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Gros plan sur la commune de Mutsamudu Zarouki Bouchrane I «Mutsamudu est citée parmi les communes les mieux administrées»

Gros plan sur la commune de Mutsamudu Zarouki Bouchrane I «Mutsamudu est citée parmi les communes les mieux administrées»

Politique | -   Ahmed Zaidou

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Dans cette interview, le maire de Mutsamudu revient sur ses réalisations, les projets en cours et les autres qui n’ont pas abouti, tout au long de son mandat de 5 ans qui finit bientôt.

 

Comment évaluez-vous votre mandat en tant que maire de Mutsamudu, la capitale de Ndzuani ?


A quelques mois de la fin de mon mandat, je crois que c’est aux administrés de faire le bilan de l’action de l’équipe municipale qu’ils ont élu depuis bientôt cinq ans. Pour ma part, je ne peux que m’en tenir aux promesses que j’ai tenues et les engagements qui constituent ma politique. Je rappelle que je m’étais engagé à restructurer l’administration municipale pour plus de transparence dans la gestion des finances et garantir la régularité du paiement des salaires du personnel qui avait plusieurs mois de retard lors de ma prise de fonction.

Je me suis fixé comme autre objectif, de numériser l’état-civil afin d’avoir des archives sûres et des actes fiables. Là-dessus, Mutsamudu est devenue la commune en avance dans la modernisation de l’état-civil. J’ai hérité des actions de l’Association des femmes actives (Afam), la lourde responsabilité de pérenniser la lutte pour la propreté et l’assainissement de la commune qui est une de mes priorités. Malgré l’absence d’accompagnement des pouvoirs publics, nous sommes en passe de relever le défi grâce au soutien de la communauté, et particulièrement des associations de Mutsamudu issues de la diaspora.


Sur le plan culturel, nous avons lancé la semaine culturelle comme action phare du projet municipal de «Mutsamudu, capitale culturelle». La création d’une médiathèque municipale, la première à Anjouan, s’inscrit aussi dans notre ambition. En matière d’aménagement de la ville, les enjeux sont très importants et nécessitent des moyens considérables que la mairie ne possède pas. Néanmoins, nous avons commencé à informer les administrés sur le rôle de la politique municipale, et aussi à autoriser tous les travaux collectifs ou individuels avec la généralisation du permis de construire.

La mairie assure aussi le rôle de médiation sur les conflits intra et inter villageois. Nous avons plaidé et obtenu l’intervention de l’Etat pour la réhabilitation de la voirie municipale, la réfection d’une digue de protection de quartiers sinistrés à Lazare et d’un caniveau qui présentait des risques d’effondrement à Missiri. Les services travaillent pour faire bénéficier la commune d’infrastructures structurantes dans le cadre des projets de coopération.

Un centre d’accueil pour l’insertion professionnelle est en construction sur l’espace Dodin dans le cadre du projet Msomo Na Hazi, financé par le Pnud. Grâce au plaidoyer de la mairie, Mutsamudu a été retenue dans le cadre des villes résilientes. Nous sommes en train de finaliser avec l’Union des chambres de commerce, d’industrie et d’agriculture (Uccia), la construction d’un centre artisanale ainsi que des études en cours pour un aménagement d’un espace économique sur Dodin dans le cadre du projet Delac porté par l’Uccia.

Enfin, nous avons initié une politique de régulation de la circulation avec la mise en place de gares routières. Malheureusement, les acteurs concernés, à savoir le syndicat des chauffeurs ainsi que la gendarmerie nationale, n’ont pas fait preuve d’une grande implication, contrairement aux autres îles qui ont pris une longueur d’avance sur ce terrain.

Comment avez-vous abordé les problèmes de l’urbanisation et les déchets ?


C’est un combat complexe avec des phases et des expériences différentes. Ce secteur a été d’abord celui des associations des quartiers avant la création de l’Afam. Cette association a élevé le niveau de prise en charge de la gestion des déchets en impliquant les associations communautaires. Ça a permis l’assainissement total du littoral grâce à la mobilisation de tous, l’acquisition de deux motos benne par l’Ong Deux mains, et l’achat de deux camions grâce à l’implication de la diaspora.

