La troisième journée des travaux des assises nationales était consacrée hier à la gouvernance institutionnelle, à l’édification de l’Etat et à la consolidation de la nation. C’est devant le président de la République, les gouverneurs de Ngazidja et Mwali que les experts respectivement Mohamed Abdouloihab et Nidhoim Athoumane ont fait un exposé sur les institutions de l’Etat, puis un constat avant de livrer les recommandations.
Investi de la mission consistant à identifier les causes profondes qui gangrènent les institutions publiques, l’ancien président de Ngazidja, Mohamed Abdouloihab n’y est pas allé de main morte.
Pour lui, les Comores regorgent de plusieurs superstructures inefficaces, de conflits de compétences latents et d’institutions budgétivores pour “un Etat paralysé”.
Avant l’indépendance jusqu’à nos jours, un constat d’échec s’impose pour tous les régimes fédéraux. Pour le système actuel, il fait la part belle à l’irresponsabilité politique du président de l’Union, l’éclatement de l’unité nationale, les conflits de compétences et des maigres ressources financières pour plusieurs institutions”, peut-on lire sur le document de bases produit par les experts. Le système de la présidence tournante est qualifié d’”antidémocratique.
Toujours sur la présidentielle tournante, l’expert national lui reconnait des vertus qui ont permis d’éliminer des velléités séparatistes et prôner une promotion de la participation des îles mais toujours est-il qu’elle constitue un frein pour l’émergence d’une nation comorienne en ce sens qu’elle favorise l’”insularisme”, le régionalisme et le “villagisme”“.
Un mandat renouvelable
L’ancien président de Ngazidja a également pointé du doigt le manque de démocratie, les droits et libertés fondamentaux bafoués, le non-respect de la liberté d’expression et de manifestation pour magnifier un déficit de démocratie et d’un Etat de droit.
Pour terminer son intervention, Mohamed Abdouloihab a insisté sur le fait de renforcer la présence de l’Etat sur l’ensemble du territoire national. Pour changer le cours des choses et instaurer une dynamique de développement, l’expert Nidhoim Athoumane a formulé une multitude de recommandations issues des travaux de recherche des experts et des ateliers sur les thématiques des assises.
Concernant la présidentielle tournante, les experts préconisent son maintien mais insistent sur la nécessité d’effectuer une réforme.
La suppression de la tournante n’est pas opportune ni efficace pour assurer la stabilité du pays. Il faudrait toutefois, remplacer l’élection primaire par l’élection générale à deux tours. Il a été recommandé également de faire un mandat présidentiel de 5 ans renouvelable a révélé Nidhoim Athoumane.
En clair, chaque île devrait avoir la possibilité d’effectuer deux mandats successifs de 5 ans et ainsi donner la possibilité au président en exercice de briguer sa succession s’il le souhaite.
“C’est une manière de permettre au peuple de pouvoir sanctionner le président en cas de mauvaise gestion ou de le plébisciter en cas de bonne gestion. Ainsi, nous en finirons avec l’irresponsabilité politique du président ou de lui permettre de finaliser son programme de développement au nom de l’intérêt national”, dit-on.
Toujours au niveau de l’Union, les experts recommandent également la suppression des postes des vice-présidents et de leurs pensions d’après mandat. La cour constitutionnelle est appelée à disparaitre pour renforcer la cour suprême.
L’autonomie insulaire à maintenir
Outre la présidentielle tournante, l’attention était également portée sur l’autonomie des îles. Point d’achoppement qui avait mobilisé les trois gouverneurs, l’autonomie insulaire devrait en effet être maintenue du moins pour l’élection des gouverneurs.
En effet, Nidhoim Athoumane explique qu’il faut diminuer le poids des institutions insulaires et pour cela, il conviendrait de supprimer les commissaires au profit d’une forte administration, et une réduction du coût de fonctionnement.
Les conseillers des iles sont également dans le viseur des recommandations et devraient être supprimés en cas d’adoption du référendum. Le texte érigerait ainsi les maires au rang de conseillers des gouverneurs.
Convaincus du manque de démocratie et de l’absence d’un Etat de droit, les experts proposent le renforcement de la liberté d’expression, des médias, des manifestations pacifiques et de définir au niveau de la constitution tous les contenus des droits fondamentaux.
Pour ce qui est de la consolidation de la nation, les recommandations des ateliers prônent la promotion de la religion comme étant le ciment de la nation, le sport pour la promotion de l’esprit national, la culture, la langue.
Pour Nidhoim Athoumane, “il faut la mise en place d’un fonds de solidarité nationale, la promotion de l’égalité des chances pour intégrer la fonction publique mais aussi et surtout mettre en pratique la culture de la méritocratie”.