Arborant les messages “pas de référendum sans la Cour constitutionnelle” et “liberté de circulation des citoyens”, ces manifestants n’avaient pas entamé une marche : ils s’étaient alignés sur le bord de la chaussée avec leurs banderoles, et récitaient des versets coraniques. Peu de temps après le début de cette lecture, les gendarmes sont arrivés sur les lieux et se sont postés tout autour, la laissant se poursuivre. Mais quelques minutes plus tard, ce sont les éléments du Peloton d’intervention de la gendarmerie nationale (Pign) qui investirent les lieux. Ils entreprirent de disperser les manifestants, et essuyèrent des jets de pierres. Leur réaction, violente, ne s’est alors pas fait attendre : plusieurs manifestants ont été molestés, certains embarqués. Parmi eux, un certain Armed, frère du gouverneur de l’île, Dr Abdou Salami Abdou.
Climat tendu
Il faut souligner que la gendarmerie, ayant eu vent du projet de ce rassemblement depuis la veille, avait quadrillé la place Mzingaju à Misiri, autre quartier du centre de Mutsamudu, croyant que c’était là-bas où la manifestation allait se dérouler. Ici, les agents de l’opérateur Telco, dont une partie s’installe dehors pour recevoir les clients, ont été priés d’évacuer les lieux, et les passants interdits de stationner. Quelques minutes plus tard, après la dispersion du rassemblement à Mroni, c’est toute la ville de Mutsamudu qui fut en effervescence : écoles évacuées, magasins et marchés vidés, et une panique manifeste dans les rues, où piétons et véhicules fuyaient dans toutes les directions.
Disons que le climat était visiblement tendu sur l’île depuis le dimanche. Ce jour-là, les militants et sympathisants du parti Juwa avaient massivement fait le déplacement à l’aéroport de Wani, pour accueillir leur leader, l’ancien président Ahmed Abdallah Sambi. Ils trouveront l’aéroport fermé, et apprendront que son vol a été annulé. L’armée y avait effectué quelques rondes, sans intervenir. Mais le lendemain au soir, Houssam Mouhidine et Charkane François, deux conseillers du gouverneur Salami, seront arrêtés par la gendarmerie et placés en garde à vue. Et le lendemain mardi, jour du rassemblement, ce fut le tour de Mahamoud Mohamed Elarif, le coordonnateur régional du Juwa, d’être à son tour appréhendé au quartier général de son parti. A l’heure où nous écrivions ces lignes, les motifs de leur arrestation n’étaient pas clarifiés.
Sardou Moussa