Tout récemment à la mosquée de vendredi de la Place Badjanani à Moroni, on a célébré la quarante-septième commémoration de la mort du président Saïd Mohamed Cheikh. A cette occasion, il y a eu un bref rappel sur ses qualités morales et humaines. Par association d’idées, je me suis souvenu de son livre, de ce livre auquel il tenait beaucoup et dont je n’ai jamais entendu parler par quelqu’un d’autre que lui-même s’adressant à moi.
Il m’en a parlé à trois reprises. La première fois, c’était environ quatre ans avant sa mort dans la salle de la “Délégation des Comores”, rue Oudinot à Paris, où les étudiants ont accès libre et où tout le monde se côtoie.
A ma grande surprise, le président, en baissant un peu la voix comme pour ne pas se faire entendre que par moi, m’a fait part de son intention de rédiger un mémoire sur le sultan Saïd Ali. Il a ajouté qu’il lui faudra, pour cela, se documenter dans les archives du ministère des Territoires d’outre-mer (Tom).
L’année suivante, dans la même salle et dans la même ambiance, affichant un air visiblement triomphal, il m’a informé qu’il a fait transférer sur Moroni toute la documentation dont il avait besoin et que son travail avançait bien.
Lors du séjour qui fut son dernier en France, il m’avait reçu dans son bureau pour un autre sujet, mais avant de me libérer, il était revenu sur son livre en m’informant qu’il l’avait terminé, et qu’il était en quête d’un bon éditeur.
Je me résume donc en déclarant qu’un livre écrit par le président Saïd Mohamed Cheik sur le sultan Saïd Ali, et un lot de documents concernant les Comores transférés de Paris à Moroni font partie du patrimoine national. Il faut les trouver. Il faudra donc les chercher.
“Au premier rang”
Le président Cheikh a toujours été au premier rang de la chose politique comorienne dès la fin de la Seconde guerre mondiale en 1945. Un livre écrit par lui devrait faire l’objet de curiosité pour tout citoyen comorien. Le sultan Saïd Ali qui a intéressé Saïd Mohamed Cheikh n’est pas le “batailleur” comme certains le désignaient, mais plutôt le captif de la France auquel le président s’identifiait quelque part.
Le sultan Saïd Ali se battait pour se maintenir sur la seule île de Ngazidja alors que le président Saïd Mohamed Cheikh représentait valablement et légalement les quatre îles des Comores mais devant la France seulement, au moment où ses pairs représentaient leurs peuples respectifs aux Nations unies et partout dans le monde.
Rédiger un mémoire sur Sultan Saïd Ali revient à montrer le comment de la colonisation des Comores par la France.
Il y a environ dix ans, j’ai parlé de ce livre à son fils Mahmoud. Mais ce dernier à la mort de son père était encore un enfant. Ces questions ne pouvaient pas avoir de la consistance pour lui. Disons qu’à la mort du président Saïd Mohamed Cheikh, les Comores étaient encore une colonie française.
Son directeur de cabinet, un Français du nom de Groussol, obéissait naturellement aux ordres venant de France. On peut donc supposer que les archives sont retournées au ministère des Territoires d’Outre Mer, et que la publication du livre est interdite par l’Etat français.
Prenant le risque de défoncer des portes ouvertes, j’estime que le livre du président Cheikh a une valeur de dimension nationale qu’il faut le considérer comme faisant partie des intérêts supérieurs de notre Etat-Nation.
Aussi j’espère que l’Etat comorien mettra tout en œuvre pour trouver ce livre, à travers la diplomatie, l’Université des Comores toutes disciplines confondues et la jeunesse car elle serait la première à en bénéficier. En effet qui ne sait pas d’où il vient ne saura jamais s’orienter.
Mon témoignage porte sur une période qu’il faut évaluer à une année près. En effet je n’aurai jamais pensé que j’aurai à rendre compte de tout cela aujourd’hui.
Je profite de cette occasion pour publier une photo inédite illustrant peut être l’affirmation de Saïd Mohamed Cheick selon laquelle “L’Ile de Ndzuani a une avance politique de vingt cinq ans sur ses îles sœurs”.
*Le titre, le chapeau et les intertitres sont d’Al-watwan