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Un sommet, cinq chefs d’Etat et d’immenses défis communs

Un sommet, cinq chefs d’Etat et d’immenses défis communs

Politique | -   A.S. Kemba

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Les dirigeants des pays membres de la Commission de l’Océan indien (Coi) se retrouvent dans la capitale malgache pour repenser l’avenir de l’organisation et poser les nouveaux jalons de la coopération régionale.

 

Antananarivo vibre depuis hier mercredi 23 avril au rythme du 5eme sommet des chefs d’Etat de la Commission de l’Océan indien (Coi). Le Comorien, Azali Assoumani, le Français, Emmanuel Macron, au nom de l’île de la Réunion, le Malgache Andry Rajoelina, le premier ministre mauricien, Navin Ramgoolam et le Seychellois Wavel Ramkalawan, se trouvent déjà dans la Grande Ile avec des agendas différents avant le sommet prévu au Centre des conférences internationales (Cci) d’Ivato à Antananarivo. La séance d’ouverture des travaux est prévue dans la matinée. (Lire page 3).


Les autorités malgaches se sont mobilisées depuis plus d’un an pour préparer « un accueil digne » à la mesure de leurs hôtes. Environ, 1800 militaires, policiers et gendarmes sont mobilisés pour veiller à la sécurité de cette rencontre de haut niveau, selon Lova Hasinirina Ranoromaro, porte-parole du dirigeant malgache qui précise, cité par Madagascar Tribune, que «la sécurité sera plus renforcée plus particulièrement dans le centre-ville, lors de ce périple de 48 h du chef d’Etat français».
La Grande Ile savoure déjà ce sommet qui permet aux autorités de démontrer leur politique d’ouverture et les fruits de leur diplomatie. «Les visites d’État constituent l’une des plus hautes expressions du respect et de la confiance entre deux nations.

Elles traduisent la reconnaissance mutuelle de la souveraineté, de la dignité et de la volonté partagée de renforcer les liens bilatéraux », s’est félicité le ministre malgache des Affaires étrangères, Rafaravavitafika Rasata, cité par L’Express de Madagascar. La capitale malgache n’est pas à sa première expérience du genre puisque Madagascar a déjà accueilli le même sommet en 1991 et en 2005 avec la même frénésie diplomatique et le même rituel protocolaire. « Côté sécurité, des éléments des forces de défense et de sécurité sont déjà mobilisés jour et nuit sur plusieurs axes de la capitale afin de maintenir l’ordre, avant, pendant et après l’événement. Des dispositifs spécifiques ont également été mis en place pour assurer la protection des délégations dès leur arrivée », nous apprend l’Express de Madagascar. Mais, vingt ans après, les enjeux ne sont pas les mêmes, les défis aussi.

Un niveau de développement contrasté

Les Etats membres de la Commission de l’Océan indien (Coi) ont du pain sur la planche pour faire triompher le rêve indianocéanique né il y a 40 ans : cinq langues différentes, dont deux en partage, un niveau de développement contrasté, une connectivité maritime et aérienne qui laisse toujours à désirer, une mobilité quasi inexistante et des intérêts géopolitiques qui se négocient sous le poids de la diplomatie souterraine. Pour de nombreux observateurs de la région de l’Océan indien, le sommet d’Antananarivo de 2025 ne doit pas se limiter seulement aux poignées de mains, aux sourires, aux photos de famille et aux déclarations de bonnes intentions.

La thématique choisie semble aller dans le bon sens même si nombreux sont ceux qui attendent beaucoup plus de projets structurants pour sortir les populations de l’ornière avec des perspectives échelonnées dans le temps pouvant aider à harmoniser les capacités de développement et de lutte contre la pauvreté.
Car, aujourd’hui, si les Seychelles, l’Ile Maurice et l’île de La Réunion s’en sortent mieux avec des Pib respectivement estimés à près de 17, 6 milliards de dollars, 14,6 milliards de dollars et 18,5 milliards de dollars, les Comores et Madagascar sont toujours à la traine et n’arrivent pas à se hisser au même niveau que leurs consœurs des autres îles de la region avec des Pib estimés à 2 et 16,5 milliards de dollars, toujours insuffisants pour répondre aux enjeux de développement socio-économique.

Un pacte commun de sécurité

Si les pays membres de la region affichent «une volonté de développer une coopération sincère pour garantir les échanges», comme l’a recommandé la Déclaration finale du quatrième sommet organisé le 23 août 2014 à Moroni, aucune mesure ambitieuse n’a été engagée dix ans après pour lever les barrières, assurer les flux des biens et garantir la mobilité des populations. Les Etats réussissent, malgré tout, à concevoir et à mettre en œuvre des programmes communs en matière d’énergie, de sécurité maritime, d’environnement et de santé. Même si cela semble insuffisant au vu des attentes de la plus grande majorité de la population indianocéanique.


Mais les responsables de l’institution restent tout de même optimistes. «Le Sommet d’Antananarivo sera l’occasion de faire le point sur ces avancées et de tracer ensemble une nouvelle feuille de route pour la région. Car si beaucoup a été fait, il reste encore à faire : mutualiser nos expertises, renforcer nos outils régionaux, parler d’une seule voix face aux grands enjeux globaux », laisse entendre le patron de l’organisation intergouvernementale, le Malgache Edgard Razafindravahy. (Lire sa tribune, page 4). Le sommet devrait apporter des réponses et des plans de lutte contre l’insécurité alimentaire qui gangrène surtout Madagascar et les Comores.


Autre défi majeur à faire face dans la région : la sécurité des frontières maritimes et l’inexistence d’un pacte commun de sécurité et de défense. Chacun développe ses réseaux propres de coopération de défense. Les Etats membres de la Commission de l’Océan indien (Coi) sont aujourd’hui confrontés à des fléaux tels que la piraterie maritime et les contrebandes des produits qui constituent l’une des graves menaces de la zone comme l’a dit, à de nombreuses reprises, le Centre régional de fusion de l’information maritime (Crfim), dans ses revues mensuelles.

La zone Océan indien étant réputée riche en ressources naturelles demeure aujourd’hui une zone de toutes les convoitises, doublée avec sa position stratégique dans un Canal de Mozambique qui attire toujours les grandes firmes pétrolières. Reste à savoir comment les pays parviendront à fédérer leur vision pour garantir la sécurité et la stabilité dans la region.

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