Mohamed Msaidié, élu de Moroni-Sud pour le parti Juwa, rappelle que dresser le bilan officiel de cette législature incombe au bureau de l’Assemblée. Cependant, il se montre critique quant à la dynamique générale de l’institution. «Pour moi, un parlement monocolore, dominé par une majorité écrasante de la Crc et soumis au pouvoir qui l’a mis en place, ne peut produire de véritables résultats », confie-t-il. Mohamed Msaidié pointe du doigt l’absence de débats et d’oppositions marquées, décrivant un parlement «sans animation, ni véritable débat,» qu’il assimile à une simple «chambre d’enregistrement ». Il évoque même la destitution «controversée d’un député qui, pour avoir refusé de suivre les directives du parti majoritaire, a été démis de ses fonctions sans respect des procédures ». L’élu en question n’est autre qu’Abdallah Saïd Sarouma qui a perdu le statut de membre de son parti, et de fait, de celui de député conformément à l’article 69 de la constitution qui stipule que « tout député qui, en cours de mandat démissionne de son parti ou change de formation politique perd automatiquement son siège à l’Assemblée de l’Union ».
«Absence de débat et de contrôle de l’action du gouvernement»
Pour Fahmi Saïd Ibrahim El Maceli, élu deux fois sous l’étiquette du Parti pour l’entente comorienne (Pec) et député d’Itsandra sud, la mandature actuelle a également « failli à sa mission ». Selon lui, la législature n’a pas su remplir son rôle de législateur indépendant ni exercer de manière crédible le contrôle de l’action gouvernementale. «Ce fut une législature amorphe, sans débat et défaillante dans son action », tranche-t-il. Il constate que «quasiment toutes les lois adoptées en cinq ans furent proposées par l’exécutif » et non par les parlementaires eux-mêmes. Tout en imputant la responsabilité à cette majorité écrasante, Fahmi Saïd Ibrahim El Maceli souligne également la part de responsabilité de l’opposition, qui avait choisi de boycotter les élections de 2020. «Le bilan est inexistant », conclut-il, regrettant « l’absence de textes substantiels » durant cette période.
Abdou Ousseini, ancien président de l’Assemblée nationale, tient à rappeler le rôle fondamental de l’institution : voter les lois et contrôler l’exécutif. «Pour remplir cette mission, elle doit être indépendante et élue démocratiquement par les citoyens, afin d’éviter les conflits d’intérêts », insiste-t-il. S’il reconnaît que l’Assemblée a procédé au vote de lois, il estime cependant que le processus a manqué de démocratie et de transparence. «Quant au contrôle du gouvernement, il y a eu un problème, car on ne peut être à la fois juge et partie », explique-t-il, déplorant l’absence d’une véritable représentation populaire dans les décisions. En guise de bilan, l’ancien député de Nyumakele 1 sous l’étiquette de l’Updc ne mâche pas ses mots et le juge «négatif» tout en estimant indispensable que les futures élections législatives soient «libres et transparentes » pour permettre une véritable diversité d’opinions à l’hémicycle.
Ibrahim Mohamed Soulé, député de Moroni-Nord pour le parti Juwa, souligne l’absence de pluralisme dans cette législature. «Tout le monde sait que l’actuelle législature qui s’achève était monocolore, puisque l’opposition avait dédaigné se présenter aux élections législatives », rappelle-t-il. Selon lui, cette absence de contrepoids a permis à la majorité de transformer l’Assemblée en simple caisse de résonance pour les initiatives de l’exécutif. «Le bilan, tout le monde le connaît », affirme-t-il. «Toutes les lois présentées ont toujours été adoptées à l’unanimité sans trop ou pas du tout de contestation ». En guise d’espoir, Ibrahim Mohamed Soulé souhaite que les prochaines élections apportent un renouveau démocratique, avec un parlement où «le débat démocratique aura vraiment sa place ».A noter qu’Al-watwan a essayé de recueillir les réactions de plusieurs autres anciens députés aujourd’hui proches du pouvoir, mais n’a pas obtenu de réponse de leur part.