Cette fois, la machine est enclenchée avec l’investiture du Comité de pilotage survenue hier matin au palais du peuple sous la présidence du chef de l’État Azali Assoumani. Dans son discours, ce dernier est revenu longuement sur la nécessité de préserver l’unité et la cohésion nationales tout en espérant que ce premier pas vers les assises nationales saura jeter les bases d’une émergence attendue à l’horizon 2030.
L’investiture du comité de pilotage est une étape importante des Assises nationales. Elle se fait avec la ferme détermination de mettre tout en œuvre pour réussir cet événement et permet également de rappeler les attentes des Comoriens. Après 25 ans d’histoire tumultueuse, nous avons réussi trois alternatives politiques et pacifiques en 17 ans tout en renforçant la bonne gouvernance, la démocratie et la cohésion nationale a commencé par affirmer le chef de l’État.
En présence de tous les membres de son gouvernement et des gouverneurs de Ngazidja et Mwali, Azali Assoumani a rappelé que les assises nationales étaient une initiative de la société civile et qu’elles seront inclusives, participatives et représentatives.
“Il nous faut évaluer notre passé pour préparer l’avenir des futures générations. C’est pourquoi je rappelle que le Cpan n’est pas les assises nationales. La nomination de ses membres qui est intervenue après le décret de composition, donne aux membres de ce comité la lourde responsabilité d’assurer le déroulement des travaux et imprimer la dynamique dans les commissions pour les choix des thèmes qui seront abordés” a dit Azali Assoumani avant de lancer un message à l’endroit des plus sceptiques.
Je veux rassurer tout le monde et lever les ambiguïtés et les doutes sur le Cpan. Les résolutions et les conclusions ne vont pas émaner de ce comité mais d’un consensus national. Raison pour laquelle, j’appelle à la participation de tout le monde devait-il insister.
Un bilan sans concessions
Le président de la République est revenu sur les arguments qui rendent incontournable la tenue des assises nationales en parlant non seulement du timing mais également des événements qui ont marqué l’histoire du pays. Pour lui, “C’est un cadre idéal de réflexion pour le décollage économique de notre pays, sauvegarder la paix et l’unité nationale. Ce sera également l’occasion d’aborder les questions clefs qui ont plombé notre histoire en faisant un bilan lucide et sans concessions sur la gestion de l’État et les crises que nous avons connues”.
Outre la transparence, la gouvernance socio-économique, l’éthique, la solidarité et la méritocratie pour impulser une dynamique de développement économique dans la stabilité, la démocratie et l’unité, Azali Assoumani est revenu sur
les deux présidents assassinés et la déportation d’un autre avec la complicité de certains Comoriens. On ne peut pas fermer les yeux et faire comme si de rien était.
Le locataire de Beit-salam estime que l’accompagnement de la communauté internationale permettra de garantir les conclusions et autres résolutions qui sortiront des assises nationales et exhorte ainsi les membres du Cpan à “travailler avec dignité et professionnalisme parce que vous avez la confiance de tout un pays”.
Au sujet des partis politiques et de ceux qui ont brillé par leur absence, le président de la République a encore une fois laissé entendre que seules les assises permettront de lever les doutes.
Ils doivent venir exposer leurs craintes et leur scepticisme pour trouver des solutions. Je veux rassurer que les décrets ne sont pas des lois et que même ces dernières, on peut les revoir avec le concours des députés. Si on s’aperçoit qu’il y a des choses à revoir, nous changerons. Rien n’est fermé. J’aimerais que 70% des travaux soient consacrés au développement du pays a dit le président
avant de rappeler que “parfois la présence d’une personne dans un événement ne nécessite pas une invitation”. Dans son intervention, Azali Assoumani a rappelé qu’actuellement, il n’y a que six partis politiques reconnus légalement et que les assises permettraient de revoir les conditions d’existence des formations politiques.
Penser aux futures générations
Intervenant au nom du Mouvement du 11 août, Amina Abbas s’est employée à rappeler le caractère indépendant et neutre du Cpan.
Ces assises suscitent beaucoup d’espoir et les Comoriens attendent des résultats. Toutefois, nous savons qu’elles inquiètent une partie de la population qui pense que dans le fond, il s’agit d’une tribune qui va permettre la suppression de la tournante. Le soutien désintéressé du chef de l’État nous permettra de mettre le pays sur les bons rails en faveur du développement a-t-elle dit
non sans parler d’un bilan sombre et d’un pays qui stagne depuis 42 ans d’indépendance. Pour elle, les Comoriens sont “consternés par la médiocrité des institutions et l’État de déliquescence générale du pays”.
Revenant sur la question de Mayotte, Amina Abbas n’a pas pris de gants pour dénoncer une “indépendance inachevée, une multitude de mascarades d’accords visant à consolider l’ancrage de Mayotte dans la France, des expulsions à Mayotte dans des conditions scandaleuses et une déstabilisation permanente due à cette indépendance inachevée malgré les différentes résolutions de l’Onu”.
Cette adhérente du M11 recense les défis liés à l’énergie, la justice, l’équité, la répartition des richesses, les esprits claniques, la jeunesse, la santé entre autres. Le discours de la veuve d’Abbas Djoussouf a été longuement ovationné. Si bien que le président de la République a tenu à lui installer une chaise aux premières loges.
Présente dans la cérémonie, la communauté internationale a pris la parole par l’intermédiaire de la représentante de l’Union Africaine et par ailleurs émissaire envoyée par le président de la Commission africaine.
“Pour l’Union africaine et les partenaires internationaux, l’organisation de ces assises est une initiative louable d’autant plus qu’il est légitime, après 42 ans d’indépendance, de se poser des questions pour l’avenir, en vue d’améliorer la qualité de la vie des Comoriens et atteindre l’objectif de l’émergence en 2030. Il s’agit d’un grand pas pour la concrétisation du dialogue national. Le Cpan a la lourde responsabilité de consolider l’unité et la cohésion nationales tout en jetant les bases du décollage économique du pays” a fait savoir Hawa Ahmed Youssouf.
Pour celle qui prenait la parole au nom de l’ensemble du corps diplomatique, toutes les dispositions doivent être prises pour “ne pas réveiller les vieux démons” et annonce pour cela que l’”Ua ne ménagera aucun effort pour accompagner cette initiative”.
Hawa Ahmed Youssouf conseille de prioriser la recherche du consensus pour garantir la stabilité. Si le représentant de l’Assemblée de l’Union, Maoulana Charif estime que “les hommes politiques pensent aux prochaines échéances et les hommes d’État pensent aux prochaines générations”, Saïd Mohamed Sagaf, membre du M11, dénonce “un boycott lourd de sens”.
En effet, ni les anciens présidents Ikililou Dhoinine et Ahmed Abdallah Sambi, ni le gouverneur de Ndzuani Salami Abdou Salami et son représentant encore moins le représentant du parti Juwa, Mohamed Bacar Dossar pour ne citer qu’eux n’étaient présents à la cérémonie.
A ces absences, il faut ajouter le retrait du Cpan des représentants venus de l’Alliance de l’opposition. Autre absence remarquée, celle de Mohamed Idriss, un membre à part entière du M11 et (ex ?) fervent défenseur des assises.