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Voyage du ministre de l’Intérieur à Paris I « Il faut restituer ce dossier à son niveau diplomatique »

Voyage du ministre de l’Intérieur à Paris I « Il faut restituer ce dossier à son niveau diplomatique »

Politique | -   Faïza Soulé Youssouf

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Alors que le ministre comorien de l’Intérieur comorien est attendu à Paris par son homologue français, beaucoup demandent que le dossier relatif à l’opération Wuambushu soit géré par les ministères des affaires étrangères des 2 pays. Jusqu’ici, la sécurité semble avoir pris le pas sur la diplomatie dans le silence assourdissant du ministre comorien des affaires étrangères.

 

Le ministre de l’Intérieur, Fakridine Mahamoud, est attendu à Paris alors que l’opération Wuambushu diligentée par son homologue français, Gérald Darmanin, sur l’île comorienne de Mayotte semble au point mort, les Comores ayant refusé d’accueillir les refoulés. Si la date de son voyage n’est pas encore connue, des leaders politiques, des membres de la société civile réprouvent que des ministres de l’Intérieur s’occupent ainsi de diplomatie.

Il est vrai que le silence de l’actuel patron de la diplomatie comorienne, Dhoihir Dhoulkamal est particulièrement assourdissant. Des sources proches du palais présidentiel de Beit-Salam indiquent ainsi que le dossier Wuambushu est géré, outre le chef de l’Etat, par le ministre de l’Intérieur, le porte-parole du gouvernement Houmed Msaidie et le conseiller diplomatique, Hamada Madi, plus connu sous le surnom de Boléro. Une situation que peu d’interlocuteurs comprennent d’autant que ce dossier, épineux s’il en est, a jusqu’ici, toujours été géré par les Affaires Étrangères des Comores et de la France.

« Dans le différend de souveraineté qui oppose les Comores à la France, les affaires concernant de Mayotte relèvent depuis 1975, de la diplomatie et non du ministère français de l'intérieur. Vous remarquerez que l'Accord de 2019 dont se réfèrent les protagonistes de Wuambushu a été signé par les ministres des Affaires étrangères d’alors, Jean-Yves Le Drian et Souef Mohamed El-Amine Or, Darmanin voudrait en faire une affaire migratoire interne à la France. Ce qui est inacceptable. Pour sortir de cet imbroglio, il faut restituer ce dossier à son niveau diplomatique entre les deux États » déclare Kamal Eddine Saindou, ancien journaliste et actuel directeur de cabinet du maire de Mutsamudu.

« Abroger le visa Balladur »

L’ancien président de l’île de Ngazidja et actuel avocat au barreau de Moroni, Mohamed Abdouloihab, va un peu plus loin mais il est d’avis que l’opération Wuambushu ne doit être pas réduite à son seul aspect sécuritaire dont le principal objectif serait « la déportation en douce de Comoriens » pour reprendre les propres termes de ce magistrat de formation.  « Au lieu de négociations entre les 2 ministres de l'Intérieur, le gouvernement comorien devrait proposer au gouvernement français une rencontre inter secteurs (Intérieur, Affaires Étrangères, Économie, Finances) pour dénoncer l'Accord-Cadre de 2019 », suggère l’actuel bâtonnier. Il prône par ailleurs, « la mise en place d'une agence franco-comorienne chargée de l'élaboration de projets et de la recherche de financement sur des programmes de développement harmonisé de l'archipel » et de l’abolition du visa Balladur, « seul moyen d’arrêter les pertes de vies humaines ».

 

Nadia Tourqui du « Collectif stop Wuambushu », prône en plus du volet diplomatique, un traitement international de la question de Mayotte.  « Nos propositions sont de régler une bonne fois pour toutes la question de l’unité et de l’intégrité territoriale des Comores. C’est un cadre diplomatique et international qui serait le plus approprié pour cette discussion » avance-t-elle.

« Les ministres de l’intérieur de chaque pays s’occupent de leur politique intérieure respective », devait-elle ajouter.

Même son de cloche chez l’actuel gouverneur de Ndzuani, Anissi Chamsidine. « Je considère que la situation ne se pose pas en termes techniques qui justifient une rencontre au niveau des ministres de l'intérieur. La clarification entre la France et notre pays doit se faire au plus haut sommet. Il serait donc logique que les ministres des affaires étrangères des deux pays se retrouvent pour préparer la rencontre des présidents. Au niveau actuel de la crise, la solution est diplomatique et internationale », estime-t-il.

 

D’autres pointent du doigt l’idée même de cette visite, à l’instar d’Idriss Mohamed du Mouvement Ukombozi. « La visite prend l'allure d'une convocation, indexé pour n'avoir pas réussi à faire plier les Comores dans l'accueil des expulsés, Gérald Darmanin veut prouver à ses opposants qu'il a la main », croit-il savoir.

« Au total, c’est une situation embarrassante pour les deux États qui en recherchent une issue acceptable. Cette "visite" s'insère dans ce cadre et risque de faire chou blanc sauf si Azali Assoumani, consent à complètement se plier », analyse cette figure importante du paysage médiatique comorien.

 

 

 

 

 

 

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