logo Al-Watwan

Le premier journal des Comores

Recommandations politiques des assises : Quel poids pour l’opposition comorienne ?

Recommandations politiques des assises : Quel poids pour l’opposition comorienne ?

Politique | -   Mohamed Youssouf

image article une
L’apathie de l’opposition comorienne est le fruit de plusieurs maux que sont la frilosité des partis politiques, le manque d’idéologie, les positions d’attente de certains politiciens et le refus de patienter dans l’opposition en attendant les nouvelles échéances.

 

“Si un jour, je deviens président, j’aimerais bien avoir à faire avec une opposition identique à celle que je vois aujourd’hui”. La phrase est d’un ancien candidat à l’élection présidentielle de 2016 et elle symbolise l’immobilisme, la faiblesse, les tergiversations de l’opposition aux Comores.

Dans ce pays, on a coutume de dire que l’opposition est apathique pour ne pas dire quasi inexistante. Il arrive même que des ténors du pouvoir se délectent de constater les atermoiements de ceux qui se proclament de l’opposition. Alors comment endiguer cette spirale négative qui veut que l’opposition comorienne brille toujours par ses hésitations.

Que faut-il pour disposer d’une opposition digne, crédible et surtout qui pèse dans le débat politique ? Une opposition qui joue son rôle de contre-pouvoir. Une opposition constructrice, productrice et vectrice des valeurs démocratiques.
L’apathie de l’opposition comorienne est le fruit de plusieurs maux que sont la frilosité des partis politiques, le manque d’idéologie, les positions d’attente de certains politiciens et le refus de patienter dans l’opposition en attendant les nouvelles échéances. Elle est également le fruit d’une déconsidération institutionnelle de l’opposition.

Volonté, détermination et conviction sont des mots qui font défaut chez l’opposition comorienne. Pour y mettre fin et redonner des lettres de noblesse aux partis devant croiser le fer avec le pouvoir, il faudrait commencer par les textes. Dans des pays tels que le Niger, le Mali, la Guinée, le Burkina Faso ou encore le Tchad, l’institutionnalisation du poste de chef de file de l’opposition est acquise.

Ce dernier bénéficie de plusieurs droits à commencer par celui d’être un interlocuteur de l’exécutif, être reçu à sa demande par le pouvoir mais aussi un accès équitable aux médias. D’autres pays à l’image du Sénégal reconnaissent les droits de l’opposition dans leurs constitutions respectives. Ailleurs, le poids de l’opposition est perceptible au point que dernièrement, la chancelière allemande, Angela Merkel s’est résolue à nommer son principal opposant, Jens Spahn à la tête du ministère de la santé.


Deux blocs politiques

Toutefois, consacrer l’opposition dans les textes n’aurait aucune incidence si les politiciens ne revoient pas leurs priorités et leurs convictions. Aux Comores, les partis politiques de l’opposition ont tendance à incarner l’opportunisme, à préférer une position attentiste et à changer régulièrement “de vision et autre idéologie”. Ce constat serait le résultat des partis qui naissent uniquement avec le pouvoir et qui ont du mal par la suite à vivre sans celui-ci.

Pour jouer pleinement son rôle, les composantes de l’opposition doivent intégrer le concept de l’alternance, le fait de ne pas appartenir au clan qui gouverne au moins jusqu’à la prochaine échéance électorale. Actuellement, cette notion fait défaut dans la mesure où, aucun politicien de l’opposition ne résiste à l’appel du pouvoir.
Pire, ils ont pris l’habitude de toquer aux portes. Comment veut-on que le pouvoir prenne au sérieux l’opposition alors que ses membres ne rêvent que de la quitter dès lors que le pouvoir est détenu par d’autres? Il n’est pas farfelu de constater qu’en un an, des farouches opposants à un régime, deviennent des inconditionnels de ce dernier. Les opposants ne s’assument pas à en croire certains qui mettent l’accent sur le manque de crédibilité.

 

 

Pour une opposition forte, les opposants doivent pouvoir  bénéficier d’un accès aux médias et d’une reconnaissance au niveau de l’Assemblée de l’Union. Devenu le symbole, l’argument infaillible pour mater les manifestations de l’opposition, l’arrêté “liberticide” d’Ahmed El Barwane devrait être annulé.
L’autre point important pour une opposition forte, c’est la restructuration de cette dernière. Elle doit pouvoir influer considérablement sur les différentes élections autres que présidentielles.

Une manière de disposer de plusieurs représentants dans les mairies, les conseils des iles, l’Assemblée de l’Union. Une représentation massive de l’opposition dans ces institutions présagerait la capacité à faire barrage aux initiatives du pouvoir qu’elle jugerait contre-productives.
L’opposition doit pouvoir peser de tout son poids dans l’élaboration des textes législatifs. Encore faudrait-il que ses représentants se reconnaissent dans l’opposition. Ce qui n’est manifestement pas le cas actuellement. Au même titre que les leaders de l’opposition, les députés du même bord politique voguent au gré de leurs intérêts personnels sans aucune once de crédibilité ni de convictions.

Devant ce constat alarmant, quid d’avoir deux blocs politiques à savoir le bloc qui gouverne regroupant tous les partis de la mouvance présidentielle et le bloc de l’opposition qui attend les prochaines échéances ? Force est de constater qu’avec la possibilité d’avoir des mandats de 5 ou 7 ans renouvelables, avec  nos chers opposants connus pour leur impatience, le risque est grand d’avoir un régime sans opposition, même de circonstance.


Commentaires