comores, le Nidici permet de financer le programme indicatif pluriannuel 2021-2027, en appui au Plan Comores Emergent. Ce programme a été adopté à l’issue d’un processus piloté par le gouvernement, et des consultations avec l’ensemble des acteurs de la société comorienne, notamment les jeunes, les femmes, le secteur privé ou encore la société civile.
Quels sont les domaines prioritaires retenus dans le Programme indicatif pluriannuel ?
Il y a le pacte vert et bleu, la croissance et l’emploi et la gouvernance économique. Ce programme indicatif pluriannuel prévoit une première tranche (2021-2024) d’un montant de 46 milions d’euros. Fin 2024, une revue à mi-parcours permettra d’évaluer les progrès et servira à déterminer le montant de la tranche 2025-2027 en fonction des résultats atteints.
Outre les dons, les outils financiers que nous mobilisons permettent de garantir des prêts concessionnels de plusieurs dizaines de millions d’euros pour des projets structurants en soutien à la croissance. Nos équipes respectives sont déjà à pied d’œuvre pour formuler de nouveaux programmes et nous prévoyons d’engager 30 milions d’euros supplémentaire dès 2022. Comme je l’ai mentionné précédemment, on peut vraiment parler du renouveau de la coopération de l’Ue aux Comores !