Les personnalités politiques des Comores actuellement en exil à l’étranger sont formellement informées qu’elles peuvent rentrer en toute tranquillité et quiétude en Union des Comores». À un an de la prochaine présidentielle, les autorités souhaitent «un véritable apaisement du climat politique» afin de «permettre à toutes les Comoriennes et tous les Comoriens de pouvoir exprimer leurs opinions sur le devenir du pays à travers les prochaines élections qui se veulent inclusives, libres, transparentes et démocratiques». C’est par ces mots que le ministère de l’Intérieur explique la genèse de son communiqué.
Soumises à une condamnation
Dans les faits, cette mesure concerne toutes les personnalités politiques du pays actuellement à l’étranger, à l’exception de deux personnes : Mohamed Ali Soilihi et Tocha Djohar. Pour rappel, le premier a été condamné par la Cour de sûreté de l’État le 28 novembre 2022 à une peine de 20 ans de prison, ainsi qu’à la confiscation de ses biens, pour détournement de fonds publics, faux, usage de faux et forfaiture dans le cadre de l’affaire relative à la citoyenneté économique. Quant au deuxième, l’ancien député d’Itsandra, il a été lui, condamné à 20 ans de prison pour sa participation à l’agression du sergent Ali Radjabou lors du référendum de la révision constitutionnelle du 30 juillet 2018. De plus, la Cour de sûreté lui a retiré ses droits civiques pendant dix ans sans possibilité de remise de peine.
Selon Houmed M’saidie, seules ces deux personnes ne sont pas concernées par le communiqué du ministère de l’Intérieur, car elles sont soumises à une condamnation. Toutes les autres «peuvent revenir en toute quiétude. Elles sont parties en disant qu’elles se sentent persécutées. Elles se sont exilées, mais nous ne cessons de répéter à satiété qu’elles peuvent rentrer, il n’y a aucune poursuite à leur encontre.
Même celles qui ont utilisé le sceau de l’État peuvent rentrer », assure-t-il. Il s’agit notamment de Moustoifa Saïd Cheikh, présenté comme «président du gouvernement de transition en exil». «Nous n’avons jamais dit qu’ils constituent une menace quelconque, ni pour la sécurité, ni pour autre chose. Et même ceux qui voulaient user de la violence en visant la Société comorienne des hydrocarbures, comme Achmet Saïd Mohamed, peuvent revenir, et pourtant nous avons des preuves de ses mauvaises intentions», poursuit le porte-parole du gouvernement, avant d’ajouter que cette mesure concerne aussi l’ancien président de l’île de Ndzuani, Mohamed Bacar. «Toutefois, comme pour tous les autres, s’il y a des citoyens qui, pour une raison quelconque, veulent porter plainte contre ces personnes, cela n’engage pas le gouvernement. Seulement, à notre niveau, ils peuvent rentrer au pays», nuance ce ministre d’Etat.
Pour ce qui est des personnes condamnées, telles que Mohamed Ali Soilihi, Tocha Djohar, Abdou Salami Abdou ou encore l’ancien président Ahmed Abdallah Sambi, «s’ils font les démarches permises par la loi et les procédures y afférant pour l’obtention d’une grâce présidentielle, la question sera étudiée au moment venu», affirme-t-il. Du côté de l’opposition, l’ancien candidat à la présidentielle et leader du Ridja, Saïd Larifou, explique qu’une «nouvelle fois, Azali Assoumani et son équipe reconnaissent la gravité de la crise de confiance et politique, devenue structurelle, qui empêche notre pays de bâtir un vrai projet démocratique».
«Je regrette que le président de l’Union africaine n’ait jusqu’ici réussi à mesurer la portée de ses responsabilités et à prendre des actes politiques forts à la hauteur de la souffrance endurée par la population comorienne à cause de sa politique de liquidation démocratique, sociale, culturelle et politique», dit-il. Et d’ajouter : «Notre pays souffre de sérieux problèmes structurels qui compromettent tout projet de son développement. Ce communiqué du ministère de l’intérieur traduit certes une forme d’inquiétude de la part du pouvoir sur les conséquences de cette crise sur l’avenir immédiat du pays, mais il revient à Azali Assoumani de mettre fin à ce jeu de caprice d’enfant en s’adressant solennellement à ses concitoyens pour leur indiquer la feuille de route pour une vraie réconciliation nationale».
Selon Abdouloihabi Mohamed, leader de l’Alliance pour la sauvegarde des institutions (Apsi) et ancien président de l’île de Ngazidja, « l’acte est à saluer, mais l’intention doit être suivie par l’action». A son avis, «c’est plutôt à l’autorité publique de faire une démarche auprès des exilés pour leur assurer de la sincérité de son offre, au lieu de demander à ces derniers de faire le premier pas ».
Et de conclure ainsi : «le ministère de l’Intérieur a des informations fiables sur les personnes intéressées. Il serait en son honneur de donner suite à son engagement». Pour sa part, Me Saïd Larifou assure : «Mon retour au pays est envisageable et la date résultera de la volonté de mes militants et sympathisants ».