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Gouvernance démocratique I La loi sur les partis politiques réadaptée à la nouvelle constitution

Gouvernance démocratique I La loi sur les partis politiques réadaptée à la nouvelle constitution

Politique | -

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Un atelier technique de toilettage du texte a eu lieu hier à Moroni, à l’hôtel Retaj sous la houlette du Commissariat général au Plan et du ministère de l’Intérieur en charge des élections. Des acteurs de la société civile, des juristes, des financiers et des délégués des partis politiques (Crc, Orange, Radhi, Updc) et le président du parti Al-Qamar, Salim Saadi, avaient pris part aux débats. Seul le parti Juwa n’était pas représenté pour de raisons encore inconnues.

 

La loi N°13-010/Au du 21 novembre 2013 sur «les partis et groupements politiques» a été revisée hier à Moroni à l’hôtel Retaj au cours d’un atelier technique qui avait mobilisé presque tous les acteurs concernés notamment les partis politiques reconnus jusqu’ici. Seul le parti Juwa n’était pas représenté malgré «une invitation officielle adressée au bureau du parti», d’après les organisateurs.


L’atelier, présidé par le commissaire général au Plan consistait, avec l’appui de consultants juridiques, à mettre en conformité les dispositions de cette loi à la nouvelle vision des autorités en matière de gouvernance démocratique affirmée dans la nouvelle constitution. «Il y a des nouveautés à tenir compte aujourd’hui, prévues par la constitution de 2018 et qui doivent être intégrées dans la loi sur les partis politiques», a justifié Fouad Goulam.

Casser les réflexes insulaires et régionalistes

A l’entendre, les réformes préconisées par l’Etat pour assurer une meilleure gouvernance du pays s’étendent à tous les niveaux. «Il y a les réformes économiques et financières, il y a les réformes au niveau de la Santé, de l’Education. Mais il y a aussi les réformes politiques et la consolidation des acquis démocratiques», a expliqué le commissaire au Plan. «Nous voulons mettre les gens en conformité avec le Plan de développement intérimaire (Pdi) y compris les lois qui impulsent ces réformes comme celle relative aux partis politiques», a encore précisé Fouad Goulam, citant, entre autres, le statut de l’opposition, le régime électoral et le mode de financement des partis politiques.


La constitution adoptée par référendum en juillet 2018, en son article 35, a notamment interdit «la constitution de partis politiques insulaires, régionaux ou locaux ou ayant un caractère paramilitaire ou recourant à des moyens subversifs». Elle a fait mention, en son article 36, d’un statut particulier de l’opposition politique. Deux points qui avaient retenu toute l’attention des participants.

5% des suffrages auxdernières élections

«Il y avait lieu de clarifier ces aspects, réfléchir sur les dispositions d’accompagnement et les intégrer dans la loi sur les partis politiques de 2013», a expliqué Mbaé Toimimou, directeur général des élections qui faisait office de modérateur du débat. «Il y a de grandes nouveautés dans la nouvelle constitution, d’où l’intérêt de partager le vécu et faire des recommandations».L’esprit de la loi sur les partis et groupements politiques de 2013 était de renforcer l’unité nationale, pousser les formations politiques à avoir une assise à l’échelle du pays et les accompagner dans la formation citoyenne sur l’ensemble du territoire national pour surtout casser les réflexes insulaires et régionalistes. «La nouvelle constitution interdit un parti insulaire ou régionaliste, et, pour cela le parti, doit répondre aux critères définis par la loi», a éclairé Mbaé Toimimou.


Pour exister légalement, un parti ou groupement politique doit, soit, avoir au moins 4 élus à l’Assemblée nationale à raison d’un élu par île, soit être représentés par deux élus dans les anciens conseils de l’île, sois récolter au moins 5% des suffrages aux dernières élections. Des conditions qui font toujours grincer des dents dans certains milieux des partis politiques. «Je trouve que ces conditions sont strictes et ne tiennent pas compte des réalités du pays, ces conditions sont anti-démocratiques», a estimé le président du parti Al-Qamar, Salim Saadi. «Si la loi prévoit ces restrictions, c’est surtout pour mettre de l’ordre et limiter les partis fantômes», lui a rétorqué son collègue de la Convention pour le Renouveau des Comores (Crc) Tadjidine Ben Ahmed.

 

 

«Le président Djohar, dans les années 1990, avait autorisé à qui le voulait de fonder un parti politique. C’était un moment bien particulier de l’histoire politique. Aujourd’hui, les choses ont bien changé», a reconnu Maoulida Mabrouk, délégué du parti Updc pour qui l’assainissement du paysage politique était nécessaire. L’autre point abordé concerne les modalités de financement des partis politiques.

L’Etat a mis en place le Fonds de consolidation des acquis démocratiques (Focad) dans le but d’accompagner les réformes essentielles à la promotion d’un paysage politique sain. Il est notamment question, entre autres, d’assurer des subventions aux partis politiques qui répondront aux missions que leur assigne la constitution notamment «la formation civique et politique du peuple» et ce pour éviter les financements occultes qui pourraient menacer la stabilité politique du pays.


S’agissant des conditions même de création d’un parti politique, la loi de 2013 recommande au fondateur de communiquer «au moins 20 électeurs» issus de chaque commune. Les noms sont annexés au procès-verbal de constitution d’un parti adressé au ministère de l’Intérieur avant que celui-ci dresse le récépissé officiel.
Les débats étaient dépassionnés. D’un côté, ceux qui souhaitent donner libre cours à tout citoyen de pouvoir créer son parti sans restriction aucune et d’autres qui estiment qu’un parti ou groupement politique ne doit être ni une coquille vide ni un fonds de commerce.


La loi en question avait suscité des remous avant même son adoption en novembre 2013 tant son entrée en vigueur avait anticipé la disparition de certaines formations dont l’existence étaient limités sur le papier. «Si on n’a pas les capacités de mobiliser 5% des suffrages dans le pays ou 20 personnes dans chaque commune, à quoi bon de fonder un parti», a indiqué Mbaé Toimimou.

La constitution a créé de nouveaux droits

Le directeur général des élections s’est contenté de détailler les grandes innovations de la constitution de 2018 en termes de gouvernance démocratique et l’ambition des autorités nationales à renforcer les équilibres entre pouvoir et opposition «pour un environnement politique respectueux des grands principes démocratiques». Mbaé Toimimou est notamment revenu sur le statut du chef de l’opposition politique, précisant que de nouveaux droits et des devoirs sont bien prévus par la constitution de 2018.


«On veut définir le cadre légal d’une manière général mais surtout clarifier et définir le statut de l’opposition qui doit respecter les dispositions de la loi de 2013 mais aussi bénéficier d’un traitement particulier», a-t-il mentionné, ajoutant que jamais, aucune constitution n’avait, par le passé, accordé «un statut particulier» au chef de l’opposition. Le texte révisé devrait être soumis aux députés à la session parlementaire du mois d’octobre prochain.

A. S. Kemba

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