Nous sommes en passe de relever le défi par la mise en place d’une organisation maîtrisée du ramassage. Il reste qu’il faut parvenir à faire évoluer les comportements des administrés pour plus de responsabilité des foyers.

Quelles sont les initiatives que vous considérez comme les plus importantes pour la communauté ?


Généralement, les gens limitent l’action politique aux infrastructures. Celles-ci sont certes indispensables, mais la gestion des villes implique surtout des politiques d’aménagement de l’espace de vie, par l’animation des habitants afin de créer un meilleur vivre ensemble. C’est pour cela que pour moi, la dimension culturelle est essentielle.

D’où ma satisfaction d’avoir initié la création d’une médiathèque municipale et la «Semaine de la culture» comme moment de promotion de l’expression artistique. C’est aussi une opportunité pour la jeunesse de disposer d’espaces événementiels de création et de pouvoir s’impliquer dans la vie sociale. J’espère que nous laisserons un héritage que les équipes à venir sauront entretenir et développer.

Quels sont les projets qui restent en suspens ?


Mutsamudu est une ville chef-lieu. Je pensais que nous aurions le temps de dégager un grand espace partant de la place de l’indépendance à Dodin, en passant par Mroni avec un nouveau plan d’aménagement comprenant des parkings, une aire de loisirs au jardin Habomo, des bâtiments pour les services, des magasins modernes et une circulation maîtrisée. Je regretterai donc de n’avoir pas réussi à mettre en place les gares routières  qui auraient marqué le début de cet aménagement.

Nous avons lancé à Gungwamwe, une expérience pilote de notre projet de petits centres commerciaux de proximité qui devraient faciliter les ménages à trouver dans leurs quartiers les besoins essentiels et réduire le flux du principal marché de la ville. Mais les moyens n’ont pas permis d’en construire d’autres.

Enfin, l’équipe municipale s’était attachée à récupérer les biens d’intérêt commun afin d’initier de nouvelles relations conventionnées avec les associations qui en ont la gestion. Cependant, nous avons été confrontés à une incompréhension due à des groupes qui se sont malheureusement accaparés de ces infrastructures pour des intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général.

Quelles sont selon vous, les raisons de l’échec des projets Plan vert Mutsamudu et la création de deux gares routières à Mutsamudu ?


Etant des projets innovateurs, il faut souligner que les habitants ne sont pas encore prêts à une certaine révolution des mentalités. Nous avons donc été confrontés à des résistances et nous avons compris qu’il faut prendre le temps de bien communiquer sur les sujets d’ordre esthétiques comme les espaces fleuris. Quant aux gares routières, la mairie a rempli sa part de contrat en publiant un arrêté municipal sur ce sujet.

Nous avons défini les emplacements, posé les panneaux de signalisation, etc... Mais le syndicat des chauffeurs n’a pas réussi à s’imposer sur ses membres comme c’est le cas à Ngazidja. Malheureusement, pour des raisons qui nous dépassent, la gendarmerie nationale n’a pas tenu ses engagements et a usé de son autorité pour ne pas faire respecter la loi municipale.

Quels conseils donneriez-vous à votre successeur pour continuer à faire progresser la ville ?


Mon successeur sera élu sur les promesses qu’il tiendra à ses électeurs. Je n’ai pas le droit de m’immiscer, ni même de prévoir sa vision du développement de Mutsamudu. Mais pour le bien commun, il est important qu’il y ait une continuité des projets en cours. Je pense aux deux projets de finalisation avec l’Uccia, concernant le centre artisanal prévu au jardin de Missiri et l’aménagement de l’espace Dodin.

Il serait intéressant de poursuivre la construction des centres commerciaux de proximité pour désengorger le centre-ville et promouvoir les quartiers, surtout que Mutsamudu s’étend de plus en plus avec Sangani et Dindrihari. Il est important de penser aux gares routières pour une régulation de la circulation sinon la commune sera invivable dans quelques années. Enfin, nous devons penser à l’encadrement de la jeunesse et à l’éducation populaire, pour anticiper sur les risques d’un développement de la délinquance et de l’insécurité.

Propos recueillis
par Ahmed Zaidou

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