C’est une victoire. Le Mouvement du 11 août a été (enfin) reçu par le locataire de Beitsalam (Ikililou n’a jamais accepté de le recevoir), deux ans après sa création. La délégation, conduite par son principal leader, Ali Bazi Selim, était forte d’une vingtaine de personnes.
Said Mohamed Sagaf, l’ancien ministre des Affaires étrangères, une des chevilles ouvrières de l’organisation est le premier à avoir pris la parole. Il a rappelé les circonstances de sa création, le combat mené depuis deux ans pour que les assises de bilan aient lieu.
L’ancien ministre a, en outre, énuméré les nombreuses crises qui ont secoué le pays depuis son accession à l’indépendance jusqu’à aux Accords de Fomboni. Celles-ci ont empêché la tenue d’assises de bilan.
Confiance sur la tenue des assises
Il a repris le principal message que Bazi a délivré lors de son fameux discours du 11 août 2015 sur l’esplanade de l’ancienne chambre des députés des Comores. "Il faut nous asseoir pour discuter".
Le temps est sans doute venu de le faire, avec la bénédiction du garant des institutions. Il est vrai que lors de la lancée du Mouvement, plusieurs formations politiques et associations avaient affiché leur adhésion. Un réel engouement s’était emparé de la société civile. Près d’une cinquantaine en tout.
Les chancelleries, les organisations internationales ont toutes manifesté leur accord pour tenir ce grand-rendez des comoriens, mais à condition que l’Etat y participe.
Manque de chance, l’appel de Bazi a presque coïncidé avec la tenue de la dernière élection présidentielle, ce qui n’était pas le meilleur moment pour tenir des assises.
«Nous avons mis à profit tout ce temps, pour élargir le mouvement, nous avons créé une coordination qui a continué à travailler, notamment en créant une coordination à Ndzuani, Mwali et une autre en France», a indiqué, par ailleurs, l’ancien chef de la diplomatie.
Said Mohamed Sagaf a exprimé sa confiance quant à la tenue desdites assises, parrainées par le gouvernement. «Nous avons tous constaté que vous y étiez favorable en lisant la presse mais il vous fallait déterminer le moment».
L’ancien ministre Ali Bazi Selim s’est lui aussi exprimé. Malgré son âge, il a tenu à s’adresser au chef de l’Etat en étant debout. Son discours n’a pas changé d’un iota.
Il a dit le mal-être des comoriens, l’aspiration qu’ont ces derniers à avoir un Etat fort, respecté qui s’éloignera des affres de la mendicité.
«Monsieur le président, il y a quelques temps, vous avez exprimé le vœu que notre pays emprunte le chemin de l’émergence, je tenais à vous assurer que les assises nationales ne peuvent qu’aller de pair avec le développement du pays, parce qu’elles montreront les voies et moyens pour le faire», a-t-il déclaré avec la verve qui le caractérise.
Vérité et réconciliation
«Je veux que les citoyens comprennent que ce ne sera pas un tribunal qui va les mettre en prison, mais c’est un moyen pour nous asseoir, discuter, redevenir des frères. Après 42 ans d’indépendance, il nous faut voir loin afin de nous assurer que dans les 40 prochaines années, les comoriens vivront mieux».
Le président de la République, dernier à avoir pris la parole, a montré sa satisfaction et sa fierté de voir des citoyens «se démener pour l’intérêt national, grande leçon pour nos enfants et nous-mêmes».
Azali Assoumani a, par ailleurs, tenu à expliquer pourquoi la Convention pour le renouveau des Comores (Crc dont il est le président d’honneur) n’avait pas manifesté son soutien à l’endroit du Mouvement.
Ma réponse d’hier est différente de celle que je vais donner aujourd’hui, parce qu’hier j’étais un citoyen somme toute ordinaire, je n’avais pas les responsabilités qui sont les miennes aujourd’hui.
Il a également manifesté son contentement «que les membres de l’Organisation se soient rendu compte qu’il fallait que l’Etat prenne les devants ; vous auriez pu faire sans nous et nous donner un procès-verbal que je me serais peut-être empressé de mettre dans un tiroir».
Le reste ne sera que question de volonté. «Les pères fondateurs nous ont montré la voie en proclamant notre indépendance face à une puissance», rappellera le président de la République.
«De la même manière que nous n’avons jamais cessé d’honorer ceux grâce à qui nous sommes aujourd’hui un peuple souverain, nous devons faire en sorte que ceux qui viendront après nous, nous gardent en mémoire parce que nous aurons fait ce pourquoi les pères fondateurs ont pris l’indépendance».
«Les Assises auront lieu, très rapidement bien avant les élections», a-t-il insisté. Il a, par ailleurs, fait savoir qu’il allait recevoir aujourd’hui ou demain des partis politiques, vraisemblablement pour parler des assises.
Il est très probable que nous aurons plus de précisions quant aux modalités de leur tenue dans les semaines à venir. Ce qui est sûr, elles auront lieu, le président Azali Assoumani s’est engagé à le faire.