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Indépendance du 6 juillet 1975 : Gros plan sur les pays à la rescousse de la libération des Comores

Indépendance du 6 juillet 1975 : Gros plan sur les pays à la rescousse de la libération des Comores

Politique | -   Abdou Moustoifa

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La Tanzanie, la République populaire de Chine, l’Ex Union des républiques socialistes et soviétiques, entre autres. Nombreux sont les pays du monde entier, ayant soutenu, l’archipel des Comores, dans sa bataille diplomatique afin qu’il obtienne auprès de la puissance colonisatrice, son indépendance. Comme tous les mouvements de libération, le Molinaco devait prendre le taureau par les cornes, devant[certains] pays africains hostiles à sa reconnaissance à la fois au sein de l’Oua et à l’Onu, où on avait mis sur pied deux comités chargés de la décolonisation.

 

A partir des années 60, un vent de liberté commençait à souffler dans les colonies françaises d’Afrique. En revanche, le chemin menant à l’indépendance, emprunté par les mouvements indépendantistes-devenus les symboles de cette lutte, a été semé d’embûches. Aux Comores le pays toujours sous domination française), le mouvement pour la libération des Comores, le Molinaco, n’échappera pas aux subterfuges du colonisateur. De l’Organisation de l’unité africaine (Oua) jusqu’aux Nations unies, l’ombre de Paris planait partout et a, devant certaines circonstances, infligé un coup de massue aux amis d’Abdou Bakar Boina, leader incontesté du Molinaco.
Malgré, ces manœuvres, orchestrées en catimini, ce dernier pouvait tout de même compter sur le soutien de nombreux pays, qui partageaient la cause des Comores, notamment dans la bataille diplomatique du mouvement. Au premier rang desquels, se trouvait la Tanzanie. L’aide de ce pays, fut précieuse et multiforme d’après l’ancien ambassadeur des Comores en Afrique du Sud, Ahmed Thabit. « Tout a commencé en Tanzanie. Ce sont les Comoriens qui vivaient là-bas qui ont eu l’idée, en premier, de créer un mouvement dont le but serait de faire accéder le pays à l’indépendance. A cette époque, beaucoup de pays africains étaient sous le coup légitime des mouvements nationaux soutenus par l’Oua. Celle-ci avait créé organe, un comité dit de libération, chargé de s’occuper de l’indépendance des pays du contient n’ayant pas encore recouvert leur souveraineté », analyse Ahmed Thabit.
Partout dans le monde, en particulier dans les pays qui, durant des décennies, se retrouvaient sous le joug des puissances impérialistes européennes, la lutte pour l’indépendance n’a jamais été un long fleuve tranquille. La bataille était rude, pour marquer leurs empreintes, les mouvements nationalistes avaient incontestablement besoin de l’appui de certains pays, pour y parvenir, sur tous les fronts : diplomatiques, financiers, militaires pour certains. Pour qu’un pays puisse obtenir le soutien de l’organisation panafricaine créée en1963, il fallait que son mouvement adhère au comité de libération. Mais l’intégration ne passera pas comme une lettre à la poste pour le cas des Comores dont la cause était portée par le Molinaco.

Jamais sans la Tanzanie

D’abord, se rappelle encore Mohamed Athoumane, un des anciens membres du Molinaco, les Comoriens vivant en Tanzanie, à l’origine de l’initiative, se sont heurtés à un premier obstacle au sein de l’Oua. « Bien qu’ils aient reconnu leurs origines comoriennes, les dirigeants du comité de libération ont rejeté l’inscription du Molinaco parmi les mouvements indépendantistes au motif que ses précurseurs ne vivaient pas aux Comores, donc ignoraient ce qui se passait, notamment la réalité du pays », a relaté ce notaire qui fut le chargé des relations extérieures du Molinaco. C’est à ce moment-là qu’on a fait appel à des leaders depuis les Comores, à l’instar de Youssouf Abdoulhalik et Sakina Ibrahim, pour porter le dossier d’adhésion, à en croire toujours Ahmed Thabit. Ce dernier vivait en Tanzanie où il a obtenu son baccalauréat est revenu aux Comores vers les années 66. Il repartira plus tard en France pour y poursuivre ses études. Au de-là de son soutien diplomatique, la Tanzanie a offert un toit, aux pionniers du Molinaco. « Après l’incarcération de Youssouf Abdoulhalik, aussitôt mis les pieds aux Comores, le mouvement avait besoin d’un leader pour mener le combat. Il a fallu attendre l’affectation d’Aboubakar Boina comme instituteur de français de l’école franco-comorienne à Zanzibar, pour que les activités reprennent. Les Comoriens qui se trouvaient là-bas, l’ont dissuadé de partir, lorsque son mandat toucha à sa fin. », se souvient l’ambassadeur Thabit qui fait partie des premiers diplomates de l’ere post-indépendance. Il est le premier secrétaire général du ministère des Affaires étrangères (actuel Maeci).

Zambie, Ethiopie, Kenya…

Les obstacles ne s’arrêteront pas là malheureusement. Ils ne feront d’ailleurs que commencer. Car au sein même de l’Oua, devenue aujourd’hui Union africaine (Ua), la candidature des Comores n’a pas été bien accueillie. Il faut noter que si d’une part des nations se sont portées volontiers à aider des pays colonisés, à recouvrer leur souveraineté, il existait d’autre part de nombreux pays qui savonnaient la planche. Ils étaient vent debout contre le dossier comorien. Plusieurs pays du continent ont tenté de faire pschitt à l’adhésion du mouvement de libération des Comores. On y retrouve surtout sur la liste des pays africains francophones indépendants, qui « roulaient » pour la France. Ceux-ci se sont en effet opposés à l’intégration du Molinaco. « Il y avait Madagascar, la Côte-d’Ivoire. Le Sénégal couci-couça », repense encore Mohamed Athoumane (qui nous avait reçus dans son cabinet situé au quartier d’ambassadeur, jeudi dernier). 


Mais ce ne sont pas tous les pays du continent qui s’y opposaient, qui n’y voyaient pas d’un mauvais œil la reconnaissance des Comoriens dans le comité de libération. Parmi les amis du Molinaco, il y avait principalement des pays progressistes : la Zambie, la Guinée Conakry, le Kenya, l’Ethiopie ou encore le Ghana. Et c’est sans oublier bien sûr l’appui incontournable de la Tanzanie qui a fait un lobbying en faveur du Molinaco pour qu’il soit accepté au sein de la famille. Le pays était, à cette époque, dirigé par le « Mwalimu » Julius Nyerere, un des fidèles partisans de la décolonisation du continent et premier président de la Tanzanie indépendante.
D’autres personnalités politiques tanzaniennes ont joué rôle clef dans la reconnaissance continentale et mondiale du Molinaco. Le président du comité de libération de l’Oua, dont le siège se trouvait à Dar-es Salam, par exemple, Hakim Mbita, décédé l’année dernière, et le chef de la diplomatie tanzanienne, Salim Ahmed Salim. « Le premier fut un ami des Comores, pendant que le second se considérait toujours comme un Comorien. L’implication de ce dernier qui se trouvait à la tête du comité de décolonisation de l’Onu a favorisé l’inscription des Comores parmi les pays à décoloniser », a souligné Ahmed Thabit.

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