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Opinion. La démocratie Comorienne est–elle en panne ?

Opinion. La démocratie Comorienne est–elle en panne ?

Politique | -

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En Politique, il y a des moments où le silence signifie mensonge.” Frantz Fanon, les damnées de la Terre, éditions la découverte Paris 1961. Désormais nous savons tous, qu’aux Comores, la démocratie est en panne, elle est menacée : des élus du peuple sont régulièrement arrêtés d’une manière vulgaire par des policiers armés sous les ordres du pouvoir actuel certes.

 

Pour tenter de justifier et se donner bonne conscience, le régime avance ses thèses selon lesquelles “ces députés, de l’opposition, troublent l’ordre public ; ils se permettent chaque fois d’organiser des réunions publiques sans avoir eu préalablement l’avis du ministère de l’Intérieur. “Je me dois de rappeler que ce que nous avons vu, le mardi 8 mai 2018 bien au contraire, le pouvoir a perdu son sang-froid en faisant usage de la violence, de l’intolérance, de la brutalité, du bruit, de la fureur et ceci entraîne des attitudes qui poussent le peuple et leurs représentants à affronter leurs agresseurs dès lors que ces derniers bafouent les libertés de circulation et d’expression. Tout compte fait, je constate que les idées démocratiques sont chez-nous depuis quelques temps, en recul et le piétinement des institutions est devenu la règle quotidienne, le cas par cas !


Si on veut dire d’une femme qu’elle est enceinte ou ne l’est pas, un pays du moins comme le nôtre, n’est pas démocratique ou anti-démocratique de façon tranchée. La démocratie avance ou recule, de même qu’une bouteille se remplit ou se vide, un pays, une société, se démocratisent par dose, à l’image de la bouteille qui peut se remplir après avoir été vide ou à moitié pleine. Il faut que nos gouvernants le sachent la démocratie s’apprend (plus au moins vite) comme la marche pour un enfant, la natation ou la conduite automobile. On s’y attache, on la protège et on la garde. Désormais, nous devons tous savoir que sur le plan politique, l’environnement africain et international rend difficile de renverser (pour la vider) la bouteille démocratique qui se remplit goutte à goutte aux Comores, depuis presque vingt (20) ans. Il faut être patient, aider à remplir la bouteille, empêcher qu’elle soit renversée ou cassée.

La démocratie se gagne et se mérite ⃰

Comme par enchantement la voie démocratique s’est ouverte aux Comores après plusieurs années de lutte ; aujourd’hui tenter de la faire reculer, ce serait dommage et c’est presque impossible. S’engager dans cette voie lorsque l’on est au pouvoir, c’est accepter de le perdre par le vote des citoyens. Et lorsqu’on est opposant, choisir d’y parvenir (et croire que c’est possible) non plus par la violence et des méthodes arbitraires mais par les urnes. C’est pour les uns et les autres entrer dans un système qui a ses règles parmi lesquelles : le respect des institutions et leurs représentants. Il est inconcevable à ce qu’un député, un élu du peuple, soit trainé devant public par des policiers comme un malfaiteur en flagrant délit. Sinon, notre pays va se retrouver de nouveau sur l’Impasse ; or de l’Impasse sortent des incidents ; la violence nait ou renait de la querelle des chefs. Nous sommes, chaque fois obligés de faire appel à l’étranger, ou de le prendre à témoin, signe que le contrôle de la situation nous échappe à tous : gouvernés et gouvernants.


Oui je le dis et je le répète, il n’y a pas de démocratie sans justice indépendante, intègre et respectée ainsi que tous ses auxiliaires. Il y n’a pas de démocratie sans le contre-pouvoir d’une presse elle aussi indépendante. Cela, c’est le fondement mais il n’a y a pas non plus de démocratie au sens plein du terme lorsque les hommes politiques et les Intellectuels sont arrêtés d’une manière arbitraire, au sort obscur et incertain, ou lorsque la liberté de circuler est arbitrairement contrôlée, ou bien encore quand l’éducation et la santé ne sont pas dispensées à un niveau décent d’une manière régulière et permanente. Cela étant, notre devoir à nous les intellectuels, qui subissent l’arbitraire à dose plus au moins concentrée, est de ne pas être inertes et passifs. Il faut réagir, protester, amener et alerter l’opinion internationale, dire son mépris aux tenants de l’arbitraire, les culpabiliser, les résister. Il faut à l’inverse, soutenir les hommes politiques les plus libéraux, encourager leur démarche, contribuer à ce que leur choix démocratique soit populaire et payant. La démocratie, stade supérieure du développement politique, se gagne et se mérite.

Professeur Djaffar Mmadi
Université des Comores
⃰ L’intertitre est d’Al-watwan

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