Djaé Ahamada Chanfi, ancien ministre et ténor de la Crc :
«Cette vague bleue pour les législatives prouve la confiance que le peuple comorien continue d’accorder au chef de l’Etat. Et surtout l’importance capitale que les citoyens accordent au Plan Comores Émergent. Plan Comores Émergent, est un projet ambitieux pour lancer les bases du développement humain de notre pays. Nous avons l’obligation morale et politique de ne plus décevoir les Comoriens.
Surtout que les indicateurs économiques qui bénéficient du quitus des institutions financières internationales montrent que nous sommes sur la bonne voie. Cette domination politique est le fruit d’une restructuration de notre formation politique. N’oublions pas que presque toutes les forces de la mouvance ont apporté leur adhésion à la Crc. Et, en plus, la quasi absence d’une opposition structurée, qui est regrettable nous avantage. On n’a plus devant nous, un adversaire de taille politique».
Me Fahmi Saïd Ibraim El Maceli, candidat indépendant aux législatives :
«D’abord, je fais le constat selon lequel rien ne peut rationnellement et objectivement justifier l’absence de nombreux partis de l’opposition lors de ce scrutin. Quels que soient leurs craintes et leurs bien-fondés, un parti politique ou un responsable politique ne doit pas être absent de ces rendez-vous républicains. C’est précisément dans ces moments que les acteurs politiques, aussi bien personnes physiques que morales, doivent saisir l’opportunité non seulement de dénoncer le gouvernement, mais aussi de critiquer sa gouvernance.
Quelles que soient les insuffisances en matière de sécurisation ou de transparence, un acteur politique crée l’événement, ne serait-ce qu’en dénonçant les irrégularités avérées. Un scrutin est une occasion républicaine idéale pour démontrer au reste du monde que la démocratie est bafouée. Même si le risque est grand de voir une victoire confisquée, le peuple et la communauté internationale sont capables de discerner la réalité et de discréditer un pouvoir. La crédibilité d’un régime repose sur sa capacité à organiser des élections transparentes.
Si tous les observateurs devaient constater un manque de transparence, quoi qu’on puisse dire, l’image du pouvoir en serait irrémédiablement ternie. Nous vivons dans un monde où tout finit par se savoir : il faut parier sur l’intelligence. Certains se tairont peut-être, mais ils n’ignoreront pas la vérité. En 2020, nous avons boycotté les législatives : avons-nous pu dénoncer les irrégularités alors que nous étions absents ? Bien sûr que non. Au contraire, la communauté internationale ne nous a pas compris et, au niveau national, l’opinion a pu croire que seules les élections présidentielles nous intéressent. C’est pourquoi je soutiens – et peut-être me trompe-je – que ne pas participer au scrutin est une faute politique majeure, et c’est bien dommage.
En revanche, prendre part à l’élection a un double intérêt à mes yeux. D’abord, cela permet de porter une vision et des idées sur des questions majeures qui doivent être débattues: la protection de notre terre, la santé publique, l’éducation, ou encore les enjeux commerciaux, pour ne citer que quelques exemples. Ces sujets méritent d’être discutés publiquement et contradictoirement.
Ensuite, la participation de l’opposition aurait permis de mettre en lumière les irrégularités et de dénoncer l’absence d’État de droit. Un véritable État de droit doit être en mesure de garantir les libertés individuelles, de protéger les biens publics et privés, et de respecter la voix du peuple lors d’un scrutin. Dans ce contexte, le pluralisme politique a subi un revers et la démocratie en est de facto affaiblie. Mais où situer les responsabilités ? À mon sens, elles sont partagées entre le pouvoir et nous, l’opposition».
Mouigni Baraka Saïd Soilihi, leader du Rassemblement démocratique des Comores pour l’égalité (Rdce)
«Azali Assoumani continue de récidiver dans ses pratiques habituelles. Comme vous le savez, nous ne reconnaissons en aucun cas sa légitimité. En s’appuyant une fois de plus sur l’armée et la Ceni, la Crc, sous la direction du colonel Azali, a orchestré un nouvel épisode de mascarade électorale le 12 janvier en complicité avec certaines organisations internationales au premier rang desquelles l’Union africaine. Le pays s’enfonce chaque jour davantage dans la crise, et Azali en porte la responsabilité principale».
Aboudou Soefo, président de l’Opposition unie des Comores :
«L’opposition unie des Comores a rendu public un communiqué dans lequel il donne son appréciation sur l’indicible mascarade du 12 janvier 2025. Dans notre pays, il y a désormais ni pluralisme politique ni jeu démocratique. On a assisté à la pire des mascarades que ce pays ait connues, doublée d’une grotesque loterie qui n’a pas fait que des heureux pour servir de maquillage.
Mais comme l’on dit, une hirondelle ne fait pas le printemps : dans le fond comme dans la forme, Azali Assoumani et sa Crc se sont livrés à une entreprise réactionnaire, rétrograde et irrémédiablement liberticide pour la démocratie et l’état de droit dans notre pays. Sans nul doute, ce régime sera abattu incessamment, c’est dans l’air du temps. Mais malheureusement le pays risque de connaître d’autres soubresauts. (...). La Communauté internationale le souhaite- t- elle ? Sinon comment comprendre sa complaisance ? ».
Djaanfar Salim Allaoui, ancien ministre et membre du conseil des sages de la Crc
«Une majorité présidentielle totale assure une gouvernance rapide en réduisant les conflits institutionnels et en accélérant les réformes. Cependant, cela pose un risque pour l’équilibre démocratique, d’où la nécessité d’une opposition structurée et capable de proposer une alternative crédible. Sans cela, le pays serait perdant en cas d’effondrement de la majorité. Mais il faut souligner que l’opposition a toujours eu l’occasion de participer aux élections et d’influencer le paysage politique.
Pourtant, elle s’est désistée d’elle-même des législatives en cours, pour des raisons qui lui sont propres. Le président a régulièrement sollicité l’opposition sur les grandes orientations du pays. Contrairement à certaines accusations, le pouvoir en place, auquel je m’identifie, n’a jamais exclu l’opposition du débat national. Il lui appartient donc de se structurer pour jouer pleinement son rôle démocratique».