Les canaux diplomatiques et les appels à la trêve au Soudan se multiplient. L’Union africaine et les Nations-unies, d’une part, les Etats-unis et le royaume d’Arabie saoudite, d’autre part, sont à l’offensive pour presser les belligérants à faire taire les armes et à mettre fin à l’escalade des bombardements qui tétanisent les civils avec leur bilan humain qui augmente, semaine après semaine.
La mort, le 15 juin, du général Khamis Abdallah Abakar, un gouverneur de la région du Darfour, a ravivé les tensions, faisant craindre une intensification des combats en zone urbaine où les militaires des deux camps souhaitent assurer le contrôle. L’envoyé spécial de l’Onu, Volker Perthes, n’a pas caché sa profonde désolation, se disant «particulièrement alarmé» par les évènements tragiques notés dans plusieurs régions du pays, plus particulièrement au sud du Darfour. «Ces violences constituent des crimes de guerre», a-t-il déclaré.
Pour l’heure, les discussions engagées visent, dans un premier temps, une cessation des hostilités avec, comme finalité, de limiter les effets déjà forts d’une catastrophe humanitaire. L’Organisation internationale pour les migrations (Oim) dénombre déjà plus «de 2,2 millions de personnes ayant fui leurs domiciles alors que cinq cent vingt-huit mille» autres se sont réfugiés dans les pays voisins.Une situation qui inquiète les organisations régionales et internationales mais aussi les alliés de Khartoum.
L’Union africaine, à travers son président en exercice, Azali Assoumani, «échange régulièrement» avec les deux généraux, les exhortant à engager un début de discussions directes devant aboutir à des pourparlers inter-soudanais.
Le chef de l’Etat comorien a eu des échanges téléphoniques avec les deux hommes. Mardi 13 juin, une conversation a eu lieu entre le président de la République et le général Mohammed Hamdan Daglo, chef des Forces de soutien rapide (Fsr). «L’entretien a porté sur les efforts déployés par le biais de la plateforme de Djeddah et par l’initiative de l’Igad pour ramener la paix au Soudan», d’après un communiqué qui appelle «les organisations partenaires de l’Afrique à se joindre à l’initiative de l’Union africaine et dont la vision est partagée et soutenue par le général Mohammed Hamdan Daglo».Trois jours plutôt, le président de l’Union africaine s’était entretenu, avec le général Abdel Fattah Al-Burhan, chef de l’armée régulière. Les deux hommes, selon un communiqué, ont «souligné la nécessité pour l’Afrique de trouver une solution africaine à ce conflit tout en saluant l’appui apporté par les pays et les organisations partenaires de l’Afrique». Le président Azali Assoumani annonce de nouveaux échanges téléphoniques «dans les jours à venir». A Moscou, l’on n’a pas oublié d’évoquer, en aparté, cette guerre au Soudan, selon nos informations.
L’Arabie saoudite, en bon ordre avec les Etats-unis, poursuit, elle aussi, à son niveau, ses échanges avec les deux protagonistes en vue de la tenue d’une conférence internationale sur le Soudan. Les Saoudiens et les Américains ont une influence croissante de longue date sur les autorités soudanaises. Les pressions diplomatiques de ces dernières semaines ont permis aux deux camps de décréter une trêve humanitaire de «72 heures ». Difficile de savoir si la trêve allait permettre aux organisations humanitaires d’acheminer l’aide aux civils coincés dans les zones à haut risque régulièrement pilonnées par les différentes factions armées.
Toutefois, les chances d’une paix immédiate au Soudan demeurent minces, comme le reconnaissent de nombreux analystes qui estiment, cependant, que la guerre, avec ses origines ethniques, est, probablement à son point culminant. Les deux parties semblent entrer dans une phase d’enlisement. «Les enjeux sont extrêmement importants et les raisons ne manquent pas pour que ces anciens alliés devenus ennemis acharnés fassent marche arrière», écrit la Bbc, se fondant sur une analyse du spécialiste du Soudan et de la Corne de l’Afrique, le Britannique, Alex de Waal.Depuis son déclenchement, il y a deux mois, la guerre au Soudan a déjà fait plus de mille huit cent morts.
Une «conférence internationale» sur le Soudan
L’Arabie saoudite, par la voix du prince héritier, Mohammed Bin Salman, organise une conférence internationale cette semaine, censée permettre une mobilisation de fonds en faveur du Soudan. La situation humanitaire est jugée critique par le Comité international de la Croix-Rouge (Cicr). «L’Arabie saoudite a ainsi annoncé mardi la tenue le 19 juin d’une conférence internationale consacrée à l’aide au Soudan», a écrit, samedi, le quotidien français, La Croix, citant de nombreuses sources dont l’Afp. Les discussions devraient avoir lieu à Genève en Suisse.
L’initiative saoudienne intervient quelques semaines après la rencontre de Djeddah qui a permis de créer un cadre d’échanges entre les deux parties bien que le royaume cherche toujours difficilement à concilier leurs positions.En attendant, Mohamed Bin Salman veut peser pour une action humanitaire en faveur du Soudan. Les besoins d’aide immédiats sont évalués par les Nations unies à 3 milliards de dollars.Parallèlement, le Kenya annonce un projet de rencontre entre les deux généraux. «Dans les trois prochaines semaines, nous entamerons le processus d’un dialogue national inclusif», a affirmé le président kényan, William Ruto, au Monde.