Pourquoi la plénière n’a-t-elle pas eu lieu ?
Tout simplement et seulement pour une chose. Le président de l’Assemblée, étant souffrant, il ne pouvait rester plus de deux heures de débats. Il aurait donc fallu que je le remplace mais en coulisse les tractations n’ont pas abouti puisque mes collègues députés de l’opposition s’y étaient opposés en criant à la manœuvre. Mais à ma grande surprise lorsqu’ils furent informés du report de la plénière, ils ont préféré rester dans l’hémicycle pour affoler la toile avec les réseaux sociaux comme c’est la mode en ce moment.
Comment jugez-vous la volonté de la part de vos collègues députés de faire barrage à la loi de réhabilitation ?
La question la plus lancinante pour nous aujourd’hui est celle de savoir si l’opposition est réellement au service des intérêts du pays ou si au contraire elle pratique la politique de la terre brulée. Pour moi, cette farouche opposition est le produit d’une mauvaise foi. Je rappelle qu’en septembre 2009, le président Sambi a signé deux ordonnances sans demander l’autorisation de l’Assemblée. Il s’agissait de l’ordonnance N°09-005/PR qui stipule dans ses articles premier et deuxième l’abrogation de certains articles de la loi électorale ainsi que la modification de certains autres. La deuxième ordonnance portant le N°09-006/PR va tout aussi dans le même sens notamment en son chapitre premier fixant les conditions d’élection des députés. Ainsi, il convient de rappeler que ces ordonnances n’ont aucune différence avec celles que le président Azali aurait souhaité que l’Assemblée lui donne l’autorisation de signer. Je me demande si le président Azali n’est pas victime aujourd’hui de son attachement aux principes de la démocratie.
Pensez-vous donc qu’il y aurait deux poids et deux mesures?
Il n’y a pas l’once d’un doute ; cela va sans dire mais c’est toujours mieux en le disant !
Le mensonge a trop circulé. Dans la confusion la plus détestable, certains de mes collègues ont réussi à faire circuler les rumeurs selon lesquelles le président Azali veut s’approprier l’éternité en politique. Des accusations infondées et bien stériles. Jamais une rumeur, dans le pays, n’a fait autant de dégâts et des commentaires aussi infâmants.
On se plait, dans le piège de la haine et de la rancœur, à raconter tout et n’importe quoi, au nom de la liberté d’opinion. Ainsi, dans ces derniers jours, des accusations plus abjectes ont été relayées par certains collègues dans les réseaux sociaux dont le prêchi-prêcha se construit dans les obscénités et l’absurdité. Ce sont là des faits qui sont nuisibles à notre dignité à tous.
L’opposition prétend qu’il y a une anguille sous roche concernant cette loi. Que répondriez-vous ?
C’est vraiment hallucinant ce genre de soupçons et surtout quand ils sont prononcés sans aucune preuve à l’appui par des gens qui sont censés être des législateurs. Par cette propagande infâme, certains ont démontré leur absence de maîtrise de textes qu’ils contresignent, ce qui constitue un oubli regrettable. Au lieu de se projeter dans des imaginations farfelues, il serait honorable pour un élu de parler au peuple de la vraie nature des choses. Mais malheureusement certains veulent imposer la pagaille comme idéologie politique et cela les incite insidieusement à ignorer ou à exagérer certaines choses. On a assisté ces derniers jours à un prosélytisme politique impensable. L’opinion a été simplement prise en otage ; elle a subi un véritable matraquage politico-médiatique d’une incroyable gravité. Je vous dis qu’il n’y avait aucune vérité dans tout ce qui a été avancé ; il s’agissait tout simplement d’une argumentation arbitraire savamment orchestrée par l’opposition.
Réellement qu’est-ce qui allait être changé et qui fait encore peur à l’opposition ?
Concrètement, il n’y a aucune raison d’avoir peur mais certains ont cette mauvaise habitude de vouloir passer pour une raison ce qui n’en est pas une. Le projet de loi d’habilitation n’est rien d’autre en effet qu’une adaptation et une mise en conformité de certaines dispositions par rapport à la nouvelle Constitution. Juridiquement, il était question de procéder - conformément à l’article 56 de la constitution et dans le cadre de la révision du code électoral - à la suppression de certains éléments et termes devenus caduques en particuliers l’élection de conseillers, les modalités de désignation de Vice-présidents. Il y avait aussi de nouvelles dispositions à introduire notamment en ce qui concerne l’âge requis pour être candidat aux élections présidentielles qui est ramené de 40 à 35 ans.
Je vous rappelle aussi qu’auparavant la Cour constitutionnelle et la Cour suprême étaient des institutions distinctes. Avec la nouvelle Constitution toutes les parties relatives à la Cour constitutionnelle sont désormais du domaine de la Cour suprême. Le projet de loi d’habilitation consistait donc à prendre en compte toutes ces modifications et rien d’autres.
Le président Azali avait-il tort d’enlever dans l’actuelle Constitution l’épée de Damoclès qui lui permettait de dissoudre l’Assemblée?
Non, bien au contraire, je pense qu’il avait tout à fait raison de le faire. Le président Azali a un sens très élevé de la responsabilité et c’est une décision qui l’honore. C’est un témoignage évident du caractère démocratique de sa politique et de son engagement pour le maintien de la cohésion sociale et de la stabilité institutionnelle.
Aujourd’hui, les parlementaires peuvent exprimer leur opinion sans aucune contrainte. Cependant, nous devons à notre tour agir avec beaucoup de discernement pour prouver que nous méritons la confiance qui nous est dévolue par la Constitution actuelle. Il est toutefois regrettable de constater que le comportement de certains députés est contraire à la philosophie de nos institutions.
Qu’est-ce qu’il reste à faire pour faire face maintenant à cette nouvelle situation ?
J’ai l’intime conviction que le chantier de la reconstruction nationale ne s’arrêtera pas à mi-chemin. J’invite ainsi les forces vives à accompagner sans peur l’élan de transition qui conduira le pays dans la voie du progrès. La construction de la paix et de l’unité ne cédera à aucun chantage ni pression. Tant pis pour ceux qui ont fait vœu de haïr la Nation et qui usent toujours les mêmes raccourcis pour s’attaquer à ses dirigeants.
Avec l’aide de Dieu, nous continuons le travail pour diminuer le retard cumulé et provoquer l’éclosion d’une Nation harmonieuse pour la prospérité commune. J’ose espérer aussi que les disputes stériles ainsi que les calomnies dévastatrices, inconsciemment relayées et diffusées sur les réseaux sociaux, ne finissent pas par être considérées comme une idéologie de gouvernance. Je compte aussi sur une véritable prise de conscience de la part de nos citoyens pour aider le pays à prendre le destin en main pour un sursaut national.
Propos recueillis par M. Mbaé