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Moindjie M. Moussa, ministre de l’Education nationale : «Les parties concernées doivent s’asseoir pour sortir de cette crise»

Moindjie M. Moussa, ministre de l’Education nationale : «Les parties concernées doivent s’asseoir pour sortir de cette crise»

Politique | -   Abouhariat Said Abdallah

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La machine semble un peu grippée en ce début d’année scolaire avec la grève illimitée entamée par le personnel de l’enseignement. Le ministre Moindjie Mohamed Moussa, qui nous a accueilli dans son bureau hier en milieu de journée, a abordé plusieurs sujets d’actualités sur l’Education, les problèmes de l’Université des Comores, les réformes sur l’enseignement coranique et maternel, entre autres. Interview.

 


L’intersyndicale a refusé de reprendre le chemin de l’école et accuse le gouvernement de faire la sourde oreille sur ses revendications. Une sortie de crise est-elle en gestation ?


Il doit y avoir une sortie de crise et les parties concernées doivent s’asseoir pour trouver une solution.


Les enseignants disent que leurs doléances ne datent pas d’hier et brandissaient une menace de grève depuis un moment. Pourquoi n’avez-vous pas essayé d’éviter un tel bras de fer pour que la première rentrée de votre mandature ne soit pas un «échec» ?


 Vous devez leur poser la question puisque le problème date de très longtemps, pourquoi aujourd’hui ? Dès ma prise de fonction, j’ai eu à m’entretenir avec l’intersyndicale d’abord, le 22 juin, six jours après ma prise de fonction, puis à la mi-août et dernièrement il y a huit jours. En moins de trois mois, j’ai discuté avec eux à trois reprises. La dernière fois, on devrait se revoir avec les ministres des Finances et notre collègue de la Fonction publique. Mais à la sortie du bureau, ils ont annoncé à la télévision qu’ils n’allaient pas reprendre les classes. Après notre premier contact, j’ai présenté une note en conseil des ministres pour instaurer un cadre de dialogue. Les cadres du ministère travaillent sur le comment collaborer avec ceux qui enseignent et exécutent ce que le ministère leur dit de faire.


L’Ascobef a annoncé l’introduction de l’éducation sexuelle au primaire. Quelle est la position du ministère de l’éducation face à cette reforme ? Estimez-vous que les enfants de ce niveau-là soient aptes à apprendre de telles notions ?


 Tout ce qui est école, sera abordé prochainement dans le cadre des assises de l’Education nationale. C’est un gros sujet de société et on va reposer la question, si à cet âge on a besoin d’éducation sexuelle. On nous a donné un document qui doit être utilisé pour cet enseignement, je l’ai suspendu et j’attends qu’on se prononce ensemble parce que ce sont des sujets qui devraient se faire en convergence, il doit y avoir consensus national et convaincre les parent s’il y a utilité. Quand on avait leur âge, on nous parlait de choses similaires mais sous d’autres formes. On apprend comment faire les ablutions, comment se laver… en tenant compte de la sensibilité et la pudeur de notre société. Ce sujet, comme d’autres, sera abordé lors des assises sur l’Education.


Vous avez annoncé que parmi vos projets de l’enseignement, c’est d’uniformiser l’école coranique rénovée et la maternelle. Comment comptez-vous vous y prendre ?


Il n’y a pas mille façons. Tout évolue avec le temps. A un moment, l’âge obligatoire pour l’école était 6 ans et avec les Objectifs du millénaire pour le développement, il est ramené à 3 ans. Pendant que cet âge était fixé à 6 ans, les Comores avaient leur école coranique. Entre temps, l’école privée est venue avec ce modèle d’école maternelle, et puis, est arrivée cette obligation de commencer la scolarité des enfants à partir de 3 ans. La manière avec laquelle je vais m’y prendre, on a une école coranique qui est la base du fondement de la société comorienne, c’est par là que se transmettent les valeurs socioculturelles et religieuses des Comoriens. Et ce sont ces valeurs qui différencient les Comoriens des autres. Est-ce qu’on va compléter l’école maternelle par un apprentissage du coran, ou on va compléter l’école coranique classique par un complément des apports pédagogiques psychomoteurs et autres dont l’enfant a besoin pour son meilleur croissance ? Je pense que les Comoriens auront à se pencher sur ce sujet, ce qui ferait qu’on améliorerait l’école coranique traditionnelle mais on ne va pas compléter l’école maternelle, tel qu’on le fait avec l’école coranique rénovée.


