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Macky Sall à Moroni I Une visite d’État à la dimension historique des relations

Macky Sall à Moroni I Une visite d’État à la dimension historique des relations

Politique | -   Mohamed Soilihi

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Moroni déroule le tapis rouge, pour la deuxième fois, à un chef d’État sénégalais. Macky Sall est venu donner du tonus à la coopération initiée par Senghor il y a 46 ans. La visite d’État que va entamer le président du Sénégal, fraichement porté à la tête de l’Union africaine, témoigne aussi des liens forts d’amitié entre Macky Sall et Azali Assoumani.

 

Macky Sall, quatrième président de la République de Sénégal, effectue une visite d’État de près de 24 heures à Moroni depuis ce matin samedi 26 février. Il est le deuxième chef de l’État sénégalais à fouler le sol comorien, après Léopold Sédar Senghor en 1976. Ce sont donc 46 ans de relations d’État qui sont célébrées, à cette occasion, mais l’amitié entre les deux peuples Sénégalais et Comoriens remonte loin dans l’histoire coloniale.

À l’accession des Comores à l’indépendance en 1975, les autorités sénégalaises de l’époque ont aussitôt offert l’hospitalité légendaire de la Téranga à la nouvelle république. Premier État africain indépendant à venir s’enquérir de la situation du nouvel État comorien qui, aussitôt accédé à la souveraineté internationale, a connu son premier coup d’État. La proclamation unilatérale de l’indépendance et la ligne politique suivie par le président Ali Soilihi, qui renverse le père de l’indépendance en moins d’un mois de l’accession, ont précipité le retrait de l’assistance, notamment technique, de la France aux Comores. Le président Léopold Sédar Senghor arrive aux Comores en juillet 1976 et signe des accords avec les autorités de Moroni.

Des accords de coopération technique et diplomatique

La visite officielle dans l’archipel a beaucoup marqué l’opinion étant donné qu’il fut le premier chef d’État du monde à fouler le sol des îles Comores indépendantes. Son séjour a été ponctué d’un long entretien avec le président Ali Soilihi et il a signé, dans la foulée, des accords de coopération en matière de personnel technique, pour l’envoi d’enseignants, et en matière de représentation diplomatique, avec la nomination d’un ambassadeur du Sénégal aux Comores.

C’est dans le cadre de l’Agence de coopération culturelle et technique (Acct), l’ancêtre de la Francophonie, que ces accords ont permis l’envoi d’enseignants du cycle secondaire dans les lycées des Comores. Mais aussi la rupture brusque des relations avec la France voit la fermeture des frontières et les difficultés d’accéder aux universités et écoles en France pour les étudiants comoriens. Le Sénégal, au même titre que la Côte d’Ivoire et le Maroc, commence à accueillir les enfants comoriens à la fin des années 1970. Dans de nombreux pays, l’ambassade du Sénégal s’occupait des cas des ressortissants comoriens.

La coopération entre les deux pays est aussi renforcée au début des années 2000 à travers la signature, sous le régime Azali I, des accords généraux de coopération dans le domaine de la diplomatie, de l’économie, de l’éducation, de la culture et du commerce. Plus tard, le Sénégal et les Comores signent, en juillet 2016, un accord sur la mise en place d’une Commission mixte.

Destination d’un grand nombre d’étudiants

Jusqu’aujourd’hui, le Sénégal demeure l’un des pays d’accueil du plus grand nombre d’étudiants comoriens, notamment pour les cursus de deuxième et troisième cycle. L’Union des Comores compte parmi ses ressources humaines des administrateurs, médecins, économistes, juristes, diplomates, sociologues, journalistes et autres techniciens formés dans les universités et grandes écoles au Sénégal.

Longtemps représentées à un niveau de consul honoraire au Sénégal, les Comores ouvrent leur représentation diplomatique à Dakar en 2009 et le diplomate Mahmoud Soilih, ancien sortant de l’École nationale d’administration et de magistrature du Sénégal, a été le premier ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire accrédité par l’État comorien. Le poste sera confié ensuite à Assudine Abdallah, dont le mandat se verra écourté et remplacé par le diplomate Moustakim Said Attoumane en 2015. Depuis l’année dernière, c’est l’ancien ministre Ahmed Ben Said Jaffar qui s’est installé à la Rue Gallieni de Dakar.

Des relations séculaires

Au-delà de cette coopération entre États,  les comoriens et les sénégalais se sont connus bien avant les indépendances. Déjà dans les années 1800, les deux peuples se côtoyaient dans les différentes unités militaires, désignées sous l’appellation de Tirailleurs sénégalais. Ces derniers étaient un corps militaires africain appartenant aux troupes coloniales, constitué au sein de l’empire colonial français. Les comoriens et les sénégalais se trouvaient dans le premier régiment de corps formé en 1857 comme en 1885 au sein de la compagnie africaine cantonnée à Nosy-Be. Entre 1914 et 1918, dans le cadre de la Première guerre, environ 1.300 Comoriens ont été recrutés et envoyés au combat dans le bataillon des Tirailleurs.

Après la deuxième guerre mondiale, l’amitié des deux peuples prendra encore des proportions lorsque Said Mohamed Cheikh, député à la représentation parlementaire française, va côtoyer ses homologues députés sénégalais, Léopold Sédar Senghor et Lamine Gueye, à l’Assemblée nationale française. Ils se lient d’amitié avec les autres députés africains et travaillent de concert pour faire avancer les droits des populations des colonies.

En 1958, le Sénégal et les Comores optèrent massivement pour le «Oui» à la Communauté lorsque le général Charles de Gaulle propose de ratifier par référendum un nouveau projet de constitution. Si l’archipel n’a pas pris son indépendance au même moment que le Sénégal c’est que les élites politiques comoriennes de l’époque considéraient que le territoire n’était pas prêt pour l’indépendance compte tenu de son retard économique et du déficit d’infrastructures de base. D’où le choix de l’autonomie interne pour l’archipel.  

 

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