Chaque année les résultats des examens nationaux sont pires et témoignent du niveau «minable» des élèves. Quelles solutions comptez-vous apporter pour lutter contre ce fléau ?


 D’abord la diversité. Il faut diversifier et augmenter l’offre de formations. C’est pour cela qu’un chantier complet pour l’école aura lieu dans le cadre des assises. Vous avez raison parce qu’on a eu à organiser les examens et sur l’ensemble des candidats au Bac, il y avait 61% de la série A4, et la moyenne en français est de 5/20. Vous comprenez que ces jeunes ne sont ni littéraires ni scientifiques. Il faudrait dans ce cadre là, pousser l’élite à beaucoup travailler pour les matière scientifiques, mais surtout offrir des possibilités à ces jeunes, qui auront des difficultés à évoluer sur l’enseignement général, d’avoir des formations professionnelles et techniques adéquates. D’ailleurs, le pays en a besoin. Le problème d’emploi qui se pose ici, c’est par rapport à cela, par ce que l’offre de formation n’est pas adaptée à la demande du marché de l’emploi.


A l’Université des Comores, l’histoire de certains enseignants qui auraient monnayé des notes fait grand bruit. Certains risquent même la radiation. Quelles mesures préconisez-vous pour éradiquer ces pratiques qui ont toujours terni l’image de l’Udc ?


 Ces faits comme d’autres sont répréhensibles. S’ils s’avèrent, ils méritent les sanctions les plus appropriées. L’Université a une autonomie de gestion, elle est sous la tutelle administrative du ministère de l’Education nationale. Pour l’heure, ces informations ne sont pas remontées au ministère. Nous leur laissons en charge la responsabilité jusqu’au moment où ils enverront le dossier au ministère et à ce moment là, on vous dira ce qu’on fera. Mais ce qui est sûr, le ministère pourrait diligenter une enquête administrative pour connaitre le fondement et la pertinence de cette information.


Les responsables de l’université ont mis en place des mécanismes pour faire face à la crise financière que traverse l’institution. Etudiants, enseignants vont devoir y contribuer. Comment est-on arrivé jusqu’à là ? Est-ce l’idée du gouvernement ?


 Les mesures prises par les responsables présents, qui ont une gestion transitoire, sont justifiées par la situation que l’Université traverse. Face à la difficulté de cette institution, le gouvernement est sur une démarche globale qui pérenniserait l’institution et lui donnerait la hauteur et le gabarit qu’elle mérite. Pour l’heure, c’est au niveau de l’Université sur la gestion courante que la question devra être posée, parce que ce que prépare le gouvernement c’est plutôt l’orientation de l’enseignement supérieur, pas seulement l’Université.


Depuis trois mois les textes portant réforme de l’université remis au président sont rangés dans un tiroir. Pourquoi ce silence ?


 Non ! Ils ne sont pas rangés dans un tiroir. Là aussi, il y a un problème de chronomètre. Un état ne fonctionne pas du tic au tac. Ce sont des propositions pour orienter l’Université, remises par les enseignants de l’Udc qui sont à la fois les opérateurs de ce document qu’ils ont composé. C’est normal que l’administration, qui est le régulateur, regarde si effectivement, ces documents sont conformes à ce qu’on veut faire. Pour orienter une université et l’enseignement supérieur dans un pays, trois mois, ce n’est pas le temps maximal pour dire que c’est rangé dans un tiroir.


Quand aura-lieu l’élection du nouveau président de l’Université ?


Vous avez parlé des documents remis par les enseignants de l’Université et de période transitoire et moi je vous parle d’assises. Parce que si on veut trancher sur un de ces problèmes, or qu’on va aborder les problèmes globalement en moins d’un mois, on aurait fait un travail pour peu de choses. On préfère garder ce cap et arriver aux assises pour examiner tous les aspects et prendre une ligne cohérente. Les assises auront lieu au mois d’octobre prochain, on va parler de toute l’école comorienne, du préscolaire à la recherche scientifique et les instruments administratifs qui devraient y avoir. Il y aura également les nominations ou mode de nomination. Aucun sujet ne sera épargné, mais ce sera fait dans ce cadre là.

Propos recueillis par
Abouhariat Saïd Abdallah

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